Les partisans des Blue Jackets de Columbus se réveillent avec un goût amer dans la bouche ce matin.

Leur défaite, hier, 5-2 à domicile aux mains des Penguins de Pittsburgh, les écarte, du moins momentanément, des séries éliminatoires.

Columbus est à un point de Pittsburgh et à deux de Montréal, mais avec un match de plus à disputer que les Penguins et deux de plus que le Canadien.

Le DG Jarmo Kekalainen a mis tous ses oeufs dans le même panier dans l'espoir de gagner la Coupe Stanley ce printemps, mais son club n'est même pas assurer de participer aux séries.

Une exclusion des éliminatoires serait dramatique à Columbus. Il serait alors encore plus ardu pour Kekalainen de convaincre ses quatre gros joueurs autonomes - Sergei Bobrovsky, Artemi Panarin, Matt Duchene et Ryan Dzingel - de renoncer à leur statut de joueur autonome pour demeurer avec le club.

Même s'ils se qualifient, les Blue Jackets doivent espérer terminer premiers parmi les deux clubs repêchés de façon à éviter le Lightning de Tampa Bay en première ronde.

« Nous effectuons des transactions, nous obtenons quelques bons joueurs, ça ne devrait pas changer notre identité, a déclaré l'entraîneur John Tortorella aux journalistes après la défaite, hier. Nous n'atteindrons pas les séries avec notre talent. Il faut que tout le monde comprenne ici, nous parlons de percer en séries éliminatoires, mais nous sommes exclus ce soir, n'est-ce pas, si l'on consulte le classement ? »

Dès l'été, on savait Kekalainen coincé. Sergei Bobrovsky et Artemi Panarin, transparents, déclaraient qu'ils n'allaient pas signer de prolongation de contrat avec le club au cours de l'hiver.

Mais Kekalainen avait un bon club et il a choisi d'acheter du temps. Plus la date limite des échanges approchait, plus Columbus confirmait son talent.

Il demeure extrêmement difficile à ce jour de comprendre la stratégie des Blue Jackets. Ont-ils sacrifié des espoirs et des choix au repêchage pour obtenir Duchene et Dzingel afin de pallier la perte éventuelle de Panarin ?

Alors pourquoi ne pas leur avoir offert une prolongation de contrat au préalable comme Vegas l'a fait dans le cas de Mark Stone ? Kekalainen espère-t-il une fin de saison glorieuse pour convaincre les quatre de rester ?

Si on fait le décompte, les Blue Jackets détiennent deux maigres choix en prévision du prochain repêchage, en troisième et septième ronde.

Et si Duchene demeure avec eux, ils ne repêcheront pas avant la quatrième ronde en 2020, puisqu'ils ont offert aux Sénateurs un choix conditionnel de première ronde advenant une prolongation de contrat à Duchene. Les deux choix de deuxième ronde ces deux prochaines années ont été offerts pour Dzingel.

Cette stratégie demeure étonnante pour un recruteur de carrière qui a profité de nombreux choix au repêchage pour rebâtir les Blues de St. Louis entre 2003 et 2010, après plusieurs années au sein du groupe de dépisteurs des Sénateurs d'Ottawa.

Mais Kekalainen, premier DG européen de l'histoire de la LNH, n'est pas seul. Les propriétaires ont sans doute eu leur mot à dire dans cet énorme coup de poker, de même que le président John Davidson, très présent au quotidien dans les opérations hockey.

Relisez l'entrevue accordée par Jarmo Kekalainen à Mathias Brunet il y a quelques années, dans laquelle il raconte son parcours.

Kekalainen s'est permis de vider sa banque de choix et céder deux espoirs, parce que trois des ses joueurs les plus importants, le centre Pierre-Luc Dubois et les défenseurs Seth Jones et Zack Werenski, ont respectivement 20 ans, 24 ans et 21 ans. L'autre gros défenseur, Ryan Murray, en a 25 et Josh Anderson, dont c'est l'année d'éclosion avec 22 buts, a 24 ans.

Le DG des Jackets estime aussi compter sur une relève plus prometteuse que les apparences peuvent le démontrer. Vitaly Abramov et Jonathan Davidsson ne figuraient pas parmi son top-5 en relève.

Quand vient le temps d'évoquer ses joueurs d'avenir, Kekalainen cite le centre Liam Foudy, choix de première ronde en 2018 (18e au total), 63 points en 54 matchs à London, le Français Alexandre Texier, choix de deuxième ronde en 2017, un centre lui aussi, 34 points en 48 matchs dans la Ligue d'élite de Finlande, et Emil Bemstrom, un centre lui aussi, mais de plus petite taille, 31 points en 40 matchs à Djurgarden dans la Ligue d'élite de Suède.

Le gardien Elvis Merzlikins, 24 ans, le dernier élément qui reste de la désastreuse acquisition de Marian Gaborik, est considéré comme le gardien d'avenir. Il pourrait faire le saut dans la LNH dès l'an prochain après plusieurs belles saisons en Suisse.

Plus le groupe d'espoirs et de choix s'amincit, cependant, plus le taux de succès diminue, et plus la pression se resserre autour des espoirs en place.

Mais la pression, elle émane de partout ces temps-ci dans ce coin de l'Ohio.

Le DG des Capitals, Brian McLellan, a bien résumé la situation dans le Washington Post. « Il faudra voir comment ça fontionne pour eux. Ça sera intéressant à suivre, avec tous ces choix au repêchage offerts et une chimie à créer avec les nouveaux joueurs. L'expérience n'est pas sans intérêt. Kekalainen a été placé dans une situation très difficile avec ses deux vedettes qui ne voulaient pas signer de prolongation de contrat. Il faut lui donner du crédit pour son audace. »

Si les Blue Jackets atteignent les séries et remportent quelques rondes, plusieurs directeurs généraux pourraient être tentés d'imiter ce modèle innovateur. Si Columbus échoue, Kekalainen et Davidson ne manqueront pas de détracteurs.

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Le collègue Jean-François Tremblay n'a pas manqué de matière hier soir à Detroit. Max Domi, Jonathan Drouin et Andrew Shaw ont non seulement connu leur soirée la plus productive en carrière, mais Drouin et Shaw s'approchent de leur sommet de points en carrière pour une saison et Domi a déjà sept points de plus que son meilleur total en carrière.