(New York) Il a eu beau survenir au 81e match, le but qu’a marqué Nick Suzuki mercredi soir gardera sa place sur la courte liste des plus spectaculaires de la saison du Canadien.

En désavantage numérique, le numéro 14 est sorti de sa zone à toute vitesse, en pleine course avec le défenseur Samuel Bolduc. Même si son opposant profitait d’une avance au départ, Suzuki l’a surpris par l’extérieur et a logé, d’une seule main, la rondelle dans la partie supérieure du filet.

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Un effort colossal du capitaine… dans une défaite de 4-2 de son équipe contre les Islanders de New York. Un but à l’image de sa saison, en somme.

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Anders Lee célèbre son but avec ses coéquipiers devant la cage de Samuel Montembeault

Seul joueur à disputer tous les matchs de son club, Suzuki a été une véritable inspiration pour ses coéquipiers depuis le mois d’octobre. Non pas par le seul exploit d’avoir résisté aux blessures, mais pour son acharnement au travail.

« Il ne porte pas le C pour rien, c’est un exemple pour nous tous, a indiqué Samuel Montembeault après la rencontre. Chaque jour, que ce soit à l’entraînement ou dans un match, il est le meilleur joueur sur la glace. C’est le fun de voir qu’il a été capable de continuer à être aussi constant. »

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Samuel Montembeault

Parenthèse ici : Montembeault est le seul autre joueur à avoir porté l’uniforme à chacune des rencontres, mais sa situation est évidemment différente puisqu’il a amorcé 43 d’entre elles au banc. De retour à Suzuki.

Stabilité

À sa première année comme capitaine, l’Ontarien n’a pas eu la vie facile, tout au contraire. À la mi-janvier, il a appris qu’il perdait son ailier gauche de prédilection, Cole Caufield, dont la saison a pris fin prématurément en raison d’une opération à une épaule. Peu de temps auparavant, il avait perdu son principal ailier droit, Kirby Dach, muté au centre du deuxième trio.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la production de Suzuki n’a pas bronché. Elle est restée constante à 0,8 point par match – 37 points en 46 matchs avec Caufield, 28 en 35 sans lui. À cinq contre cinq, il a même généré davantage d’attaque : le nombre de chances de marquer de qualité et de buts attendus lorsqu’il était sur la glace a augmenté en deuxième moitié de saison, selon le site Natural Stat Trick.

Cole est tout un joueur, il nous manque. Mais on devait continuer, et j’ai pu jouer avec de bons joueurs. J’ai voulu les aider du mieux que j’ai pu et créer de l’attaque. C’était mon travail.

Nick Suzuki

« Je m’adapte à ceux avec qui je joue », a-t-il ajouté. « À leurs forces », notamment.

S’adapter, de fait, a probablement été ce que Suzuki a été forcé de faire le plus souvent, et ce, du début à la fin de la saison.

Par exemple : à cinq contre cinq, il a passé au moins 60 minutes sur la glace avec neuf attaquants différents. C’est cinq de plus que Sidney Crosby, à Pittsburgh, et six de plus que Brayden Point, à Tampa. Les deux ont disputé 81 matchs comme lui.

Contrôle

Martin St-Louis, pour sa part, est particulièrement impressionné par le contrôle qu’exerce son capitaine sur lui-même.

Ses émotions sont à la bonne place, il est capable de se régler ; il a un bon thermostat. Quand ça devient trop chaud, il le baisse, et il est capable de le remonter. C’est important, dans cette ligue-là.

Martin St-Louis sur Nick Suzuki

Son but, contre les Islanders, était une « réponse » dont son équipe « avait besoin à ce moment-là ». Il réduisait en effet l’écart à 3-2 et gardait le Tricolore dans le match.

« C’est une année excellente pour Suzy », a renchéri St-Louis.

Vu toutes les embûches qu’a dû surmonter son équipe, le bilan de Suzuki n’est pas immaculé. Ses réalisations sont néanmoins de taille. Les 25 buts et 65 points qu’il a déjà accumulés sont deux sommets personnels. Son différentiel, quoique peu reluisant à -12, est bien supérieur à celui de l’an dernier (-29). Match après match, il passe en moyenne 21 min 7 s sur la patinoire, dans toutes les phases du jeu. Seulement sept attaquants jouent plus que lui dans toute la LNH, toutes de grandes vedettes au demeurant.

Suzuki n’a peut-être pas encore atteint l’élite du circuit. Des ailiers de plus grande qualité et davantage de stabilité l’aideraient certainement à y parvenir. Il a toutefois démontré, à travers une adversité quasi indescriptible, qu’il pouvait être un excellent joueur, rendre ses coéquipiers meilleurs et s’affirmer, par-dessus tout, comme un meneur.

C’est une grande victoire, pour lui comme pour le Canadien. Peut-être même l’une des plus importantes de cette saison aux mille déceptions.

En hausse : Sean Farrell

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Sean Farrell

Probablement son meilleur match depuis qu’il s’est joint au Canadien il y a un peu plus de deux semaines. Il a joué avec confiance et a été envoyé sur la glace dans les derniers instants de la rencontre, au moment où son équipe tentait de créer l’égalité.

