Combien d’équipes dans l’histoire peuvent se vanter d’avoir compté sur trois joueurs choisis parmi les vingt premiers dans une même cuvée… seulement quatre ans seulement après le repêchage en question ?

Même avec trois choix de premier tour, l’exploit est presque impossible à réaliser. Le Canadien en comptait trois de la cuvée 2019 au sein de ses deux premiers trios mercredi soir à Toronto : Kirby Dach, 3e choix au total, Cole Caufield, 15e, et Alex Newhook, 16e.

Le premier, un centre droitier de 6 pieds 4 pouces, a obtenu deux aides et joué 21 : 22, 25 secondes de moins que le meneur à l’attaque, Nick Suzuki. Le second a marqué à nouveau, son 49e but à ses 84 derniers matchs, et le troisième a marqué deux buts à son premier match avec sa nouvelle équipe. Il en avait compté deux à ses 33 dernières rencontres au Colorado…

Il est fascinant de constater comment le CH a pu mettre la main sur non seulement trois joueurs repêchés dans le top 20, mais trois des neuf premiers compteurs de la cuvée à ce jour.

Dans le cas de Caufield, le Canadien a eu la chance de voir une dizaine de clubs le bouder en raison de ses 5 pieds 7 pouces, malgré 72 buts en 64 matchs au sein du programme de développement américain à son année d’admissibilité au repêchage.

Parmi les joueurs choisis avant lui, Alex Turcotte, cinquième au total par Los Angeles, Vasili Podkolzin, dixième par Vancouver, Victor Soderstrom, onzième par Arizona, et Spencer Knight, treizième par la Floride, entameront la saison dans la Ligue américaine, quatre ans après avoir été repêchés.

Caufield vient au huitième rang des compteurs de sa cuvée, avec 85 points en 124 matchs, mais il grimperait au quatrième rang en tenant compte de la moyenne de points par partie. Il se classe deuxième au chapitre des buts derrière Jack Hughes, mais vient au premier rang pour la moyenne de buts par rencontre.

Dach et Newhook n’ont pas été obtenus parce qu’ils constituaient des choix ratés, mais parce qu’ils ne produisaient pas encore au rythme espéré par leurs organisations respectives. Le DG Kent Hughes a réussi à les acquérir au moment opportun avec une offre assez alléchante pour qu’on accepte de se départir d’eux avant leur 23e anniversaire. Il fallait du flair.

Connaissant désormais un peu mieux la proactivité de Hughes, on devine qui a initié les pourparlers avec Chicago et le Colorado. Les Blackhawks entamaient une reconstruction agressive. Dach venait de produire seulement 26 points en 70 matchs à sa troisième saison. Son poignet blessé était probablement encore tendre. Le directeur général des Hawks, Kyle Davidson, voulait bâtir un club rapide et intense. Dach est plutôt un cérébral et compense son manque de vitesse par une protection de rondelle exceptionnelle.

Davidson exigeait au départ un choix dans le top 10 en 2022. Il a dû se résoudre à recevoir un 13e choix au total, auquel Hughes a ajouté un choix de troisième tour pour compenser. Le CH a obtenu ce choix de premier tour des Islanders en retour du défenseur Alexander Romanov, rappelle-t-on.

Montréal a donc obtenu Dach, peut-être un éventuel centre numéro un, pour un défenseur repêché au deuxième tour en 2018 par l’administration précédente et un choix de troisième tour.

Newhook a été placé dans un rôle pour lequel il n’était pas prêt au Colorado : succéder à seulement 21 ans à un centre, Nazem Kadri, qui venait de produire 87 points en seulement 71 matchs au sein d’une équipe gagnante de la Coupe Stanley.

Les attentes étaient peut-être irréalistes dans son cas, malgré une jolie production de 33 points en 71 matchs à sa première saison complète en 2021-2022 et sa léthargie en fin de saison a convaincu l’Avalanche d’accepter un choix de fin de premier tour, 31e au total, et de deuxième tour, 37e au total, en retour de ses services. Le choix de deuxième tour a ensuite servi pour obtenir un centre un peu plus expérimenté, Ross Colton, 27 ans, 32 points en 81 matchs avec le Lightning l’an dernier.

Montréal a donc mis la main sur deux joueurs de moins de 23 ans capables de jouer au sein de l’un de leurs trios offensifs pour un défenseur repêché au 38e rang en 2018, un 66e choix au total en 2022, un 31e et un 37e choix en 2023.

Selon les analyses, seulement 30 % des joueurs repêchés entre le 31e et le 45e rang auront la chance de devenir des réguliers dans la Ligue nationale, et seulement 3 % seront des vedettes. Le taux passe à 15 % pour le troisième tour, avec une probabilité de 3 % d’atteindre le statut de star.

Marc Bergevin affirmait souvent qu’il était presque impossible de dénicher des centres de premier plan sur le marché des transactions, que la LNH n’était pas un jeu de PlayStation. Il a lui-même prouvé le contraire en faisant l’acquisition de Nick Suzuki pour un capitaine vieillissant et aigri, Max Pacioretty.

Mine de rien, quatre des six premiers attaquants du CH contre Toronto mardi ont été obtenus dans des transactions avant de dépasser le quart de siècle. Le quatrième étant Josh Anderson, 29 ans aujourd’hui, obtenu des Blue Jackets il y a trois ans pour Max Domi, acquis au préalable pour Alex Galchenyuk.

Un directeur général allumé et créatif peut devenir l’atout le plus important d’un club. Kent Hughes est en train de le prouver, et Marc Bergevin avait ouvert la voie avant lui.

Sans oublier Rafaël Harvey-Pinard…

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Rafaël Harvey-Pinard

Non seulement le Canadien possède-t-il désormais trois des neuf premiers compteurs de la cuvée 2019, mais aussi le 21e, Rafaël Harvey-Pinard, pourtant repêché au septième tour, 201e au total. Le jeune homme a plus de points en seulement 39 matchs que huit attaquants repêchés au premier tour : Connor McMichael, Simon Holmström, Jakob Pelletier, John Beecher, Brayden Tracey, Ryan Suzuki, Samuel Poulin et même… Alex Turcotte.

Si on calculait la moyenne de points par matchs, Harvey-Pinard percerait le top 10, mais son échantillon est encore mince avec seulement 39 matchs en carrière. Il n’empêche, si ce repêchage était à refaire, Harvey-Pinard constituerait sans l’ombre d’un doute un choix de premier tour et Montréal ne compterait pas seulement trois bons joueurs de cette cuvée, mais quatre. Voyons si Mattias Norlinder parviendra à entrer dans les discussions d’ici les prochaines saisons.

À ne pas manquer

1- Le deuxième trio offensif du CH s’est mis en évidence mercredi à Toronto. Simon-Olivier Lorange était sur place pour analyser cette rencontre.

2- Alexandre Pratt aime bien les matchs de 6-5. Quoique ça le force à souffler dans le sac de chips vidé par ses fils (l’histoire ne dit pas cependant s’il s’agit de chips régulières, au ketchup ou au vinaigre).

3- La boxeuse Mary Spencer n’a pas réussi à venger sa défaite contre la Belge Femke Hermans et gagner les ceintures de championne du monde IBF et IBO, mercredi soir. Jean-François Téotonio a assisté à cette soirée de boxe au Cabaret du Casino de Montréal.