(Nashville) Il reste encore trois jours à se demander qui le Canadien échangera ou n’échangera pas. Une fois cette question existentielle réglée, il y en aura une autre que se posera la direction : que faire de Joshua Roy ?

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Lorsqu’un joueur devient l’objet de ce dilemme, c’est rarement une bonne nouvelle. Pour Roy, c’est au contraire très positif. Et cette rare victoire de 4-3 en prolongation du Tricolore à Nashville, mardi, a sans doute encore complexifié son cas.

C’était déjà dans l’air depuis un moment, et Martin St-Louis l’a confirmé après la rencontre : il tomberait sous le sens que le CH cède Joshua Roy au Rocket de Laval pour contribuer à la poussée du club-école vers les séries éliminatoires de la Ligue américaine. Plusieurs espoirs de l’organisation évoluent à Laval, et la perspective d’une expérience en séries ne serait que bénéfique dans leur développement.

Or, le Canadien se causerait deux problèmes en agissant ainsi. D’une part, l’équipe perdrait un attaquant qui est parfaitement à sa place, à 20 ans, à la gauche d’Alex Newhook et de Joel Armia. Et d’autre part, sans affirmer que Roy n’a plus rien à apprendre dans la Ligue américaine, il serait presque dommage de voir s’arrêter sa progression fulgurante dans la LNH.

« Son comportement sur la glace » épaissit ce dilemme, a souligné Martin St-Louis. « On est bien conscients qu’il pourrait aider Laval en ce moment. Il faut trouver l’équilibre. Combien de temps le garder ici ? Comment en faire bénéficier Laval et nous ? C’est bien, parce qu’il nous force à trouver cet équilibre. »

Contre les Predators, Roy a marqué un but important, qui a créé l’égalité à 3-3 et qui a forcé la tenue d’une période de prolongation. Sur cette action, il a volé la rondelle à Roman Josi en zone neutre avant de battre Juuse Saros d’un tir vif. Un but de grand garçon, en somme.

Qui plus est, tout ce trio a (encore) connu un fort match. « Ça va super bien, les trois ensemble, a abondé le jeune homme. On crée des choses offensivement, il y a une belle chimie qui s’installe. […] Pendant tout le match, on a eu des chances, c’était une question de temps avant que ça rentre. »

St-Louis a aussi noté le grand calme de Roy. « Il n’est pas nerveux, a-t-il précisé. Son expérience sur les grandes scènes, comme au Mondial junior, fait en sorte qu’il n’est pas impressionné ou stressé par les situations. »

« C’est le fun de les voir », a renchéri David Savard.

C’est justement la raison pour laquelle la direction doit se gratter sur le sort à lui réserver.

Duel inégal

Il n’y a pas que ce trio qui a bien joué, alors que toute l’équipe s’est assez bien défendue. En ce sens, la victoire était plutôt méritée, surtout après que le CH eut effacé deux déficits.

Ce qu’on a senti après coup, c’est à quel point elle était attendue. Dans le corridor menant au vestiaire, on entendait les cris de joie. La musique résonnait, c’était la fête.

« On aurait pu gagner les deux matchs en Floride [deux défaites en tirs de barrage]. Ça fait du bien d’être du bon côté », a sobrement déclaré Nick Suzuki, qui a donné la victoire aux siens grâce au 100e but de sa carrière.

« L’équipe en avait besoin pour le moral, a avoué David Savard. Il faut continuer d’amasser des points, de compétitionner contre de bonnes équipes, et c’est ce qu’on a fait ce soir. »

« Je suis content pour les gars, ils le méritent », a conclu Martin St-Louis. En souriant, il a convenu, à propos du but chanceux de Savard, que « la vie équilibre parfois les choses ».

Seule ombre au tableau, et elle n’est pas mince : la performance du premier trio. L’unité pilotée par Nick Suzuki a été dévorée tout rond par celle des vétérans Ryan O’Reilly, Gustav Nyquist et Filip Forsberg, des Predators.

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Yakov Trenin (13) et Nick Suzuki (14)

C’est ce trio qui a marqué les trois buts des locaux, chaque fois à cinq contre cinq, chaque fois contre Suzuki, Cole Caufield et Juraj Slafkovsky. Sur les deux premiers, le Slovaque a complètement raté sa couverture devant le filet. L’entraîneur-chef, à l’évidence, n’avait pas une envie débordante d’en discuter. « Il faut que je regarde [le match]. C’est une situation d’apprentissage et on va le corriger », s’est-il limité à dire.

