Humble et discrète, Bruxelles reste un secret bien gardé. On a voulu voir ce qu'elle cachait... dans ses cuisines. La capitale de l'Europe s'apprête à fêter sa gastronomie en 2012 et celle-ci sera à l'honneur à Montréal en lumière, en février. Il n'en fallait pas plus pour qu'on y fasse une grande virée gourmande.
Si la Belgique flamande est plus arrimée à l'actualité culinaire internationale, avec des restaurants comme Hof Van Cleve et In de Wulf, la Belgique francophone peut se targuer d'avoir valorisé son terroir bien avant que ce soit la mode partout sur la planète. Certes, elle se cherche présentement une identité. Mais le thème gastronomique que Bruxelles a l'intention de développer sur trois ans pourrait bien l'aider à se trouver.
Aujourd'hui, la section «restaurants» du site Brusselicious.be ne compte pas moins de 190 pages avec 10 inscriptions chacune. Pour une ville sensiblement plus petite que Montréal (on compte environ 1,1 million d'habitants dans les 19 communes de Bruxelles-capitale), ce n'est pas mal.
Fait intéressant, on retrouve de plus en plus de Français dans les cuisines belges, dont le célèbre David Martin (Brasserie La Paix et Bozar). La capitale accueillerait une cinquantaine de ressortissants français chaque mois. Les jeunes chefs Nicolas Darnauguilhem et Nicolas Scheidt font partie de ceux qui ont pris le Thalys en aller simple et trouvé à Bruxelles une douceur de vivre incomparable.
En se promenant dans la ville bilingue et en discutant avec ses habitants, on se rend compte à quel point la vie du Bruxellois tourne autour du bien manger-bien boire.
Ces activités se pratiquent beaucoup dans le coeur (ou Pentagone), petite ceinture délimitée par cinq grands boulevards qui mènent à la Grand-Place. Mais pour manger mieux et à prix plus raisonnable, on voudra éviter les attrape-touristes de ce secteur fort dense et animé.
Les petites rues de la place Sainte-Catherine offrent une expérience culinaire plus authentique et abordable, avec ses boulangeries-pâtisseries, ses fromageries, ses poissonneries casse-croûte et ses petits cafés chaleureux. Les Marolles et la place du Jeu de balle, où ont lieu les puces quotidiennes, sont également à découvrir en fin de matinée. Le Châtelain, quartier bobo par excellence, offre un marché du mercredi particulièrement couru.
Pour découvrir ce que Bruxelles a de meilleur à savourer, il faut accepter de naviguer entre tradition et innovation. C'est ce que nous vous proposons avec ce carnet d'adresses bien éclectique.
À NE PAS MANQUER
Neptune
Une vraie découverte comme on les aime, ce tout petit bistro de quartier ne compte qu'une vingtaine de places. Le jeune chef Nicolas Darnauguilhem est seul en cuisine. En salle, une serveuse s'assure du bonheur de tous. La cuisine créative du Neptune est dans la veine bistronomique. Côté vins, on fait dans le nature et rien d'autre. Attendez-vous à rencontrer Nicolas Darnauguilhem à l'hiver, puisque le lendemain de notre passage au restaurant, en juin dernier, il a reçu la visite de Germaine Salois, directrice du volet gastronomique de Montréal en lumière!
48, rue Lesbroussar, 0 489 303 350, neptuneresto.com
Les Brigittines
Pour faire l'expérience d'une cuisine belge plus traditionnelle, dans un décor Art nouveau, une visite au resto de Dirk Myny s'impose. Le chef est aux fourneaux des Brigittines depuis 19 ans, mais on dirait qu'il en est à ses débuts tant sa curiosité et sa passion sont intactes. En attendant une généreuse assiette de pieds de porc ou un vol-au-vent aux ris de veau, on boit une Taras Boulba de la brasserie de la Senne, ou encore une Gueuze de Cantillon (bière à fermentation spontanée), qui accompagne bien les filets de hareng saumurés.
5, Place de la Chapelle, 02-512-68-91 ou 02-512-69-57, lesbrigittines.com
Café des Spores et La Buvette
Ici, on prépare les champignons à toutes les sauces, mais pas seulement. Il est possible de prendre un verre ou de manger encore plus décontracté à la Buvette en face ou dans la cave à vins du resto, Il possède également un véhicule de restauration mobile: El Camion. Le chef Nicolas Scheidt, venu tout droit de Paris, semble vivre une belle histoire d'amour avec sa ville d'adoption.
103-108, chaussée d'Alsemberg, 02-534-13-03, cafedesspores.be
De Noordzee/ La mer du Nord
Les week-ends, le Tout-Bruxelles se retrouve devant cette poissonnerie de la place Sainte-Catherine pour déguster debout des produits frais de la mer tout en sirotant un petit verre de blanc ou de rosé. Ce n'est pas de la haute gastronomie, mais c'est beau, bon, pas cher. Qui plus est, le magasinage qu'on peut faire aux alentours, rue Antoine-Dansaert, entre autres, est le meilleur en ville.
45, rue Sainte-Catherine, 02-513-11-92, vishandelnoordzee.be
La Paix
Pas facile de manger dans la brasserie gastronomique de David Martin. Ouvert le midi du lundi au vendredi et le vendredi soir seulement, le restaurant est toujours plein et le livre des réservations déborde. Si vous réussissez à avoir une table, attendez-vous à manger de la viande et encore de la viande! C'est peut-être parce que La Paix est située devant les abattoirs d'Anderlecht et leur marché. Mais soyez rassuré, car David Martin travaille entre autres avec le boucher-vedette Jack O'Shea, grand défenseur d'une viande bien élevée.
