Un séjour de rêve sur le bord d'un lac sauvage, dans une maison dotée d'un spa et de quatre foyers ou un cauchemar dans une bicoque mal chauffée, entourée de voisins bruyants et à des lieues des pentes? Louer un chalet est une démarche qui mérite d'être bien faite. Voici comment s'y prendre, à l'avance, pour profiter à fond de ses vacances...

Thomas Asselin se souvient en rigolant de la première fois qu'il a loué un chalet au Québec. Répondant à sa demande d'informations, l'office de tourisme de la région lui a envoyé, par la poste, une série d'annonces laconiques découpées dans les journaux locaux. En noir et blanc. Avec de toutes petites photos bien pixelisées. Aussi bien choisir à l'aveuglette.

C'était il y a 10 ans à peine. Depuis, la situation a radicalement changé.

Les sites de location de chalets se sont multipliés à la vitesse grand V depuis le milieu des années 2000. Le consommateur a maintenant l'embarras du choix. En quelques clics et dans le confort de son foyer, il peut comparer les offres de milliers de propriétaires de chalet, et visiter virtuellement en photos et en vidéo leurs propriétés et même en explorer les environs grâce à des applications comme googlestreetview et googlemaps.

Des milliers, oui.

«La situation du Québec est unique. On ne retrouve pas beaucoup, sinon aucune autre destination dans le monde où il y a autant de chalets à louer en pleine nature», dit Maïthé Levasseur, analyste au Réseau de veille en tourisme de la chaire de tourisme Transat de l'École des sciences de la gestion de l'UQAM. Le marché des chalets loués arrive ainsi au deuxième rang de tous les revenus d'hébergement générés par l'industrie du tourisme d'agrément au Québec. En 2007, l'équivalent de 1 139 000 personnes ont passé une nuit dans un chalet ou un condo loué dans la province, selon Statistique Canada.

Photo: fournie par Tremblantliving.com

Ce chalet de Mont Tremblant compte sauna, salle de billard, table de massage, bar et salle de conditionnement physique privés, et non pas un mais bien quatre foyers, tout ça pour la coquette somme de 25 000$ par semaine, dans le temps des Fêtes.

L'internet a joué un rôle important dans le développement de l'industrie, note Maïthé Levasseur. Mais il faut dire, aussi, que l'offre a beaucoup changé au cours des dernières années et s'est avantageusement renouvelée. Le règne du chalet cubique version années 70, avec rideaux à carreaux, meubles de mélamine et planchers de linoléum est terminé.

De la cabane en bois sans électricité ni eau courante au chalet cinq étoiles avec piscine intérieure, sauna, terrain de tennis et piscine privés, cinémas maison, comptoirs en marbre, un univers de possibilités s'offre maintenant aux vacanciers qui souhaitent se ressourcer loin de la ville... sans faire une croix sur le confort.

Évasion luxueuse

«La tendance est aux chalets de plus en plus luxueux», confirme Cécile Eas, directrice de l'agence Québec location de chalets, à l'instar de la plupart de ses concurrents. À preuve: cette petite annonce offrant un condo de 8000 pi2 au pied du mont Tremblant avec sauna, salle de billard, table de massage, bar et salle de conditionnement physique privés, et non pas un mais bien quatre foyers pour la coquette somme de 25 000$ par semaine pendant la période des Fêtes. Un cas rare, il est vrai, d'abord destiné aux consommateurs américains et européens. Mais il n'est pas exceptionnel de trouver des chalets à 5000$ par semaine sur les sites de location du Québec.