« C’est vraiment une bonne ligne, a repris Suzuki. Ils se voient bien, autant offensivement que défensivement. Ils utilisent bien leurs bâtons et font de beaux petits jeux. C’est un trio sous-estimé de la LNH. »

C’est aussi une combinaison qui regorge d’expérience, un luxe que n’a pas celle des trois jeunes attaquants du Tricolore. Il y a certains soirs où ce facteur entre en ligne de compte. C’était un de ces soirs-là.

Mais quand ladite soirée se conclut par une victoire, à plus forte raison contre une équipe invincible depuis la mi-février, les erreurs paraissent un peu moins.

Le résultat ne fait pas foi de tout, répète Martin St-Louis sur une base quasi quotidienne. Parfois, il tombe quand même à point.

Dans le détail

La chance sourit à Savard

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David Savard (58)

Souvent, cette saison, le Canadien a semblé être victime de bonds défavorables. Les compteurs sont maintenant à zéro. En deuxième période, alors que son équipe venait à peine de réduire l’écart à 2-1, David Savard a marqué possiblement le but le plus étrange de la saison – en tout cas le plus bizarre de sa carrière, a-t-il lui-même avoué. Après que Nick Suzuki eut gagné la mise au jeu au centre de la glace, le défenseur a dégagé la rondelle depuis la ligne rouge. Le disque a roulé sur la baie vitrée avant de changer brusquement de direction pour glisser tout doucement dans le filet des Predators, sous les yeux d’un Juuse Saros aussi impuissant que dépité. En marquant deux buts en six secondes, le CH a inscrit l’un de ses doublés les plus rapides à ce jour, à égalité au quatrième rang de l’histoire de la franchise. Le record d’équipe (2 secondes), établi en novembre 2018, appartient à Max Domi et Joel Armia.

Double surprise : Harvey-Pinard… au centre !

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Rafaël Harvey-Pinard et Ryan O’Reilly (90)

On savait que son retour approchait, car il avait repris l’entraînement avec ses coéquipiers, mais on n’attendait pas Rafaël Harvey-Pinard aussi tôt. Le Québécois a renoué avec la compétition mardi soir à Nashville, une bonne semaine avant ce qu’avait prévu le personnel médical du Tricolore. Après qu’il se fut blessé au « bas du corps » le 10 février, il était attendu qu’il rate de quatre à six semaines, ce qui l’aurait mené à la semaine prochaine, au minimum. À son retour, l’attaquant n’a été ni spectaculaire ni mauvais, curieusement employé au centre en l’absence de Colin White (voir la capsule suivante). Un bon rappel que ce n’est pas sa position habituelle : il a perdu les cinq mises au jeu pour lesquelles il a été désigné.

Les blessures, encore

Si Harvey-Pinard s’est retrouvé au centre, c’est parce que Colin White s’était blessé la veille à l’entraînement en fonçant malencontreusement dans le filet. Le club a d’abord indiqué mardi matin que son cas était réévalué « au jour le jour » ; puis, pendant la période d’échauffement, son nom a été ajouté à la liste des blessés. Cette procédure administrative a permis au CH d’activer Harvey-Pinard, qui était jusque-là sur la même liste. À moins d’une surprise, on peut s’attendre à ce que l’équipe compose encore avec seulement trois centres naturels à son prochain match, jeudi en Caroline. Car avec une formation complète de 23 joueurs, comme c’est présentement le cas, il ne pourra rappeler de centre du Rocket de Laval sans rayer un autre nom de son effectif. Fascinant.

En hausse

Joel Armia

Ça se poursuit pour lui. Sans obtenir de point, il a encore livré une bonne performance, faisant de nouveau l’étalage de ses exploits en protection de rondelle. Il a aussi obtenu quatre tentatives de tir.

En baisse

Kaiden Guhle

Rien de facile pour lui ni pour son partenaire Mike Matheson. Il s’est retrouvé sur la glace sur deux buts des Predators, et encore sur celui qui leur a été refusé en fin de match.

Le chiffre du match

2

C’est le nombre de bagarres de Josh Anderson depuis le début de l’année 2024, à la suite de son escarmouche avec Luke Schenn. C’est aussi son nombre de buts dans le même intervalle.