Après Atkins et Montignac, voici Dukan, nouveau gourou des Français. Véritable phénomène dans l'Hexagone, ultramédiatisé et surtout archiprésent sur la Toile, l'auteur d'un régime qui se veut révolutionnaire arrive ces jours-ci à Montréal pour mousser son plus récent livre: La méthode Dukan. Cinq millions d'exemplaires vendus plus tard, alors qu'il est adulé par ses fans, mais de plus en plus critiqué par les nutritionnistes, la question se pose: faut-il croire au mythe Dukan?

Il a écrit 24 livres. A été traduit dans 14 langues. Sur la Toile, son site compte pas moins de 25 000 questions d'internautes et quelque 77 millions de pages échangées. Ses fans, les Dukettes et autres Dukanons, se comptent par milliers sur Facebook. La raison? Sa «méthode» de perte de poids, hyperprotéinée, qui en a visiblement séduit plusieurs.

En gros, le médecin généraliste et nutritionniste français propose un régime en quatre temps. En premier lieu, on ne mange que des aliments riches en protéines maigres (viandes, abats, fruits de mer, oeufs, tofu et laitage), on boit beaucoup, et surtout, on consomme trois cuillères à soupe par jour de son d'avoine, pour faciliter le transit (à noter, sa notoriété est telle que la chaîne Monoprix a même commercialisé une galette de son d'avoine «Dukan»). Pendant cette phase dite d'«attaque», «on peut perdre de 2 à 4 kg», assure l'auteur, joint la semaine dernière au téléphone à Paris.

Deuxième phase: la période de «croisière», alternant une journée de protéines et une journée de protéines associées à des légumes (lesquels doivent tous être inscrits dans la liste de ses «100 aliments Dukan à volonté»). Cette phase dure environ deux mois, selon le nombre de kilos à perdre.

Viennent ensuite les deux dernières phases: la phase de consolidation (où l'on réintègre très progressivement tous les aliments, en maintenant toujours une journée par semaine de protéines exclusivement), puis la stabilisation définitive (où l'on mange de nouveau normalement, en incluant, à vie, une journée de protéines par semaine).

Épinglé par la santé publique

Pierre Dukan ne le cache pas: il n'espère rien de moins que de «porter le premier coup d'arrêt à la progression ininterrompue et mortifère du surpoids». Malheureusement, celui qui «rêve» ainsi d'être une sorte de sauveur a été épinglé par l'Agence nationale de santé sanitaire (ANSES) française cet automne. L'ANSES a dénoncé les risques de carences à long terme de ce type de régimes amaigrissants, notamment pour la santé des os, du coeur et des reins.

Ici aussi, les observateurs sont très sceptiques. «Ce type de régime n'est pas sans danger, observe Paul Boisvert, de la Chaire de recherche sur l'obésité de l'Université Laval. Ce n'est pas équilibré. Oui, c'est efficace, il n'y a pas de doute là-dessus, mais sur six mois. J'ai beaucoup de doutes à long terme, dit-il. Je doute que cela puisse changer les habitudes alimentaires des gens.»

«C'est le genre de régime faible en glucides (Atkins, Montignac, South Beach Diet) dont on entend parler très souvent, renchérit Marie-Josée LeBlanc, nutritionniste chez Extenso, à l'Université de Montréal. Les aliments permis sont très riches en protéines et il n'y a pas de glucides. Cela fonctionne le premier mois, mais est-ce qu'on peut tenir longtemps? Les études démontrent qu'à long terme, on risque de reprendre le poids perdu, voire en gagner davantage.»