La génération actuelle des meilleurs joueurs de tennis est sûrement l'une des meilleures de tous les temps. Avec le recordman des titres majeurs, le maître absolu de la terre battue, deux jeunes loups prêts à prendre la relève, on a quatre joueurs de très haut niveau.

Déjà demi-finalistes à Roland-Garros, Roger Federer, Rafael Nadal, Novak Djokovic et Andy Murray tenteront de refaire leur carré d'as, aujourd'hui, en quarts de finale des Championnats de Wimbledon.

Nadal a rassuré tout le monde, hier, en confirmant que les tests au pied gauche n'avaient révélé aucune blessure grave et qu'il serait en mesure d'affronter l'Américain Mardy Fish. L'Espagnol partira largement favori contre un adversaire qu'il a toujours vaincu, tout comme Djokovic, Federer et Murray contre leurs rivaux respectifs.

Depuis le début du tournoi, la force du quatuor est d'autant plus évidente qu'elle s'oppose à une autre déconfiture des favorites du côté féminin. Mais ces quatre joueurs forment-ils vraiment le meilleur groupe de tous les temps?

L'Américain Jimmy Connors a déclaré, quelques jours avant le tournoi, que la rivalité n'était certes pas aussi forte aujourd'hui entre les meilleurs qu'elle l'était à son époque entre John McEnroe et lui, par exemple.

«Les rivalités actuelles sont "molles", les joueurs sont très polis entre eux, a déclaré Connors en téléconférence. Nos rivalités étaient beaucoup plus sérieuses et il n'y avait rien de tranquille entre nous. Je ne me suis jamais gêné pour dire ce que je pensais de lui (McEnroe), et lui non plus d'ailleurs...»

Présent à Wimbledon, où il fait l'analyse des matchs pour la BBC et la télé américaine, McEnroe a estimé hier, lors d'un déjeuner auquel assistait La Presse, que les joueurs de la génération actuelle se comportent souvent de façon trop «professionnelle». «C'est évidemment une question de tempérament et on ne peut attendre de Roger (Federer) qu'il soit comme moi sur un court», a dit le vainqueur de neuf titres majeurs, dont trois à Wimbledon.

«Les meilleurs joueurs sont peut-être trop respectueux les uns envers les autres. Le tennis est un peu un sport de combat. La rivalité est bien réelle sur le court et les joueurs sont prêts à tout pour l'emporter. On l'a encore vu lundi, quand Rafa (Nadal) a joué et gagné en dépit de la douleur.

«Mais il manque peut-être à la génération actuelle cette agressivité qui caractérisait mes matchs contre Jimmy, ou ceux de Pete Sampras contre Agassi. Et c'est sans parler des générations précédentes. On m'a dit que Rod Laver ou Roy Emerson avaient tout un caractère eux aussi...»

Difficile de comparer

Le vétéran chroniqueur américain Bud Collins, qui couvre cette année ses 44es Championnats, reconnaît que la rivalité était sans doute plus féroce il y a 30 ans. «Les bourses étaient moins importantes à l'époque et les joueurs se battaient littéralement pour arriver», a-t-il rappelé.

«Aujourd'hui, les joueurs voyagent en jet privé et sont entourés d'une grosse équipe. Le tennis n'est plus le même. Je me souviens avoir voyagé avec Ken Rosewall: il n'avait qu'un petit sac pour ses vêtements et deux raquettes...»

Pour ce qui est des comparaisons, Collins rappelle encore que le tennis a changé. «Rod Laver, qui a remporté deux fois le Grand Chelem, ne frappait certainement pas aussi fort que Nadal, mais il jouait avec des raquettes de bois! On ne peut comparer les époques, c'est injuste.»

Les joueurs d'aujourd'hui se sont évidemment défendus d'être trop «mous». Nadal a déclaré vendredi dernier qu'il n'y avait jamais eu, selon lui, quatre joueurs du niveau du top 4 actuel et que leurs relations hors des courts n'avaient rien à voir avec leur rivalité sportive.

«Les jeunes qui suivent nos matchs nous voient nous battre férocement sur le court, mais ils nous voient aussi nous parler après les matchs. Et tant mieux s'ils font la même chose. C'est le contraire qui n'est pas une bonne façon de faire fonctionner le monde...

«Ce qui se passe hors des terrains n'a pas d'impact sur ce qui se passe sur les terrains. Nous pouvons nous parler 10 minutes avant un match, mais nous seront aussi concentrés sur la victoire quand le match va commencer...»

Roger Federer a pour sa part refusé d'entrer dans le jeu des comparaisons. «Toutes les époques ont eu leurs champions et je ne crois pas qu'on puisse dire avec certitude laquelle a été la meilleure.

«Quant à la rivalité, elle est aussi forte aujourd'hui entre nous qu'à l'époque de Pete (Sampras) ou de McEnroe. Nous nous respectons, bien sûr, mais nous voulons toujours gagner, encore plus dans les grands tournois comme Wimbledon.»