Une expérience menée par un professeur de lycée publiée le mois dernier sur le forum français La Vie Moderne a fait couler beaucoup d'encre. Illustrant la façon dont les étudiants copient paresseusement leurs travaux de l'internet, il conclut que l'éducation et la technologie ne font pas bon ménage. Vraiment?

À mi-mars, le forum français La Vie Moderne a publié sur son site les fruits d'une expérience menée par un professeur de lycée aux dépens de sa classe: il a créé une fausse page sur Wikipédia à propos d'un poème obscur à étudier en classe, et a utilisé forums et moteurs de recherche afin de la rendre facilement accessible, une méthode classique en référencement web.

Résultat: 51 des 65 travaux qui lui ont été remis «ont recopié à des degrés divers ce qu'ils trouvaient sur internet, sans réfléchir aux éléments trouvés, croyaient-ils, au hasard du net.» Pourtant, note le professeur, l'exercice demandé n'exigeait aucune recherche, seulement de la réflexion, puisqu'il s'agissait de rédiger un commentaire personnel sur l'oeuvre en question.

Le phénomène n'est pas que français: il cohabite tout naturellement avec l'internet mondial. Plus près de nous, les statistiques disponibles à ce sujet révèlent que 54% des étudiants nord-américains le font régulièrement, 74% au moins une fois au cours de leurs études au collège ou à l'université.

Qu'internet facilite le plagiat et qu'on doive en bloquer tout simplement l'accès semble la règle généralement acceptée. Ça empire pourtant la situation, constate Mario Asselin, directeur général chez Opossum, une firme de consultation de Québec spécialisée dans les technologies et l'apprentissage.

«Les jeunes sont sur le réseau. Ça me prend rarement plus de dix minutes avant de trouver un élève qui sait comment contourner le pare-feu de son école pour aller sur Facebook. Le problème, c'est qu'ils apprennent à utiliser internet dans leur chambre, pas à l'école. Ils le consomment bêtement, alors qu'ils devraient s'en servir comme outil de production.»

M. Asselin fait régulièrement des présentations dans les écoles de la province et donne un cours sur la communication organisationnelle à l'Université de Montréal. Plutôt que d'utiliser le réseau comme source d'information, il en fait un outil de production et de diffusion. Ses élèves publient leurs travaux sur le blogue du cours. Ils sont à la vue de tous, incluant les auteurs cités dans ces travaux.

Le prof de lycée conclut de son expérience qu'il est préférable d'apprendre à former sa pensée à l'abri des nouvelles technologies. Le prof québécois n'est évidemment pas de cet avis, suggérant plutôt qu'en étant actifs sur la Toile, les étudiants peuvent au contraire apprendre plus que la matière enseignée, mais aussi le bon comportement à adopter par rapport à ce qui est accessible, gratuitement, sur internet. «En publiant et en liant leurs travaux d'autres sites web, on définit son identité numérique et c'est comme ça qu'ils peuvent apprendre les règles du jeu», conclut M. Asselin.