Mikaël Zewski boxera en demi-finale du gala de samedi, au stade IGA. Comme d’habitude, sa femme Sabrina Bernier sera sur place pour l’encourager. Enceinte d’un enfant qui défie toutes les statistiques.

Au cinéma, ce scénario aurait été jugé invraisemblable.

Le boxeur Mikaël Zewski et sa femme Sabrina Bernier attendent la venue d’un deuxième garçon en janvier prochain. Après « 11 ans d’infertilité, mangeuse de chair dans l’utérus, 7 opérations, 1 an et demi de ménopause… », a récemment écrit Sabrina sur son compte Twitter.

Ça fait beaucoup à absorber en 88 caractères. On leur demande donc de raconter le fil des évènements depuis le début, chronologiquement.

« Je suis content qu’elle soit là parce que pour moi, tout expliquer ça, ça aurait été un gros challenge ! », lance Zewski.

Sabrina Bernier, ex-boxeuse, et lui forment un couple depuis 2007. À peine majeurs, ils souhaitent fonder une famille rapidement.

Devant l’absence de résultats, ils se tournent vers la procréation médicalement assistée. Verdicts : « Je n’ovule pas et j’ai eu beaucoup de fibromes dans l’utérus », explique-t-elle.

Après quelques interventions chirurgicales à Trois-Rivières et Sainte-Justine et beaucoup de traitements et d’investigations, Olan, leur « bébé-éprouvette », voit le jour.

En tout, le processus aura duré quatre ans. Olan a aujourd’hui 6 ans.

« Ça a été tout un cheminement pour l’avoir », fait remarquer la mère, directrice générale d’une maison d’hébergement pour victimes de violence conjugale à Trois-Rivières. « Rapidement après, on voulait avoir un autre enfant. On en a toujours voulu deux. »

La « mangeuse de chair »

Le couple reprend donc le chemin de la procréation assistée et, une fois de plus, la route est longue. Les tentatives vaines se multiplient.

Puis, quelques jours après la dernière d’une dizaine d’inséminations infructueuses, Sabrina contracte la « bactérie mangeuse de chair » (fasciite nécrosante) dans l’utérus. En février 2019. Elle se souvient du mois avec certitude parce que son mari y a franchi le cap de la trentaine.

Elle est transportée à l’hôpital en ambulance et craint pour sa vie.

Suivront quelques interventions chirurgicales, dont la dernière, cruciale, à la mi-mars 2020, exactement au moment où l’urgence sanitaire est déclarée dans toute la province.

La COVID est devenue réelle cette journée-là, pendant qu’elle était à l’hôpital. On voyait les infirmières qui en parlaient et les gens qui avaient peur.

Mikaël Zewski

Un contexte de rêve pour reprendre ses esprits en ne sachant pas si on a été amputée d’une partie de son appareil reproducteur…

« C’était particulier parce que j’étais partie le matin me faire opérer – c’était une longue opération de cinq, six heures – et quand je me suis réveillée, Mikaël m’a dit : ‟Là, tout est fermé, Olan ne peut pas aller à la garderie demain.” Je pensais me réveiller dans un cauchemar. Les infirmières pleuraient. Il y avait beaucoup de panique dans le personnel », raconte Sabrina.

« Et, à ce moment-là, je ne savais pas s’ils avaient été en mesure de garder mon utérus. Ça dépendait des blessures que la mangeuse de chair avait créées. Ça a été super stressant comme situation. »

Dès qu’elle a reçu son congé de l’hôpital après avoir été soignée pour l’infection, Sabrina a dû s’astreindre à une ménopause artificielle induite par des injections. Pour s’assurer qu’elle ne tombe pas enceinte avec un utérus aussi fragilisé.

Mais un peu plus d’un an plus tard, Sabrina avise sa gynécologue qu’elle cesse le traitement.

« Je n’en pouvais plus. Être en ménopause à 31 ans… Honnêtement, mon humeur était vraiment changeante, j’étais rendue super anxieuse alors que je ne l’étais pas avant, indique-t-elle. Ça jouait trop au niveau de mes hormones, je n’étais juste plus capable. »

Sa gynécologue leur demande alors d’être prudents, bien qu’elle sache évidemment qu’ils n’avaient pas réussi à avoir d’enfants de façon naturelle.

Mais pour le couple, le risque n’existe pas. Après 14 ans, pourquoi cela arriverait-il maintenant ?

Le « bébé miracle »

En février cette année, la grand-mère de Sabrina Bernier est morte de la COVID-19. Aux funérailles, en juin, son père lui met « la puce à l’oreille », dira-t-elle, en lui faisant remarquer qu’elle semble avoir pris du ventre.

