La confiance d'une joueuse de tennis est un trésor fragile, et même les meilleures l'égarent parfois sans trop savoir pourquoi. On croise depuis quelques jours à Roland-Garros certaines des plus grandes joueuses de la génération actuelle - Dinara Safina, Ana Ivanovic, Justine Henin - qui ont toutes connu d'importants passages à vide au cours de leur carrière.

Aleksandra Wozniak, la meilleure Canadienne, est présentement dans un de ces creux de vague qui ponctuent la carrière des athlètes. Ayant glissé au 46e rang du classement WTA, elle pourrait sortir du top 50 au cours des prochaines semaines.

Il y a un an, à la veille de Roland-Garros, la Québécoise était pourtant dans un tout autre état d'esprit. Elle nous avait parlé d'une terrasse des Champs-Élysées, sûre d'elle-même et de ses moyens, et avait confirmé ses ambitions en atteignant le quatrième tour du tournoi. Deux semaines plus tard, elle faisait la finale sur le gazon à Eastbourne et s'approchait du top 20...

Ces performances cachaient toutefois un petit drame. Son entraîneur Cristian Kordasz avait en effet dû se retirer quelques semaines plus tôt pour des raisons de santé. «Un problème au coeur, qui l'obligeait à cesser ses activités, s'est souvenu Wozniak, hier matin, à Roland-Garros. J'ai continué de bien jouer, mais c'était difficile. Tennis Canada a demandé à Rob Stekeley de m'accompagner. Au début, il n'était qu'un partenaire d'entraînement, puis il est devenu mon entraîneur. Ce n'était pas un bon choix...»

Peu à l'aise avec les changements que lui conseillait Stekeley, Wozniak a graduellement perdu sa belle confiance de l'été. Une fin de saison en demi-teinte, puis un début de saison 2010 bien en deçà de ses attentes l'ont amenée à prendre les décisions qui s'imposaient.

«J'avais besoin de changer mon environnement et je préférais ne plus travailler avec Rob, a expliqué Wozniak. Je ne voulais pas davantage recommencer à zéro avec un nouvel entraîneur. C'est à ce moment que Cristian m'a écrit pour prendre des nouvelles. Il allait mieux et il a accepté de m'aider.»

Des objectifs à long terme

Hier matin, à la terrasse du salon des joueurs du stade Suzanne Lenglen, Kordasz discutait avec Sylvain Bruneau, entraîneur-chef de Tennis Canada, quelques tables derrière nous. Sa présence rassurait visiblement Wozniak.

«La confiance revient lentement, a-t-elle estimé. Je dois toutefois me concentrer sur la base, sur chaque balle, chaque coup, aussi bien à l'entraînement que pendant les matchs. Je n'ai pas d'objectif précis ici, et pas davantage pour les prochains tournois. Je dois faire abstraction du classement et ne penser qu'à mon jeu. Je dois travailler sans relâche et attendre ce petit déclic qui me relancera.»

Kordasz et Bruneau avouent être impressionnés par la charge de travail de Wozniak et sont convaincus qu'elle retrouvera vite le chemin du succès. «J'ai gardé cette discipline du travail que m'a inculquée mon père, a concédé la Blainvilloise. Je n'ai pas de problème de motivation - même si j'aurais parfois envie de prendre une pause de quelques mois du tennis pour me ressourcer, ce qui n'est pas possible, évidemment.

«La pression est très forte et je sais que les gens attendent beaucoup de moi. C'est correct, mais c'est aussi parfois difficile à assumer. Les meilleurs partisans peuvent vite devenir les plus grands dénigreurs...»

Sans ambition à Roland-Garros, Wozniak n'en garde pas moins ses objectifs à long terme. «Je veux avoir une longue carrière et je sais que je connaîtrai encore des hauts et des bas au cours des prochaines années, a-t-elle noté. Mon classement va évoluer, mais cela n'a pas vraiment une si grande importance pour moi.

«Toutes les filles passent par là. Ivanovic a gagné ici en 2008, puis elle a connu une période difficile, passant d'un entraîneur à l'autre, pour se retrouver 41e aujourd'hui. Le classement n'est pas toujours significatif.

«Moi, mes rêves sont les mêmes: gagner des tournois et même gagner un tournoi du Grand Chelem un jour. C'est ce que toutes les filles du circuit veulent réussir, non?»