Marie-Philip Poulin répondait depuis quelques minutes aux questions sur les espoirs avec qui elle patine depuis trois jours au camp de perfectionnement du Canadien.

Elle était certes enthousiaste à parler des Lane Hutson, David Reinbacher et Logan Mailloux, mais son regard s’est carrément illuminé quand a été prononcée la première question sur la future ligue féminine.

« Oh que oui ! Je suis très excitée, c’est une très belle nouvelle », a lancé la légendaire joueuse.

« Ça fait plusieurs fois qu’on se fait demander quand ça arrive. Je ne sais pas combien de fois j’ai dit que ça va arriver. Là, je peux enfin vous le dire, ce sera en janvier, une seule ligue pour le hockey féminin. Ça fait plusieurs années qu’on travaille pour ce moment-là. »

Le milieu du hockey féminin prend encore la mesure de l’onde de choc survenue la semaine dernière, quand il a été annoncé qu’une nouvelle ligue verra le jour, avec le soutien financier de Mark Walter, copropriétaire des Dodgers de Los Angeles, et de Billie Jean King, légende du tennis, entre autres.

Il reste encore moult détails à peaufiner. On ignore ce qui sera rescapé des deux ligues qui alimenteront la nouvelle entité. Certes, on sait qu’il y aura six équipes, soit trois au Canada et trois aux États-Unis.

À moins d’une colossale surprise, Montréal aura son équipe, mais il n’est toujours pas clair si le nom de la Force, son personnel ou ses joueuses feront partie du projet. La Force évoluait dans la Premier Hockey Federation (PHF). L’organisation n’a d’ailleurs toujours pas commenté la nouvelle.

À l’inverse, Poulin jouait pour l’équipe Harvey’s, dans l’Association des joueuses de hockey professionnel (PWHPA). Elle aura sa place dans une équipe, mais laquelle ?

La convention collective récemment ratifiée, valide jusqu’en 2031, suscite aussi des questionnements, comme le ferait tout contrat de travail de huit ans signé au moment où la structure de la ligue est encore imprécise.

« On voulait mettre en place une CBA [convention collective], avoir les ressources nécessaires, être payées correctement, avoir des physios, des docteurs, l’amphithéâtre, que tout soit professionnel. Ça fait plusieurs années qu’on y travaille », a lancé Poulin.

« On le mérite »

Aux yeux de la triple médaillée d’or olympique, la présence de Billie Jean King dans le projet est cruciale. « Elle est partie d’une feuille blanche, elle a signé un premier contrat, qui ne valait pas grand-chose. Et on voit où le tennis féminin est rendu », souligne-t-elle.

« On ne se fera pas payer des millions, on en est toutes conscientes. Mais on veut commencer à un salaire qui va nous permettre de faire ça de notre vie. On le mérite, ça fait des années qu’on travaille pour ça. On ne se compare pas au hockey masculin. »

C’est le hockey féminin, c’est différent, il n’y a pas de mises en échec, mais quand les gens viennent nous voir et voient la rapidité, voient les meilleures contre les meilleures, ils vont embarquer.

Marie-Philip Poulin

En lisant entre les lignes, on comprend que la future entité est un pas dans la bonne direction pour le hockey féminin en général, mais que sur le plan individuel, il y aura des laissées pour compte. À elle seule, la PHF comptait sept équipes ; la PWHPA, quatre. De 11 équipes, on passera donc à six clubs pour le moment.

« Tu ne veux jamais voir de joueuses sans travail, sans contrat, concède Poulin. C’est arrivé vite. On travaille pour que ces filles-là puissent rembarquer dans la ligue.

« On veut que ce soit professionnel et le sport professionnel, ce n’est pas facile d’en faire partie. Tu dois te présenter tous les jours et te battre. Certaines vont se présenter et ne seront pas retenues. C’est ça, la plus belle partie. Peut-être que l’an prochain, une joueuse va revenir et prendre ta place. Ça arrive dans la LNH, dans le sport professionnel. C’est ce qu’on veut au hockey féminin. »