Pas de jeux gonflables ni de petit train. Pas l'ombre d'une disco mobile. Au sommet du mont Rigaud, à un peu moins d'une heure de Montréal, la Sucrerie de la Montagne souligne le temps des sucres à l'ancienne: avec des bûches dans le poêle à bois, un chansonnier et des cuillers pour s'improviser musicien.

Nous nous sommes arrêtés dans la cabane à sucre de Pierre Faucher, la semaine dernière, pour un bref retour en arrière. En famille, nous avons découvert la rusticité d'une sucrerie d'antan, l'électricité en prime.

 

Le coloré propriétaire à la barbe blanche a acheté le domaine de 120 acres il y a un peu plus de 30 ans. Avec du bois repris d'anciennes granges, il a construit une salle de réception chauffée au bois et le plus souvent éclairée grâce à des lampes à l'huile. En haute saison, environ 650 personnes peuvent s'y asseoir.

Avec son équipe, il recueille l'eau d'érable à la main dans des seaux et cuit un pain artisanal au four à bois. En marge des repas copieux qu'il sert, il limite le divertissement autour de la cabane à des tours de carriole ainsi qu'à la visite de la boulangerie et de l'évaporateur pour préparer le sirop. Après le repas, les convives marchent donc dans les sentiers autour de la sucrerie, ou discutent dans la cabane, sans plus.

Retour aux sources

Les visiteurs viennent de loin pour goûter à cette authenticité. Lors de notre passage, des touristes de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et de l'Angleterre étaient attablés près de nous. Et question maniement de la cuiller, le Québec s'est fait coiffer par le Nouveau-Brunswick ce soir-là!

Sur la table, le repas du temps des sucres est typique: de la soupe aux pois, des oeufs, des saucisses, du ragoût de boulettes, des fèves au lard, des pommes de terre, du jambon et des marinades. Histoire de se réchauffer, les convives commencent toutefois le repas avec un petit (d'accord, un gros) verre de caribou.

Dans le temps des sucres, des musiciens animent le festin avec des refrains tout aussi folkloriques: «I love you, vous n'm'entendez guère, I love you, vous n'm'entendez pas...»

«Je voulais offrir une expérience qui me ressemble», explique M. Faucher qui ne passe pas inaperçu avec sa barbe en bataille, son foulard traditionnel de laine tressée et ses remarques badines.

Il arpente le domaine flanqué de Loulou, une chienne-louve de 3 ans. Patiemment, il a apprivoisé l'animal «qui est 80% louve», précise-t-il. Les yeux perçants, elle fait maintenant des bassesses pour quelques morceaux d'oreilles de crisse.

Et si elle semble disposée, il faut demander à M. Faucher de crier pour appeler Black Jack, un chien des environs. Interpellée par le nom de son copain, Loulou trépigne et hurle de toutes ses forces, le museau pointé vers le ciel.

Tout autour, le silence tombe.

Nous étions sceptiques, mais nous voilà convaincus. Il s'agit bien d'une louve.

Dormir à la cabane

Loup pas loup, nous avons loué pour une nuit l'une des trois maisonnettes de bois aux abords de la cabane à sucre. La cabane Le Bûcheron, où nous nous sommes installés, peut loger six personnes. Dans cet espace rustique en bois rond, mais tout de même chauffé, éclairé et doté d'une salle de bains, nous avons étiré notre soirée canadienne.

Pour une parfaite intimité, mieux vaut cependant réserver une des petites maisonnettes isolées (les maisonnettes d'Amour et du Sous-bois). Le mur mitoyen divisant les deux grands chalets n'assure qu'une faible insonorisation.

Sans trop faire de cas de la joyeuse cacophonie chez nos voisins, nous avons joué aux cartes jusqu'à ce que le feu faiblisse dans l'âtre de la cheminée. En guettant la lueur des flammes, les enfants se sont endormis. Repus et épuisés par le grand air, nous les avons suivis. À 100 mètres de là, dans la cabane à sucre, la fête se poursuivait.

Cette nuitée nous a permis de profiter des sentiers de la forêt le lendemain matin, avant que les convives du dîner arrivent. Une bouffée d'air avant de retourner en ville, un pain frais sous le bras.

www.sucreriedelamontagne.com