En baisse : Mike Hoffman

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Mike Hoffman

Il a remplacé Rafaël Harvey-Pinard au sein du premier trio. Ainsi, plutôt que de compter sur une bougie d’allumage à sa gauche, Nick Suzuki s’est retrouvé avec un éteignoir. Totalement désengagé, Hoffman semble compter les minutes avant la fin de la saison.

Le chiffre du match : 2

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Rem Pitlick (32) et Frédéric Allard (82)

Rem Pitlick a marqué grâce à un tir frappé des ligues majeures en première période. On le voit rarement décocher de tels boulets. On le voit rarement tirer tout court, en fait. Ce tir cadré était seulement son deuxième à ses huit derniers matchs. Ce fut d’ailleurs son unique tir de la rencontre.

Dans le détail

Allen était-il en mesure de jouer ?

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Jake Allen

L’organisation du Canadien ayant décidé de laisser Cayden Primeau aider le Rocket de Laval dans sa quête des séries éliminatoires, Jake Allen a accompagné le club à New York, alors qu’il était réputé être blessé au « bas du corps ». Or, était-il pour autant en mesure de jouer ? L’organisation soutient que oui, mais la situation n’est pas nette pour autant. Son dernier match remonte au 28 mars, à Buffalo, et il n’a pris part à aucun entraînement complet en avril. Mercredi, Allen a été le premier joueur à quitter la glace à l’entraînement matinal, une rareté pour un adjoint. Le soir venu, il n’a passé que quelques instants devant son filet pendant l’échauffement d’avant-match, quasi immobile dans son demi-cercle. Heureusement pour lui et pour son équipe, Samuel Montembeault a pu disputer la rencontre en entier. On peut d’emblée s’attendre à ce que le Québécois affronte les Bruins à domicile jeudi soir.

La glace est brisée pour Teasdale

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Joël Teasdale

En première période, Joël Teasdale est passé tout près de marquer le premier but de sa carrière dans la LNH, à son premier match de surcroît. Michael Pezzetta a intercepté une rondelle en zone adverse, et son tir a été bloqué par Ilya Sorokin. Teasdale a bondi sur le retour, mais son tir a frappé le poteau. Le Québécois a instantanément levé la tête de dépit. « Je n’étais pas dû ! », a-t-il lancé en riant après la rencontre. Teasdale s’est dit satisfait de cette première audition, ayant réussi à « garder les choses simples », comme il le souhaitait. Il s’est surtout démarqué en échec avant, distribuant notamment deux mises en échec. Son trio, avec Pezzetta et Chris Tierney, n’a pas eu la vie facile en début de rencontre, alors que l’entraîneur-chef des Islanders, Lane Lambert, n’a pas hésité à leur opposer ses deux premiers trios. Ça s’est traduit par deux buts des locaux. Les choses se sont toutefois rétablies pour cette unité en deuxième moitié de rencontre.

Les séries avant les séries

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L’ambiance au UBS Arena était survoltée, mercredi. Les Islanders avaient en effet besoin d’un seul point au classement pour assurer leur place en séries éliminatoires, après avoir raté le coche l’an dernier. L’amphithéâtre est déjà reconnu pour l’énergie qui l’habite ; celle-ci a été exacerbée, hormis peut-être durant un passage à vide, après que le CH eut égalé la marque au premier vingt. « C’était cool, c’était comme un match des séries, a résumé le gardien Samuel Montembeault. Ce n’était pas commencé que, déjà, c’était extrêmement bruyant. Même après leur quatrième but [en fin de troisième], ça n’a pas arrêté. C’était le fun. » Cette ambiance tranchait, notamment, avec les foules tristement silencieuses que le CH a croisées à Buffalo, à Philadelphie et à Toronto au cours des derniers jours. Les Islanders ne connaîtront que jeudi soir l’identité de leur adversaire du premier tour.

Ils ont dit

C’était un match de séries pour [les Islanders]. On était là. Ils menaient par un but en troisième période et on a gardé ça serré. Je suis fier des boys.

Martin St-Louis

L’amphithéâtre était bruyant et ça nous a donné de l’énergie. Cette atmosphère te donne le goût d’y participer [aux séries éliminatoires]. Ça n’arrivera pas cette année pour nous, mais j’espère que ça nous donnera l’appétit pour l’an prochain.

Martin St-Louis

On savait qu’ils avaient besoin d’un point pour accéder aux séries et qu’ils déploieraient beaucoup d’énergie. On a fait du bon travail pour leur tenir tête. C’était un de nos meilleurs matchs récemment. Je crois que les tirs ne démontrent pas la manière dont on a joué.

Nick Suzuki

[Sur mon but], je n’avais aucune idée que la rondelle était rentrée. J’ai juste essayé de la toucher avec mon bâton et de l’envoyer vers le filet.

Nick Suzuki

Frédéric Allard a joué un très bon match, Joël Teasdale aussi. Ses touches étaient excellentes. On sait qu’il est bon devant le but, il a presque marqué en première période. Il est bon pour faire avancer la rondelle. J’ai été bien impressionné.

Martin St-Louis

Ç’a donné une intensité au match, un petit boost, ça m’a donné des ailes. J’ai continué à faire exactement ce que j’ai fait dans cette présence : finir mes mises en échec, aller en échec avant. Ç’a donné de belles choses. 

Joël Teasdale, sur le fait d’avoir presque marqué en première période