Depuis le jour où il s’est joint au Canadien, pendant l’été 2020, Jake Allen n’a jamais caché à quel point il était un admirateur de Carey Price.

Lisez « Carey Price : une déclaration d’amour au hockey »

Ce qui était jadis l’adulation béate d’un jeune amateur de hockey – « je l’ai déjà vu dans un bar du centre-ville, mais j’étais trop gêné pour aller lui parler » – s’est transformé en relation de travail puis en amitié durable.

Il n’hésite donc pas à énumérer les qualités, d’abord humaines, qu’il reconnaît au numéro 31. Une « bonne personne », terre à terre, qui sait garder l’atmosphère légère afin que ses coéquipiers et lui n’aient pas à « porter tout le monde entier sur leur dos ».

Les racines de son admiration, toutefois, vont bien plus loin. Elles tirent leur source des prouesses de Price devant son filet, et ce, depuis aussi loin qu’Allen se rappelle.

« Il est un exemple pour tous les gardiens depuis son passage au Mondial junior en 2007 », a dit le vétéran lundi matin, quelques minutes avant la conférence de presse au cours de laquelle Price a fait le point sur son avenir.

« Il a établi la référence [gold standard] des 10 à 15 dernières années pour la technique des gardiens de but, a repris Allen. Beaucoup d’entraîneurs, de jeunes au hockey mineur et même de gardiens de la LNH ont imité des parties de son jeu. Il est tellement fluide [smooth] et rapide… Parfois, en voulant aller trop vite, on est partout à la fois. Lui se laisse atteindre par la rondelle, il est grand, sa posture en papillon est large… »

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Carey Price en avril 2022

Allen s’émeut encore davantage du fait que le jeu de Price n’ait « pas tellement changé » au cours des années, signe d’une fondation technique « incroyable ».

Ce qui impressionne particulièrement Allen, chez les grands gardiens de l’ère moderne – il cite en exemple Price, mais également Martin Brodeur, Henrik Lundqvist et Marc-André Fleury –, c’est justement leur longévité. « C’est ça, le plus dur », a-t-il estimé.

Exigeant

Cette longévité, toutefois, semble avoir un coût physique de plus en plus élevé pour les hommes masqués.

La position de gardien est, depuis toujours, la plus exigeante. Au cours des dernières années, nombreux sont ceux qui ont dû subir des interventions majeures dans la trentaine. Pensons à Pekka Rinne, Tuukka Rask et Robin Lehner, tous opérés aux hanches dans un passé récent. Sans oublier Price, hanté par ses genoux.

Les gardiens, a expliqué Allen, doivent s’adapter à des systèmes offensifs de plus en plus sophistiqués, « 10 fois plus imprévisibles qu’il y a 10 ans ». Ils n’ont d’autre choix que de « suivre le rythme ».

Chevilles, genoux, hanches, abdomen et dos en subissent les contrecoups, mais « c’est la tendance », reconnaît-il, se demandant si les jeunes joueurs ne devraient pas se tourner vers cette position plus tard dans leur cheminement. « Les enfants commencent à travailler comme des gardiens de la LNH à 10 ou 11 ans, ça les rattrape quand ils vieillissent » et s’approchent des rangs professionnels.

Le hockey n’est pas le seul à vivre cette réalité : au baseball, on ne compte plus le nombre de lanceurs qui, littéralement usés par trop de lancers, subissent une opération Tommy John (réparation ligamentaire du coude) dès l’adolescence, bien avant d’atteindre les Ligues majeures.

« C’est la réalité dans laquelle on est, a conclu Jake Allen. Je crois qu’on verra les gardiens jouer de moins en moins de matchs. Mais c’est seulement ma prédiction personnelle. À ce moment-là, je serai vieux et retraité. Mais je vois ça arriver. »