(Hamilton) « Je suis arrivé ici quand j’avais 13 ans. Le Canada a tout donné à ma famille. Il nous a donné une meilleure vie, une meilleure éducation. C’est ma façon de redonner à ce pays. »

Le gardien Milan Borjan s’est amené en visioconférence vêtu du drapeau canadien, dimanche soir. Le Canada venait de remporter une victoire monumentale de 2-0 face aux États-Unis, au Tim Hortons Field de Hamilton.

Un jeu blanc qui n’aurait probablement pas été possible sans son arrêt spectaculaire à la 43minute et son jeu toujours solide devant le filet. Il fallait voir sa réaction après la parade en question, célébrant comme s’il venait de marquer un but, pour comprendre à quel point il avait à cœur les succès de son équipe.

Né en 1987 en Yougoslavie, Borjan a émigré au Canada avec sa famille lorsque les tensions faisaient rage dans la région. Où ont-ils abouti ?

À Hamilton. Où ses parents résident toujours.

« Le Canada est un pays multiculturel, ajoute Borjan. On se bat pour ce qui nous a été donné. C’est la même chose pour plusieurs de nos joueurs. C’est notre façon de redonner au Canada. On peut se rendre à la Coupe du monde pour la première fois depuis plus de 30 ans. C’est spécial.

« Quand quelqu’un te donne autant d’amour, il faut lui redonner. On fait du mieux que l’on peut pour rendre cet amour à ce pays incroyable. »

La révolution Herdman

Borjan a fait ses débuts avec l’équipe canadienne en 2011. Il a donc vu ce programme se relever des bas-fonds de la CONCACAF… jusqu’à la domination que l’on constate aujourd’hui.

La révolution est totale chez les botteurs de ballon canadiens. Comment cette sélection a-t-elle pu atteindre un si haut niveau en si peu de temps ?

La réponse est simple pour Borjan. « Je n’ai que deux mots à dire : John Herdman. »

Puisqu’il laisse ces deux mots parler d’eux-mêmes, on va élaborer pour lui.

Herdman, un Britannique, est arrivé dans l’œil du public canadien en 2011 lorsqu’il a pris les rênes de l’équipe féminine nationale. Il l’a menée à deux médailles de bronze olympiques, notamment.

PHOTO GEOFF ROBINS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le sélectionneur du Canada, John Herdman

Puis, en 2018, il a fait la transition vers l’équipe masculine. Et il n’a pas mis de temps à y apposer sa marque.

« C’était clair dès la toute première rencontre : cette équipe devait se qualifier pour une Coupe du monde, a raconté Herdman en visioconférence. […] Si on se qualifiait, on savait qu’on allait changer la trajectoire du soccer dans ce pays à jamais. »

Le Canada se trouve en tête de l’Octogonale de la CONCACAF après 10 matchs sur 14, avec 4 points d’avance sur les États-Unis, et les portes du Qatar sont grandes ouvertes pour lui.

C’est plus gros que nous. Beaucoup plus gros que nous. […] Nous avons l’occasion de laisser derrière nous un réel legs pour le soccer dans ce pays.

John Herdman, sélectionneur de l’équipe du Canada

Le sélectionneur du Canada, lui aussi un expatrié, rejoint les propos de son gardien.

« Nous avons une grande population d’immigrants, et la plupart d’entre eux viennent de pays de soccer. Leurs sélections nationales nous battent depuis tellement longtemps. Mais maintenant, plusieurs d’entre eux peuvent se rassembler autour de ce sport et porter le maillot du Canada ensemble. »

Borjan estime d’ailleurs qu’il est temps que le Canada reçoive le « respect » qui lui est dû.

« Avant, les équipes qui jouaient contre le Canada se disaient que ça allait être facile, explique le gardien. Mais maintenant, ils ont peur de nous affronter.

« On a une équipe extraordinaire, elle n’abandonne jamais. C’est la nouvelle équipe canadienne. On va continuer de pousser et de se battre pour la nouvelle génération. On va changer le soccer au Canada. »