Le match n’avait pas encore commencé que déjà, le café Conca d’Oro de la rue Dante, dans la Petite Italie, affichait complet. Cent vingt minutes et une séance de tirs au but plus tard, la foule de partisans en liesse débordait dans la rue, célébrant la victoire de l’Argentine à la Coupe du monde.
« Ce n’était pas un match pour les cardiaques », a résumé Mario, le cuistot du bistro, visiblement émotif. « Mais je l’avais dit, notre gardien [Emiliano] Martínez, il aime les pénalités, il va bloquer deux balles », s’est-il exclamé.
Le duel opposant l’Argentine et la France a, en effet, réservé son lot de surprises aux partisans montréalais massés autour d’un téléviseur accroché à l’extérieur, malgré la température de - 1 oC et les impressionnants bancs de neige laissés par la tempête de la veille.
Les tambours se sont fait entendre à l’intérieur et, à la 24e minute, sur un tir de pénalité, le but de Lionel Messi a déchaîné la foule. « Vamos Argentina », ont entonné les partisans, serrés comme des sardines, dehors comme dedans.
« C’est la récompense, c’est la justice du football », s’est alors exclamé un partisan tunisien venu encourager les Argentins après s’être lui-même rendu au Qatar pour soutenir son équipe nationale.
Puis ce fut 2-0. Mexicains, Uruguayens, Chiliens, toutes les nations sud-américaines semblaient rassemblées dans la Petite Italie pour encourager l’Albiceleste. « On se sent comme à la maison », se réjouit une Argentine d’origine, Rocio Diaz, venue regarder tous les matchs de son équipe nationale au café de la rue Dante depuis le début de la Coupe du monde.
Puis les Français ont égalisé le score en moins d’une minute. La foule stationnée à l’extérieur du café Conca d’Oro était stupéfaite. « C’est le stress », a témoigné un partisan.
Après une prolongation rocambolesque, c’est finalement au terme d’une séance de tirs au but, remportée par l’Argentine, qu’a été scellée l’issue du match.
« Nous avions besoin de souffrir pour l’emporter », a résumé un partisan, Manuel, au moment où les partisans envahissaient la rue, forçant la fermeture de la rue Dante, entre les avenues de Gaspé et Casgrain.
« C’est toujours difficile pour nous, mais à la fin, ça débouche ! Et là, on l’a », exultait à ses côtés Ivan.
Une défaite crève-cœur pour la France
Côté français, les visages étaient longs au bar Monsieur Ricard, sur l’avenue du Parc, au passage de La Presse, à la mi-temps. Même si l’endroit était bondé, l’ambiance y était redescendue d’un cran.
« Il n’est pas trop tard, on peut encore revenir », martelait Rayan Gandjy, un partisan français visiblement peu convaincu.
« On l’espère, mais ce ne sera pas facile. Les Argentins dominent, mais jouent un peu comme des prima donna », a dit Michel Borys tout en faisant part de ses remontrances contre l’arbitrage du match. « Le premier penalty, c’était un peu tiré par les cheveux. »
Même s’il restait encore la moitié du match à jouer, certains faisaient déjà leur bilan. « Au moins, tu as eu sept matchs », a soupiré l’un d’eux au propriétaire de la place, Rocco, qui surveillait la clientèle sortie fumer.
Puis quelques dizaines de minutes plus tard, à la suite d’un autre but de Kylian Mbappé, le deuxième en une minute, l’ambiance est revenue. « C’est incroyable, on pensait que c’était fini. [Maintenant] les Argentins ont peur de perdre », a soufflé Martin Fink, emporté par le « momentum » de son équipe.
Puis l’incompréhension a été totale lorsque Lionel Messi a marqué son second but, cette fois en prolongation. C’était 3-2 à quelques minutes de la fin. Malgré un troisième but marqué par Kylian Mbappé, la France ratera, quelques minutes plus tard, la chance de remporter un deuxième titre de suite à la Coupe du monde.