Erik Guay a dû renoncer aux Jeux de PyeongChang à la suite d'une blessure au dos. Le double champion du monde a accepté de se joindre à l'équipe de Débats pour partager ses observations au fil des deux semaines olympiques.

Samedi dernier, j'avais tout préparé. « C'est bientôt la descente masculine, on va regarder ça ensemble. Tu vas voir, ça va être intéressant. » 

Intéressant peut-être, mais dans l'oeil de ma plus grande, ça ne le sera jamais autant que les épreuves féminines de ski. 

Jamais autant que les performances de Lindsey Vonn. Jamais autant que Mikaela Shiffrin. 

Ma fille Logann attend avec fébrilité de voir ces deux skieuses exceptionnelles prendre d'assaut les pentes. Difficile de ne pas partager son enthousiasme. 

J'en étais donc à tenter de vendre la descente masculine à ma plus vieille quand le téléphone a sonné. C'était mon frère Stefan. Il est à PyeongChang avec l'équipe canadienne de ski, lui qui est entraîneur. 

Trop de vent, m'a-t-il dit. Trop dangereux. Les organisateurs ont décidé de déplacer la descente masculine à ce soir, 21 h 30 (heure de l'Est). 

C'était la bonne décision à prendre, évidemment, mais sur le coup, j'étais déçu, même si je m'en doutais un peu, avec toutes les histoires que j'avais lues concernant les vents violents qui soufflaient sur la piste depuis quelques jours déjà. 

Le déplacement d'une épreuve, ce n'est jamais plaisant. Ni pour le skieur inscrit à la compétition, qui doit donc revoir sa préparation mentale et physique, ni pour le skieur blessé qui tente de motiver sa fille pour regarder la course en sa compagnie, un samedi soir. 

Si la température et les vents le permettent, et si je réussis à convaincre Logann, on se reprendra donc ce soir. Dans tous les cas, je suis confiant. 

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Bien sûr, j'aimerais que les Canadiens obtiennent de bons résultats dans les prochains jours sur les pentes de ski, en super-G et en descente notamment. 

Mais il faut être réaliste. 

Nous sommes loin d'être les favoris dans ces épreuves. J'espère de belles surprises, mais je n'ai pas de grandes attentes. Je suis tout de même bien curieux de voir ceux qui géreront le mieux la pression olympique et repartiront avec les grands honneurs. 

Allons-y de quelques prédictions, pour le plaisir : 

J'aimerais bien que mes amis Aksel  Lund  Svindal et  Kjetil   Jansrud, deux Norvégiens qui dominent le super-G cette saison, connaissent de bons résultats. 

Dans la descente, ils auront cependant un adversaire de taille en la personne du Suisse Beat Feuz, qui est l'un des grands favoris pour remporter la course. 

Et un peu plus en retrait, je garderai un oeil sur Thomas Dressen, un Allemand, qui est dans une grande forme actuellement. Il a d'ailleurs remporté la partie descente du combiné masculin, lundi soir. Il pourrait connaître une très bonne course. Chez les femmes, sans dire que ce sera facile, il faut avantager les deux préférées de ma fille, les Américaines Lindsey Vonn et Mikaela Shiffrin. 

La première, inscrite au super-G, au combiné et à la descente, pourrait, selon moi, repartir avec deux médailles d'or. Et Shiffrin pourrait faire encore mieux et remporter trois épreuves, elle qui sera de la descente, du slalom, du slalom géant, du super-G et du combiné. 

Oui, ces deux skieuses dominent à ce point la présente saison de ski féminin. Je comprends ma fille d'avoir hâte de les voir à l'oeuvre ! 

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En parlant de domination... 

Lundi matin, tout en préparant avec l'aide de ma femme mes filles pour aller à l'école, j'avais un oeil rivé sur le téléviseur, là où Mikaël Kingsbury s'envolait vers la victoire. 

C'était magistral comme performance. Aucun autre compétiteur n'était même proche de le rejoindre. 

Mikaël est dans une classe à part. Il domine tellement son sport, depuis tellement longtemps. C'est un maître dans ce qu'il fait. 

J'étais tellement content de le voir gagner. 

Enfin, après l'argent à Sotchi, il décrochait sa première médaille d'or. Et quand je l'ai vu sur le podium, plus tard, l'émotion m'a gagné. Je connais un peu Mikaël. 

On a le même entraîneur à Montréal, chez groupe B2dix, où l'on s'entraîne dans l'entre-saison. 

J'ai été un témoin privilégié de toutes les heures qu'il a passées dans la salle d'entraînement. Et voilà qu'aujourd'hui, son travail rapporte. 

C'est drôle, parce qu'on n'a jamais parlé ensemble de nos attentes, de nos performances, de nos résultats. Et jamais on n'a parlé des Jeux ou de la Coupe du monde. Et voilà qu'aujourd'hui, j'aimerais bien qu'il me parle de sa victoire olympique. 

Mais je ne veux pas le déranger. 

Mikaël a tout le soutien dont il a besoin autour de lui présentement, toute sa famille est là. J'aurais l'impression que mon message se perdrait dans tout ça... 

Je vais attendre. 

Mikaël, quand tu seras de retour à la maison, quand tout se calmera un peu autour de toi, je vais t'appeler. 

Pour te féliciter pour cette grande réussite. Et pour toutes les belles émotions que tu nous as fait vivre, à nous tous, au pays entier. 

Et à moi aussi.