La déconfiture du transporteur à rabais Zoom Airlines, qui a cloué ses appareils au sol le 29 août, est accueillie avec soulagement par les agents de voyages qui ne croient pas que son entreprise soeur, le grossiste Go Travel Direct parviendra à tirer son épingle du jeu.

Propriétés de l'homme d'affaires d'origine britannique Hugh Boyle, Zoom et Go Travel Direct axaient leur mise en marché sur la vente directe. Leurs publicités ont longtemps joué sur le fait qu'en évitant ces intermédiaires qu'étaient les agents de voyages et en réservant directement par l'internet, les consommateurs pouvaient économiser jusqu'à 30% sur le prix d'un forfait.

Dans la région d'Ottawa, où se trouve le siège social des deux compagnies, les agents de voyages se montrent particulièrement soulagés. «Ils dénigraient les agences de voyages, en suggérant que les clients qui avaient recours à nos services payaient trop cher, dit Guy Saint-Cyr, conseiller chez Club Voyages Guertin, à Gatineau. Depuis un an, ils avaient mis la pédale douce de ce côté-là, mais il est certain que cette campagne a contribué à ternir notre réputation.»

Pendant les deux jours qui ont suivi l'annonce que Zoom Airlines cessait ses activités, Club Voyages Guertin a vendu 22 billets d'avion pour dépanner des clients du transporteur. «Certains étaient des Européens qui cherchaient un moyen de rentrer chez eux rapidement, mais d'autres étaient de nos clients de longue date, qui avaient acheté leurs billets sur le site web de Zoom, parce qu'ils étaient moins chers que ce que nous leur proposions, dit Joanne Mondor, directrice de l'agence. Cette déconfiture va certainement contribuer à restaurer la confiance des consommateurs à l'égard des agences traditionnelles.»

Même son de cloche chez Voyages Rideau, à Ottawa, où la directrice, Carole Doré constate: «Depuis sept ans, nous avons perdu d'excellents clients, mais ils commencent à nous revenir. La déconfiture de Zoom a insécurisé une partie du public qui va se tourner vers les sources d'approvisionnement traditionnelles et fiables que sont les agences.» Carole Doré estime que Go Travel Direct aura de la difficulté à surmonter la crise, même s'ils trouvent un autre transporteur pour acheminer leurs clients. «Qui voudrait encore acheter auprès d'une compagnie dont l'entreprise jumelle a déclaré forfait?» demande-t-elle.

Chez Go Travel Direct, cependant, les opérations continuent. «Nous sommes une compagnie indépendante de Zoom Airlines et, en ce qui nous concerne, c'est «business as usual», déclare le directeur du marketing, Dan Brennan. Bien sûr, comme nous exploitions nos programmes avec Zoom, nous devons trouver une autre compagnie aérienne pour faire voyager nos clients. Nous sommes en train de négocier avec un autre transporteur.»

Six destinations

Go Travel Direct programme six destinations pour la prochaine saison d'hiver qui débutera le 1er novembre: Punta Cana, la Romana, Puerto Plata, Cancun/Riviera Maya, Puerto Vallarta et Varadero. «Nous comptons commercialiser entre 40 000 et 45 000 forfaits au départ d'Ottawa et de Montréal, l'hiver prochain», indique Dan Brennan. Actuellement, Go Travel Direct emploie 25 personnes qui sont pour la plupart basées à Ottawa. Zoom Airlines employait près de 700 personnes, dont 450 au Canada. La majorité des sièges étaient vendus en direct via le site web du transporteur.

Depuis plusieurs mois, les vols vers Paris, Rome et Londres étaient également revendus par le consolidateur (un grossiste en billet d'avion) Intair qui approvisionnait les agents de voyages. C'est pour dépanner les clients de ces agences que l'Office de la protection du consommateur a nommé un «gestionnaire des réclamations». Il s'agit d'André Champagne, de la Firme Raymond Chabot Inc., à Québec. On peut le rejoindre au 418-647-3078 ou au 1-866-322-8585.

Selon Jean-Jacques Préaux, porte-parole de l'OPC, la cessation des opérations de Zoom n'affecterait «que quelques centaines de clients des agences de voyages». Les consommateurs qui ont acheté des billets sur le site web du transporteur peuvent demander remboursement à l'institution financière qui a émis la carte de crédit avec laquelle ils ont payé leurs billets. Ceux qui ont acheté en direct sans payer par carte de crédit n'auront aucun recours.

Concurrence

Malgré des prix très intéressants, Go Travel Direct n'a jamais réussi à s'imposer sur le marché, notamment parce que l'entreprise ne commercialisait pas les propriétés populaires auprès des consommateurs canadiens. C'est que les principaux hôteliers espagnols qui exploitent les meilleurs établissements dans les Antilles et au Mexique ne voulaient pas leur céder de chambres pour ménager leurs relations d'affaires avec les grossistes traditionnels comme Vacances Transat, Sunwing, Sunquest ou Tours Mont-Royal. Cette situation a d'ailleurs incité les dirigeants de Go Travel Direct à déposer une plainte au Bureau de la concurrence, qui enquête actuellement sur ce cas.

Incapable de percer réellement le marché des destinations-soleil, Hugh Boyle, propriétaire de Zoom et de Go Travel Direct a axé sa stratégie de développement sur la compagnie aérienne. Il a notamment augmenté son offre sur les routes transatlantiques au départ de Montréal, Ottawa et Vancouver. Et, l'an dernier, il a lancé un service régulier sur le couloir aérien le plus fréquenté du monde: Londres/New York (60 000 passagers par semaine). Quelques semaines plus tard, il inaugurait des vols entre Londres et les Bermudes. Il avait également été question d'inaugurer un service entre le Royaume-Uni et d'autres villes américaines, notamment San Diego et San Francisco. La hausse du prix du carburant aura eu raison de ces ambitions.