49, rue Ropsy Chaudron, 02-523-09-58, lapaix1892.com
BOULANGERIES ET PÂTISSERIES
Dandoy
Installée entre la Grand-Place et la Bourse depuis 1858 (mais fondée en 1829), cette biscuiterie est un incontournable pour les amateurs de ces spécialités belges que sont les spéculoos, le massepain, les pains d'amandes, les pains à la grecque et autres sablés. La boutique de la rue du Beurre est spectaculaire, avec ses riches lambris, son ambiance d'époque, ses biscuits de toutes les formes et de toutes les grandeurs. On fait des provisions!
31, rue au Beurre, 02-511-03-26, biscuiteriedandoy.be
Boulangerie Charli
Tout juste en face de La mer du Nord, Charli est une boulangerie-pâtisserie artisanale et bio qui se présente dans un écrin contemporain. Tout est pétri et cuit sur place. On peut aussi bien y avaler un casse-dalle tout simple le midi qu'y prendre un petit-déjeuner de viennoiseries ou un thé d'après-midi accompagné d'une jolie tatin.
34, rue Sainte-Catherine, 025 136 332
Boulangerie Le Saint-Aulaye et Le Fournil de Saint-Aulaye
On a découvert le pain du Saint-Aulaye au restaurant Neptune. Une miche particulièrement dense et moelleuse. Le chef Nicolas Darnauguilhem s'approvisionne quotidiennement à la deuxième adresse de cette institution installée dans la commune d'Ixelles depuis 1986, soit Le Fournil de Saint-Aulaye. Vous y trouverez également la plupart des classiques de la «grande tradition pâtissière française», mais aussi quelques spécialités belges, comme le cramique et le craquelin (brioches).
Boulangerie: 4, rue Jean-Chapelié, 02-345-77-85
Fournil: 130, rue Américaine,02-538-48-15
LA BIÈRE
Les bars à bière ne manquent évidemment pas à Bruxelles. Avec plus de 650 locales, la Belgique est un paradis pour l'amateur de bières. Voici quelques adresses intéressantes:
Moeder Lambic
Ici, on offre en alternance plus de 400 bières de brasseries indépendantes et artisanales, dont une soixantaine en fût. On les boit seules, ou accompagnées des fameux (bien que peu connus) fromages belges. Le saucisson sec à la gueuze est à essayer également. Il se casse avec les doigts et craque sous la dent.
Moeder Lambic Original 68, rue de Savoie, 02-544-16-99Aussi: Moeder Lambic Fontainas, 8, pl. Fontainas, 02-503-60-68
Poechenellekelder
La «cave de Polichinelle» se trouve en face du Manneke Pis. La statue du petit homme qui «pisse» est sans doute la plus décevante des attractions touristiques d'Europe! Heureusement, la terrasse du Poechenellekelder compense un peu et nous offre une vue imprenable sur les touristes et leur regard incrédule au moment de la découverte. Le bar au décor baroque offre une carte des bières étourdissante. Une blanche de Troublette florale ou une Tripel Karmeliet passablement fruitée accompagnent aussi bien l'une que l'autre l'assiette de fromages servie avec l'incontournable «sirop de Liège».
5, rue du Chêne, 025 119 262
Brasserie Cantillon
Si vous êtes intéressé par le Lambic, base du grand classique bruxellois qu'est la Gueuze, mais aussi de la Kriek et du Faro, il faut passer à la Brasserie Cantillon Musée bruxellois de la Gueuze. Cette bière «tranquille», sans mousse ni pétillant, est plus ou moins acide, souvent amère et peut rappeler davantage le cidre ou le vin que la bière.
56, rue Gheude, 1070 Bruxelles, 02-521-49-28
LES NOUVEAUX CHOCOLATIERS
Laurent Gerbaud
Sûrement le plus original des jeunes chocolatiers belges, Laurent Gerbaud boude les pralines à la faveur des fruits et des épices. Chocolat aux baies rouges de Perse, abricots de Barrydale, pistaches d'Evoïa, amandes de Sicile, bergamote de la Calabre, l'artisan n'utilise que les ingrédients les plus nobles. Son chocolat noir 70%, un mélange Équateur et Madagascar, ne contient pas de lécithine de soya. À découvrir.
2d, rue Ravenstein, 02-511-16-02
Pierre Ledent
À deux pas de la Grand-Place de Bruxelles, dans un immeuble classé au «Patrimoine de l'UNESCO», le chocolatier Pierre Ledent reçoit dans un espace un peu froid. Mais ses pralines et ses macarons valent le détour, entre autres si vous avez l'intention de rapporter des cadeaux chocolatés. Les emballages sont tout simplement impeccables.
19, rue au Beurre, 04-95-523-938, www.pierreledent.be
Maison des maîtres chocolatiers
Des 300 chocolatiers qui ont soumis leur candidature pour être représentés par la Maison des maîtres chocolatiers, seule une dizaine a été retenue, avec comme critère principal «l'art de faire plaisir». Bref, pas de chocolat aux huîtres! Découvrez le travail de Jean-Philippe Darcis, Ducobu, Marioca et autres.
4, Grand-Place, 02-888-66-20, mmcb.be
À surveiller
À l'occasion de Brusselicious 2012, on pourra sillonner la ville pendant deux heures dans un tram blanc et design, tout en savourant des grands classiques de la gastronomie bruxelloise revisités par un chef étoilé. L'horaire prévu est du mardi au jeudi à 20h, les vendredi et samedi à 19h et 21h30, puis le dimanche à midi. Le centre de réservations devait ouvrir à la mi-octobre. Si c'est aussi bien fait que le cube Électrolux, restaurant éphémère au sommet de l'Arcade du Cinquantenaire où nous avons mangé en juin, ça promet!
Une partie des frais de voyage de ce reportage a été payée par Wallonie-Bruxelles Tourisme.