En quittant le village de Saint-Urbain par la route 381, on plonge dans un autre univers. Adieu paysages champêtres qui font la renommée de Charlevoix, bienvenue montagnes aux sommets vertigineux et aux parois escarpées qui marquent, de façon spectaculaire, la naissance du massif des Laurentides.

Sur les 100 prochains kilomètres de cette route panoramique, qui mène jusqu'au Saguenay, on ne croisera plus aucun village. Que des montagnes, de la forêt, des lacs, quelques chalets et roulottes de pêcheurs. Une étrange église en bois rond plantée au milieu de nulle part, vestige de notre zèle religieux, et surtout, un majestueux territoire sauvage, celui du parc national des Grands-Jardins.

Cette aire protégée, vaste de 310 km2, renferme une végétation nordique qui pousse normalement 500 km plus au nord, à la hauteur du 52e parallèle. C'est la taïga, forêt ouverte peuplée d'épinettes noires, un milieu de vie favorable à la survie d'une harde de caribous des bois. Au kilomètre 18 (les bornes kilométriques servent ici de points de repère), on entre dans cet îlot du Grand Nord par la vallée encaissée du Gros Bras, unique porte d'entrée de ce parc national.

Au kilomètre 21, c'est le point de départ pour deux fabuleuses randonnées.

Première étape: l'ascension du mont du Lac-des-Cygnes, un sentier de 8,6 km (aller-retour) nous transportant à 980 m d'altitude, où se trouve la toundra alpine la plus méridionale du Québec. Pour franchir son dénivelé de 480 m - l'équivalent en hauteur de trois mâts du Stade olympique -, il faut compter au moins quatre heures de raquette (retour compris).

Difficile, oui, mais pas surhumain. Car le sentier, repensé il y a quelques années, grimpe de façon graduelle, évitant la surchauffe et l'essoufflement, sauf dans la toute dernière portion du tracé, qui monte à pic. Quand la fatigue s'installe, il suffit de lever la tête pour contempler les superbes panoramas qui rappellent ceux des Chic-Chocs.

Plus on monte, plus les arbres rabougrissent. Jusqu'à ce qu'ils disparaissent complètement pour laisser le champ libre aux lichens. Au sommet, la vue à 360 degrés nous jette par terre. Charlevoix dans son entièreté est littéralement à nos pieds. Seul le Saint-Laurent, visible par beau temps, se perd dans les moutons blancs.

Cette randonnée imprègne les gens. Beaucoup la font et la refont, comme un rituel. «Il y a aussi beaucoup de randonneurs qui reviennent ici après avoir surmonté une épreuve, comme un cancer. À son sommet, ils réalisent tout le bonheur d'être encore en vie», raconte Martine Simard, qui travaille au poste d'accueil du parc.

L'autre sommet

Le lac des Cygnes s'adresse aux personnes en bonne forme physique. Toutefois, pour les randonneurs débutants et les familles, il existe une possibilité tout aussi intéressante: la conquête du sommet La Chouenne. Long de 4,4 km, ce sentier aménagé en 2009, exigeant deux heures d'effort, comblera tous les adeptes de randonnée. Car du premier au dernier kilomètre, La Chouenne offre d'innombrables points de vue sur les montagnes de l'arrière-pays. De son sommet dénudé, on domine Charlevoix et son cratère. Coup de coeur garanti.

Sur les plateaux

Deux randonnées plus tard, on reprend la route 381 pour s'enfoncer au coeur du rhinocéros, le parc ayant cette forme inusitée. Au kilomètre 31, on se gare au Centre de services Thomas-Fortin, dont les ouvertures sont bloquées par du contreplaqué pendant la saison hivernale. Qu'à cela ne tienne, le parc, lui, n'est pas barricadé. Au-delà de la barrière, 50 km de sentiers balisés et cinq chalets, deux refuges et un camp rustique ouvrent leurs portes.

De là, on se trouve à 3 km des chalets Benjamin-Simard et Joseph-Girard, face au lac Sainte-Anne du Nord, et à 10 km des chalets Beaumont #1 et #2. Puisque les routes ne sont pas déblayées, on s'y rend en ski ou en raquette. On peut voyager léger, car le parc offre le service de transport de bagages à partir de 45$ l'aller-retour, pour le groupe.

Puisqu'un incendie de forêt a ravagé ce secteur en 1998, il ne reste, sur la majorité de cette zone, que quelques chicots rappelant la forêt ancienne. De prime abord, ce paysage nous semble désolant, mais on découvre vite les avantages qu'il y a à se balader dans cet ancien brûlis. Sans arbre, le regard porte au loin. Rien de plus facile alors de contempler lacs, montagnes et... orignaux. Au lac à Poux, à 1 km des chalets du lac Sainte-Anne, le plus gros de nos cervidés se donne littéralement en spectacle. Apportez vos jumelles et appareils photo!

Quelques bonnes adresses

Hébergement

BAIE-SAINT-PAUL

Aux portes du Soleil

Les motels, vous les fuyez comme la peste. Pour celui-ci, vous devriez faire exception. Acquis par un Suisse il y a 10 ans, cet établissement entièrement rénové propose 17 chambres mignonnes à un prix abordable. Sur place, le P'tit Resto Suisse sert des plats réconfortants, comme raclette, fondue et papet vaudois. La solution parfaite pour vous remettre d'une journée de ski.

Prix: entre 66$ et 96$ pour deux personnes. Tél: 418-435-3540 1-877-435-3540

auxportesdusoleil.com

Auberge Cap-aux-Corbeaux

Perché à flanc de montagne, sur le cap aux Corbeaux, cet établissement procure des vues sensationnelles sur le Saint-Laurent, l'Isle-aux-Coudres et les pentes enneigées du Massif. Dix chambres, toutes orientées vers le fleuve, accueillent les voyageurs.

Prix: entre 100$ et 140$ pour deux, incluant le petit-déjeuner, en saison hivernale. Tél: 418-435-5676 1-800-595-

5676

www.cap-aux-corbeaux.com

LA MALBAIE

Auberge des Peupliers

Située à Cap-à-l'Aigle, un hameau surplombant le Saint-Laurent, cette auberge aux trois pavillons propose des chambres élégantes et, surtout, une excellente table mettant en vedette les produits du terroir. Trait distinctif, on peut y réserver, en exclusivité, la baignoire à remous pour des périodes données.

Prix: entre 115$ et 200$ pour deux avec le petit-déjeuner, forfait (déjeuner, souper cinq services, pourboire inclus) entre 249 et 335$. Tél.: 418-665-4423 1-888-282-3743

www.aubergedespeupliers.com

Restaurant

Café bistro Chez Bouquet

Émeu, agneau, vin de tomates, fromage, pintade, alouette! Les produits de Charlevoix sont à l'honneur dans ce bistro au style urbain, situé dans l'ancien magasin général de Baie-Saint-Paul. Son imposant foyer au gaz, trônant au milieu des convives, donne une atmosphère chaleureuse à souhait. Ce resto sympa fait partie de l'auberge La Muse.

Prix: table d'hôte à 35$, menu gastronomique à 55$, à partir de 99$ pour deux personnes. Tél.: 418-240-3444 lamuse.com