Chaque fois qu’un joueur tombe au combat, on entend que l’occasion est belle pour un autre de se faire valoir.

Les plus cyniques rétorqueront que c’est surtout vrai chez le Canadien, où chaque joueur est à une pelure de banane de rater 40 matchs, mais nous ne cautionnerions pas des propos aussi caustiques. Encore que ce ne serait pas faux.

Depuis le début de la présente saison, les blessures majeures subies par Kirby Dach, Rafaël Harvey-Pinard et Alex Newhook ont créé des mouvements de personnel relativement prévisibles qui ont permis à Juraj Slafkovsky et à Jake Evans, entre autres, de prendre du galon.

Or, avec la perte récente de Tanner Pearson, il y a un trou évident à combler sur le troisième trio. Et cette fois, il n’y a pas de candidat évident pour le combler.

Insistons ici sur l’épithète « évident ». Car il y a évidemment des remplaçants. À l’entraînement, mardi matin, c’est Joel Armia qui patinait avec Christian Dvorak et Brendan Gallagher. Cette unité a été réunie dimanche soir pendant la rencontre contre les Predators de Nashville.

De manière strictement théorique, on pourrait penser que Jesse Ylönen serait le candidat tout désigné.

À 24 ans, et à sa quatrième saison chez les professionnels en Amérique du Nord, le Finlandais a décroché un poste avec le grand club au terme du camp d’entraînement. On vantait ses « outils » sur le plan offensif et on célébrait l’amélioration de son jeu défensif. On lui a même confié des missions en infériorité numérique. Toutes les façons sont bonnes pour les joueurs de faire hausser leur valeur, a souvent répété Martin St-Louis.

« Je trouve qu’il se rapproche beaucoup d’être un joueur de la LNH », a affirmé l’entraîneur au camp.

Deux mois plus tard, l’utilisation qui est faite d’Ylönen ne ressemble pas à une consécration. Laissé de côté à sept reprises, il a amorcé 19 des 21 rencontres qu’il a disputées sur le quatrième trio.

Les deux autres ? Le 18 novembre, à Boston, dans une des pires sorties du Canadien cette saison. Et dimanche dernier, contre les Predators. Le lecteur consciencieux se souviendra qu’on a parlé d’Armia plus tôt : après deux périodes sans saveur pour Ylönen sur le troisième trio, on lui a préféré le vétéran.

Atouts

St-Louis ne désavoue pas son attaquant pour autant. « Tu vois qu’il a des atouts offensifs, a-t-il rappelé mardi. Dans l’espace, il a une bonne rapidité, de bonnes touches. C’est un marqueur. »

Cette facette de son jeu a été manifeste, récemment, lorsqu’il a marqué deux buts spectaculaires en tirs de barrage. « Je déteste l’affronter en échappée à l’entraînement », a témoigné Cayden Primeau, son coéquipier des dernières années à Montréal et avec le Rocket de Laval.

« Tu as vu ses mains ? C’est fou. Il est imprévisible, il fait beaucoup de choses avec ses épaules », a poursuivi le gardien qui, d’ordinaire réservé, a appuyé ses dires d’une maladroite imitation qui l’a fait sourire.

Voilà pour ce qui fonctionne, et qui lui vaut désormais une place sur la deuxième vague d’avantage numérique. Mais il y a le reste. Ce qui justifie qu’au cours de ses 13 derniers matchs, Ylönen n’a franchi la barre des 10 minutes de jeu que cinq fois. Et que dans le même intervalle, il a, à sept reprises, disputé trois présences ou moins en troisième période.

Ça reste un joueur qui, sans la rondelle, a besoin de plus de détails dans sa game, offensivement et défensivement.

Martin St-Louis

La notion de détails, de plus en plus entendue dans la LNH, est parfois galvaudée. On se référera donc à Nick Suzuki pour l’expliquer le plus simplement possible : savoir où se positionner et quoi faire à tout moment.

« Les cinq gars sur la glace doivent le savoir, a-t-il précisé, sans commenter la situation précise d’Ylönen. Martin croit beaucoup en ça, en toutes les petites choses qui peuvent nous donner un avantage. »

« En dedans »

L’entraîneur a aussi dit d’Ylönen qu’il « doit entrer plus en dedans ». Traduction : s’impliquer davantage à l’intérieur des points de mise au jeu. Ce n’est pas propre à son cas, remarquez, car ç’a été le thème central de l’entraînement de mardi.

« Pas seulement avec la rondelle, a poursuivi St-Louis. Il faut anticiper quand on va avoir besoin de toi. Il ne faut pas non plus y aller trop de bonne heure et rester là. Les équipes dangereuses anticipent bien. Elles sont capables de récupérer des rondelles, aussi. Il faut s’améliorer là-dessus.

« Les joueurs offensifs, avec des habiletés, ils aiment ça être à l’extérieur avec la rondelle. Mais la game est jouée sans la rondelle. Il faut aller à l’intérieur si tu veux marquer des buts. »

On pense instinctivement à Cole Caufield en entendant cette remarque. Mais aussi à Jesse Ylönen. Ce dernier est, selon le site MoneyPuck, l’un des attaquants du Tricolore qui décoche les tirs de la plus grande distance.

Distance entre le tireur et le filet (en pieds)

  • Sean Monahan : 23,2
  • Rafaël Harvey-Pinard : 23,3
  • Juraj Slafkovsky : 23,6
  • Brendan Gallagher : 25,3
  • Alex Newhook : 25,5
  • Josh Anderson : 26,2
  • Christian Dvorak : 26,7
  • Nick Suzuki : 29,7
  • Cole Caufield : 29,8
  • Jake Evans : 32,4
  • Tanner Pearson : 33,6
  • Michael Pezzetta : 35,7
  • Jesse Ylönen : 37,5
  • Joel Armia : 38,6

Source : moneypuck.com

Ylönen, lui, explique sobrement que, depuis le début de la saison, il s’efforce principalement de peaufiner son jeu défensif. « Je ne sais pas si je me suis amélioré, mais j’ai travaillé fort », assure-t-il, rappelant qu’il lui reste encore beaucoup de matchs pour se faire valoir.

Le poste à prendre sur le troisième trio lui importe peu. Sa priorité demeure d’« aider l’équipe ».

« Je ne change pas d’état d’esprit, dit-il. Je veux me retrouver au bon endroit pour utiliser mes habiletés. Je prends ça un jour à la fois. Mon but est d’être un bon joueur dans cette ligue. Je crois avoir tous les outils pour y arriver, mais je ne crois pas y être encore parvenu. »

Encore deux semaines sans Harris

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Jordan Harris

Absent « pour une durée indéterminée » après s’être blessé au « bas du corps » contre les Bruins de Boston le 18 novembre dernier, Jordan Harris a patiné en solitaire mardi matin. Le Canadien a indiqué qu’il poursuivait « son plan de remise en forme » et qu’il devrait pouvoir revenir au jeu d’ici 10 à 14 jours. Suivant cet échéancier, le scénario le plus optimiste mènerait à un retour le vendredi 22 décembre à Chicago, pour le dernier match de son équipe avant Noël. On peut toutefois se demander si la rencontre du 27 décembre en Caroline du Nord n’est pas une cible plus réaliste.