Autrefois «Ventre» de Paris, les Halles, l'un des plus vieux quartiers de Paris, fait une nouvelle fois peau neuve avec l'inauguration mardi de la «Canopée», un bâtiment coiffé d'un toit aérien en forme de feuille.

Ouvert dans la soirée au public, le bâtiment, qui abrite le deuxième centre commercial de France, fera une large place à la culture, avec un centre hip-hop, une médiathèque et des salles de répétition pour les associations de musique, danse ou théâtre.

Signée par les architectes Patrick Berger et Jacques Anziutti, la Canopée -- nom donné à la cime des arbres -- est une structure aussi vaste que la célèbre Cour carrée du Louvre: un toit formé de 18 000 écailles de verre surplombe un vaste espace de circulation ouvert à l'ouest sur une largeur de 96 mètres.

Après cinq ans de travaux, «Les Halles entrent dans le XXIe siècle», s'est réjoui Jean-Louis Missika, adjoint à l'urbanisme de la ville de Paris. Créé au Moyen âge, cet immense marché «fut pendant des siècles le "ventre de Paris"» qui nourrissait la capitale, a-t-il rappelé.

Ce fut ensuite une «immense blessure» avec l'excavation du chantier avant la construction du «Forum des Halles» inauguré en 1979, dit-il. Aujourd'hui, le nouveau bâtiment «répare la blessure initiale».

La Canopée, qui relie la «ville du dessous à celle du dessus», selon ses concepteurs, surplombe un centre commercial lui aussi rénové avec des allées plus spacieuses, des plafonds rehaussés.

Le nouveau centre va au total accueillir 150 enseignes, contre 115 auparavant. Deux nouvelles brasseries, conçues avec le chef Alain Ducasse pour la première et le designer Philippe Starck pour la seconde, vont également ouvrir.

L'une des prouesses du chantier a été d'être réalisé en «site occupé», sans interruption du fourmillement d'activités de ce quartier au coeur de la capitale.

Car les Halles, ce sont 750 000 passagers quotidiens transitant par la station Châtelet-Les Halles, la plus grande gare souterraine d'Europe avec ses 3 lignes de trains de banlieue et ses 5 lignes de métro, elle-même encore en rénovation.

Quelque 300 000 personnes arpentent chaque jour le quartier, dont la moitié fréquentent le centre commercial.

Le chantier, qui a globalement coûté un milliard d'euros, dont 240 millions pour la Canopée, ne sera néanmoins achevé qu'en 2018, après la fin des travaux dans la station de métro et la livraison finale du jardin.

La Canopée des Halles : des chiffres et une polémique sur sa couleur

Une polémique sur sa couleur, de nouveaux visages, des mesures de sécurité... Voici la Canopée, nouveau symbole des Halles au coeur de Paris inaugurée mardi.

La polémique: c'est quoi ce jaune?

A peine inaugurée, la Canopée suscite la polémique sur sa couleur, présentée par son architecte Patrick Berger comme une couleur «sable». «Nous cherchions une couleur douce pour avoir une lumière diffuse. La lumière a légitimé la couleur. On arrive sur une place arborée dont la canopée diffuse une lumière douce, où le ciel est fragmenté. C'est ceci qui a été traduit en architecture. Petit à petit, on est arrivé à cette tonalité», a-t-il dit lors du discours d'inauguration.

Pour le député et conseiller de Paris LR Pierre Lellouche dans une lettre ouverte à Anne Hidalgo, la structure est «massive, laide et jaunâtre». Pour Gilles Pourraix, vice-président de l'association de riverains Accomplir, très critique, «c'est pas gai, gai, cette espèce de jaune. Quand il pleuvra, on aura tous le teint jaune», dit-il à l'AFP.

La sécurité

Dans un PC sécurité, les mouvements du Forum et ses abords seront scrutés sur une dizaine de grands écrans, eux-mêmes divisés en une mosaïque retransmettant les images de 400 caméras. En cas d'événement majeur, ces images sont renvoyées directement au commissariat et à la préfecture de police, dit Alexis Veron, directeur du Forum.

Comme la gare du Nord et les Champs-Elysées, les Halles accueillent une Brigade de Sécurité de Terrain de 25 fonctionnaires de police qui patrouilleront sur le site, avec un d'entre eux dans le PC sécurité pour les guider. Une grosse cinquantaine d'agents de sécurité privés vont surveiller le site, sans compter les agents et les systèmes de vidéosurveillance des magasins eux-mêmes. Une petite équipe d'agents cynophiles patrouilleront jour et nuit.

À table

A chaque bout d'aile de la Canopée, avec vue sur le (futur) jardin (aujourd'hui couverts de baraques de chantier), deux brasseries.

Le Champeaux, estampillée Alain Ducasse «veut nourrir le consommateur d'aujourd'hui, curieux et infidèle», de 7h à minuit, dit le chef. La carte s'affiche sur des lamelles pivotantes, façon tableau de gare ou d'aéroport. Une spécialité : le soufflé. Il y aura une terrasse de 80 couverts. À l'intérieur, on retrouve «l'esprit des brasseries des années 20, avec des éléments de modernité», dit le partenaire du projet Olivier Maurey. Le restaurant, avec le chef Bruno Brangea en cuisine, ouvre le 11 avril.

En face, le Za, designé par Philippe Starck. Parallèles au bar qui entoure la cuisine ouverte, de longues tables communes. Le mobilier est de bois clair. On y mange des «zoeufs» et des «zartines».

Quelques chiffres

Avec sa charpente, elle pèse 8000 tonnes, à peine un peu plus que la Tour Eiffel, dit le groupe Vinci. Sous le toit, un espace de 140 m de long sur 80 m de large. Le sous-sol s'enfonce sur 28 mètres. Le toit est formé de 18 000 écailles de verre sur 28 000 m2. Le jardin, qui sera fini en 2018, s'étale sur 4,5 hectares.