Sans être devenue la norme, la présence d'un spa est de plus en plus fréquente et plusieurs clients semblent y accorder autant d'importance qu'à la présence d'un foyer ou la proximité d'un lac ou d'un centre de ski. Et même si, de prime abord, le premier avantage des vacances est de pouvoir décrocher du boulot, de plus en plus de chalets assurent leurs clients d'un accès à l'internet sans fil. «Parfois, c'est le meilleur argument des parents pour convaincre leurs adolescents de les suivre en vacances. S'ils savent qu'ils peuvent continuer à utiliser leur iPhone et resteront en contact avec leurs amis, l'éloignement leur pèsera moins», dit Jean-François Demers, de chaletsalouer.ca. Et c'est aussi un compromis idéal pour les travailleurs qui veulent étirer leurs vacances et comptent pouvoir consulter leurs courriels entre une partie de pêche et une randonnée en forêt.

Du coup, l'économie n'est plus nécessairement la raison première de préférer le chalet à l'hôtel. «On loue pour des questions de confort, pour le plaisir de pouvoir recevoir des amis à souper, inviter sa famille. Bref: pour être en vacances comme à la maison», remarque Thomas Asselin, de chaletsQC.com

Photo: Bernard Fugres, fournie par www.valbourg.com

Le règne du chalet cubique version années 70, avec rideaux à carreaux, meubles de mélamine et planchers de linoléum est terminé. Aujourd'hui, on peut louer un chalet dessiné par un architecte, comme ce chalet de Val-David conçu par Robert Lachance.

À vos marques, prêts, cherchez!

Mais comment s'y retrouver, dans cette manne? D'abord avec le système de classification mis en place par Québec en 2001 qui oblige tous les propriétaires de résidences de tourismes voulant se lancer dans la location à s'inscrire auprès de la CITQ. Des inspecteurs évaluent tous les deux ans chaque chalet ou condo en vertu de critères précis et leur décernent une cote de zéro à cinq étoiles, similaire à celle en vigueur pour les hôtels et les gîtes. Tous les chalets accrédités sont ensuite répertoriés sur le site gouvernemental Bonjourquebec.com, mis à jour deux fois par semaine.

L'évaluation de la CITQ - plus objective que celle des propriétaires - a toutefois ses limites: elle mesure la quantité plus que la qualité des services offerts. Bref, impossible de savoir si le chalet est décoré avec goût ou si l'accueil des propriétaires est chaleureux. Attention aussi à ne pas conclure qu'un chalet dépourvu d'étoile est un chalet «à éviter». Si on veut un séjour dans un refuge rustique, c'est précisément ce qu'il faudra rechercher.

Au cours des dernières années, plusieurs sites internet entièrement consacrés à la location de chalets ou de condos ont également vu le jour, parmi lesquels on retrouve www.quebeclocationdechalets.com (1243 entrées), www.chaletsqc.com (821 entrées), chaletsauquebec.com (1974 entrées) et chaletsalouer.ca (1713 entrées). Même s'ils recensent leur lot de chalets non accrédités, la navigation y est nettement plus agréable que sur le site bonjourquebec.com et permet de comparer aisément les chalets offerts aussi bien par les particuliers que les consortiums privés. Chaletsauquebec offre grâce à googlestreetview, de jeter un oeil sur les environs pour vérifier si le lac est aussi proche et l'endroit aussi tranquille que le prétend l'annonce.

Photo: Daniel Lamothe, chaletsauquebec.com

Cet ancien wagon a été reconverti en chalet dans la région Chaudière-Appalaches.

Par contre, rares sont ceux qui permettent aux consommateurs de commenter les chalets offerts, comme le fait Tripadvisor.com: les avis publiés sur Chaletauquebec.com ont tous été approuvés par les propriétaires. De plus, la CITQ ne dévoile pas le nom des propriétaires qui ont fait l'objet de plaintes, dont le nombre s'avère toutefois plutôt faible: entre le 14 août 2009 et le 7 avril 2010, la CITQ a enregistré huit plaintes de consommateurs, la plupart concernant la malpropreté des lieux. Les clients les plus rigoureux peuvent prendre la peine de vérifier sur le site (gratuit) jugements.qc.ca si le propriétaire du chalet choisi a déjà fait l'objet d'une condamnation.

