C'était il y a un peu moins de 10 ans. Sur le bord de l'autoroute 20, un boxeur tendait le pouce. Il voulait rentrer au Lac-Saint-Jean, mais il n'avait plus un sou en poche.

Stéphane Ouellet venait de perdre contre Joachim Alcine dans un combat difficile à regarder pour ses nombreux fans. Il aura fallu moins de 70 secondes à Alcine pour envoyer Ouellet à la retraite... ou presque.

Dix ans ont passé, pendant lesquelles le «poète» a soigné ses plaies dans ses terres. Et aujourd'hui, dans une voiture avec son entraîneur, Ouellet fera la route inverse. À 43 ans, il rentre à Montréal pour ajouter un autre combat à sa fiche que plusieurs pensaient finale.

«Il y a 10 ans, je suis parti la queue entre les deux jambes. Là, je rentre à Montréal la tête haute. Je suis dans un autre état d'esprit. Ma vie n'est plus la même», a dit Ouellet au téléphone cette semaine, avant de couper court à la conversation.

«Je ne veux pas parler maintenant, je vais peut-être parler à Montréal. Mais je ne veux pas faire mille déclarations. Je veux simplement boxer.»

Samedi soir, au Centre Bell, lieu de sa défaite contre Alcine, Ouellet va affronter le Belge Cédric Spera (10 victoires et 2 défaites). Le boxeur de 25 ans se remet d'un revers par K.-O. Il n'a jamais affronté de grand adversaire et n'est pas réputé pour sa force de frappe.

«Je ne fume même plus»



Pendant ces 10 années, Ouellet dit avoir rompu avec son passé. Fini, la drogue et les excès. «Je ne fume même plus. Je prends un verre de vin de temps en temps, nous a-t-il expliqué dans un entretien récent. Ma deuxième vie a commencé le jour où je me suis relevé du plancher après le combat contre Alcine. J'étais à l'heure des choix. J'avais 33 ans. Je me suis dit que j'avais débâti la première partie de ma vie. J'étais allé trop loin. J'ai vu ça comme une deuxième chance.»

Il s'est trouvé un nouvel emploi. Après le camionnage, il travaille maintenant comme couvreur. Il s'est acheté sa première maison, dans un village à la porte d'Alma. Une maison de bois construite en 1905. Devant, il y a un champ. Au village, il y a une église et une caisse populaire.

Il l'habite avec sa blonde et leur chien. Ouellet s'est rangé. Son nouveau vice? La course.

«La course m'a sauvé. Un médecin m'avait prescrit des antidépresseurs après ma défaite contre Alcine, a raconté Ouellet. J'ai refusé. À la place, j'ai commencé à courir et je n'ai plus jamais arrêté.»

Lors de cet entretien l'hiver dernier, Stéphane Ouellet affirmait qu'il pourrait vivre avec l'idée de ne plus remonter sur le ring. «J'ai fait la paix avec la façon dont s'est terminée ma carrière. Je me rends compte que c'est un poids que je dois porter. Ça me rappelle ce que j'ai gaspillé.»

Il a depuis changé d'idée. Que cherche Ouellet avec ce retour? Certainement pas la gloire ou une place dans les manchettes. Son heure est passée.

Ouellet est le seul avec une réponse à cette question. Mais il ne veut pas y répondre, il ne veut pas parler, pas maintenant. Peut-être qu'il veut simplement refaire une dernière fois le chemin entre Montréal et le Lac, mais le refaire différemment, cette fois-ci. Pas sur le pouce, pas dans la disgrâce. Mais la tête haute, tout simplement.