Le monde du sport le pressentait et n'y a pas échappé: les JO de Rio ont eu le dopage en permanence en toile de fond et se sont soldés par l'exclusion de plus d'une dizaine de concurrents contrôlés positifs, pour moitié des haltérophiles.

Précédés de l'exclusion collective des athlètes russes sur fond de dopage d'État en Russie, et entamés dans la confusion après notamment l'admission tardive de Darya Klishina, unique athlète russe finalement en course, les Jeux sentaient le souffre avant même la cérémonie d'ouverture.

Depuis le premier rapport en novembre de l'Agence mondiale antidopage (AMA) sur la Russie, le sujet a largement parasité la préparation des JO-2016. Comme sans doute jamais auparavant.

En novembre 2015, l'AMA avait rendu publiques les premières conclusions du rapport d'enquête de sa commission indépendante, estimant que les cas de dopage en Russie n'auraient «pas pu exister» sans l'assentiment du gouvernement.

Second rapport en janvier et bis repetita. Les dirigeants russes «ne pouvaient pas ne pas connaître l'ampleur du dopage dans l'athlétisme», avait estimé l'Agence.

Puis le dossier tournait aux guerres institutionnelles.

Face aux critiques sur une prétendue frilosité du Comité international olympique (CIO) envers Moscou, son président Thomas Bach montait au créneau le 1er août, rejetant implicitement sur l'AMA la responsabilité d'une gestion tardive.

Le CIO «ne peut être tenu responsable ni du timing ni des raisons des incidents auxquels nous devons faire face à seulement quelques jours des Jeux», lançait-il. 

Le Kenya aussi 

À la veille seulement des qualifications de la longueur, Klishina obtenait l'autorisation d'y participer grâce à une décision du Tribunal arbitral du sport (TAS) qui donnait tort à la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF).

Les sportifs russes étaient donc finalement 276 aux Jeux. A peine plus d'une centaine étaient exclus, à l'issue d'un processus qui pose question.

Mais la Russie n'était pas la seule visée.

En marge de la compétition, le patron de l'athlétisme olympique kényan était rappelé des Jeux, accusé d'avoir réclamé un pot-de-vin de près de 17 500 $ CAN pour donner des informations avant des contrôles antidopage.

Le même jour, le comité international paralympique (IPC) suspendait la Russie pour cause de dopage d'État. Il ne devrait donc y avoir aucun Russe aux Paralympiques (7-18 septembre). A moins d'une décision contraire du TAS...

Evidemment, les athlètes ne sont pas restés insensibles.

Certains nageurs ne mâchaient pas leurs mots. «Je n'ai pas de respect pour les dopés», lâchait l'Australien Mark Horton, médaillé d'or du 400 m libre, à propos du Chinois Sun Yang, double champion du monde en titre, contrôlé positif en 2014 et suspendu trois mois.

«Sun Yang, il pisse violet!», s'emportait même le nageur Français Camille Lacourt, qui n'avait pas du tout apprécié de voir gagner le Chinois sur 200 m libre.

Le CIO pouvait rappeler tout le monde à l'ordre, en réclamant le «respect des autres». Mais sans convaincre.

Les échantillons de Rio gardés 10 ans

Le 18 août, l'haltérophile kirghize Izzat Artykov, en bronze chez les -69 kg, était le premier médaillé des JO de Rio exclu pour dopage.

Une demie surprise. Ce sport est l'un des plus touchés par la gangrène du dopage. Après la compétition, le Français Bernardin Kingue Matam, qui avait terminé à la 8e place, avait d'ailleurs mis en doute la probité de ses adversaires.

«Si la Fédération internationale et le CIO font les choses correctement, je pense pouvoir gagner bien quatre places, parce que les cinq premiers ne sont pas «clean»», avait-il dénoncé.

En apprenant son contrôle positif, Artykov a renvoyé l'ascenseur, accusant le Français «d'avoir ajouté des produits dopants à (sa) boisson ou (sa) nourriture».

Au total, dimanche, à quelques heures de la cérémonie de clôture, 12 concurrents ont été exclus pour dopage depuis le début des Jeux, dont six haltérophiles.

Dans le même temps, le CIO a continué à égrainer une liste d'athlètes testés positifs lors des réanalyses des échantillons des Jeux de Pékin-2008 et Londres-2012, qui ont révélé 98 nouveaux cas.

Les échantillons prélevés à Rio seront conservés 10 ans, contre huit ans auparavant, en vertu du nouveau Code mondial antidopage. Le tableau de chasse des JO de Rio n'est donc peut-être pas clos.

REUTERS

Darya Klishina