Reste que, dans tous les cas, il faut s'y prendre très tôt et, idéalement, commencer ses recherches six mois avant les vacances estivales, les fêtes de Noël et la semaine de relâche pour les régions les plus populaires (Charlevoix, Cantons-de-l'Est, Laurentides et Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine).

«Les meilleures offres sont celles qui partent le plus tôt. Les retardataires devront se contenter des chalets plus chers, plus loin du bord de l'eau ou des pentes de ski et moins confortables (sans lave-vaisselle, sans foyer, sans l'internet, etc.)», rappelle Martin Rouleau, de chaletsauquebec.com. Certains s'y prennent jusqu'à un an d'avance pour les régions où l'offre est plus restreinte, comme la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine.

L'improvisation est tout de même permise et facilitée sur certains sites qui offrent depuis peu des rabais de dernière minute. «Mais plus vous avez des attentes sont précises, plus il faut s'y prendre tôt. Sinon, vous risquez fort de ne pas trouver chaussure à votre pied», conseille Cécile Eas. Et donc, d'être déçu.

Photo: fournie par Maryse Roy

Même si les chalets à louer qui sont offerts au Québec sont de plus en plus luxueux, certains préfèrent encore la rusticité de la nature, comme cette roulotte de Saint-Fortunat.

Pour éviter les mauvaises surprises

Certification

Choisissez un établissement certifié par la CITQ. Le fait que le propriétaire ait entrepris les démarches juridiques - et obligatoires - pour obtenir sa certification démontre un certain degré de sérieux. Le classement de la CITQ est le seul effectué en vertu de critères précis, par des inspecteurs du gouvernement, pour comparer plus objectivement les chalets entre eux.

Assurance

Votre séjour sera couvert par votre police d'assurance habitation personnelle. Si vous n'en possédez pas, il est temps de vous y mettre.

Annulation

Renseignez-vous clairement sur les politiques en cas d'annulation. Obtiendrez-vous un remboursement partiel? Complet? Combien de temps avant la prise de possession?

Dépôt

Le versement d'un dépôt est une pratique courante. Son montant varie généralement de 200$ à 500$, mais il peut être beaucoup plus élevé selon la valeur de la propriété louée. L'Office de protection du consommateur recommande fortement de régler l'acompte par carte de crédit: en cas de pépin, il sera plus facile d'obtenir un remboursement.

Bouche à oreille

Demandez des conseils autour de vous: un chalet qui a séduit un oncle ou un collègue de travail a plus de chances de répondre à vos attentes qu'un autre sélectionné au hasard.

De visu

La quasi-totalité des propriétaires affichent des photos de leur chalet sur le web. Si elles ne vous inspirent pas, passez sans hésiter au suivant: la réalité ne risque guère d'être mieux. En cas de doute, et si le temps vous le permet, n'hésitez pas à demander de visiter le chalet avant de vous engager.

Contrat

Même si la plupart des transactions se font de gré à gré, au téléphone ou par courriel et qu'aucune loi n'oblige un locateur à s'engager par écrit auprès de son client, un contrat écrit reste encore LE meilleur moyen d'éviter les mauvaises surprises. Faites-y inscrire tous les détails de la transaction: le montant du dépôt, la politique d'annulation, le tarif, l'accès à un lac ou à un spa, etc. Mais aussi, des détails comme le fait que la literie soit fournie ou non, ou encore si le ménage doit être fait par le locataire ou le propriétaire du chalet.

Recours

Le chalet est sale? Le lac cristallin promis ressemble plutôt à une mare boueuse? Les agences de location affirment que les plaintes sont rares. Mais elles existent bel et bien et les recours sont assez limités. Les consommateurs lésés doivent se tourner vers la Cour des petites créances et poursuivre le propriétaire pour les préjudices causés. Sachez toutefois que la somme maximum qu'il sera possible de récupérer est de 7000$. Il est important de conserver toutes les preuves des dépenses liées à cette - mauvaise - aventure, incluant, par exemple, la facture d'essence pour se rendre dans un chalet qui n'existait tout simplement pas!