« Je lui ai répondu : ‟Voyons, c’est donc méchant, ça” », raconte-t-elle en riant.

Sauf que le lendemain matin, Sabrina réalise qu’elle ne se rappelle pas tout à fait le jour de ses dernières règles. Elle décide donc de faire un test de grossesse. Probablement son 200e à vie. Minimum.

« Aussitôt qu’elle avait un retard, on avait tellement espoir que ça arrive à un moment donné qu’elle en faisait sans arrêt », rapporte Mikaël.

Mais cette époque est révolue. En fait, elle procède au test en se disant qu’il déclenchera ses règles peu après, comme chaque fois qu’elle avait osé espérer dans le passé.

« Il m’en restait… qui étaient passés date ! », signale-t-elle.

Cette fois, cependant, les deux barres apparaissent.

« Je me dis : ‟Mon Dieu, c’est impossible !” Et je commence à paniquer. »

Autre test, autre résultat positif. Mais là encore, avec un test dont la date était échue.

Elle tire son mari du lit et ils partent vers Trois-Rivières, en quête d’une pharmacie ouverte pour se procurer un test « valide ». À Bécancour, le dimanche, les pharmacies ouvrent tard, et pas question d’attendre une heure ou deux.

Troisième essai, même résultat. Elle texte sa gynécologue sur-le-champ.

Pour ma gynécologue, c’est un bébé miracle. On l’appelle comme ça, on en rit ensemble parce que ça défie toutes les statistiques.

Sabrina Bernier, enceinte depuis le mois de mai

Évidemment, s’en est suivi le stress quant à l’état de son utérus et la viabilité du fœtus. Un stress qu’elle vit toujours, un peu exacerbé ces jours-ci par le combat de son mari qui approche. Mais les contrôles sont fréquents et le bébé va « super bien ».

À la première échographie, il y avait sept membres du personnel de la santé dans la pièce, tous nerveux. Puis heureux.

« On est très connus à l’hôpital à Trois-Rivières ! laisse tomber Mikaël Zewski, originaire de l’endroit. Une fois que ça a été confirmé qu’il y avait bel et bien un embryon, dans la salle d’échographie, il devait y avoir 15 personnes ! »

L’accouchement a été fixé à 35 ou 36 semaines, par césarienne, pour éviter que l’utérus, trop faible, ne travaille. Ce serait risqué pour la mère et pour l’enfant.

Le bonheur d’un futur grand frère

Sabrina et Mikaël espéraient avoir un jour l’autorisation de tenter de nouveau leur chance en procréation assistée, mais ils n’avaient pas encore la certitude de l’obtenir. Ça n’a plus d’importance. Même si, en ce moment, ils peinent à croire ce qui leur arrive.

« Encore aujourd’hui, même si j’ai une belle bedaine, j’ai vraiment de la misère à le réaliser. On commençait à faire le deuil d’avoir un autre enfant, admet Sabrina. C’est un miracle de la vie. »

« Après une si longue bataille avec la fécondité, réussir à en avoir un naturellement, je n’aurais jamais pensé », renchérit le boxeur à la fiche de 34-2, 23 K.-O.

Olan aura donc son petit frère. Enfin.

Regardez une vidéo de Mikaël et Olan Zewski à l’entraînement !

« À la garderie, ses amis avaient des petits ou des grands frères. Donc, depuis qu’il est en âge de parler, il a hâte de devenir un grand frère », relate Zewski.

Même que, parfois, il pleurait en demandant à ses parents pourquoi il n’en avait pas. « Il était vraiment content quand il a appris la nouvelle. »

Le 20 août, le couple a souligné ses 10 ans de mariage très simplement, au vu des circonstances.

Mais, samedi soir, la retenue de l’ex-boxeuse, naguère championne nationale chez les amateurs, ne sera plus à l’ordre du jour. Comme chaque fois qu’elle s’assoit dans l’assistance pour un combat de son mari, elle sera bruyante ! Quand elle est près du ring, il l’entend.

« Les voix des gens que je connais, comme mon père [Jean], qui est mon entraîneur, ma femme, même quand il y a beaucoup de bruit, mes oreilles les trouvent. »

Bien qu’elle donne occasionnellement des consignes, il affirme toujours donner priorité à celles de son père. « Mais c’est de l’énergie qu’elle me donne quand je l’entends crier », affirme Zewski.

De l’énergie et « un bon feeling », dans le ton de sa voix, quant à l’allure du combat.

« Dans un simple ‟go Mik !” ou ‟go chéri !”, je suis capable de savoir beaucoup de choses. »