La bonne nouvelle, pour le Canadien, c’est que sa fiche sera réinitialisée… La mauvaise, c’est que la vraie vie commencera à ce moment-là. Et que les deux dernières colonnes pourraient tourner pas mal plus vite que la première.

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Le Tricolore s’est incliné par la marque de 5-4, mardi soir, devant les Sénateurs d’Ottawa. Le nombre de défaites en matchs présaison s’élève désormais à six… en autant de départs. Avec deux ultimes rencontres, qui seront disputées jeudi et samedi à Terre-Neuve et au Nouveau-Brunswick contre ces mêmes Sénateurs, le personnel d’entraîneurs commencera logiquement à resserrer quelques boulons. La formation a déjà été allégée de neuf joueurs mardi, notamment les attaquants Owen Beck et Brandon Gignac en fin de soirée.

Les expériences se poursuivent, évidemment, puisque ça reste toujours bien un camp d’entraînement et qu’il n’est pas officiellement terminé. En défense, sujet brûlant des derniers jours, les prochaines coupes seront lourdes de sens, avec plusieurs jeunes patineurs dans la course aux postes disponibles.

Certains éléments, toutefois, se précisent. Quelques indices de la vraie vie, celle d’après le camp.

En attaque, des duos se solidifient. La combinaison de Cole Caufield et Nick Suzuki va de soi. Christian Dvorak et Brendan Gallagher, qui n’ont pas joué mardi, devraient aussi passer du temps de qualité ensemble, a prévenu l’entraîneur-chef Martin St-Louis. « Kirby Dach, j’essaie de savoir qui on peut mettre avec lui », a-t-il ajouté. « Monahan aussi. »

Deux qui semblent drôlement s’aimer, c’est Jake Evans et Rem Pitlick. Avec Joel Armia, ils ont constitué l’unité la plus efficace du Tricolore, mardi, tenant en échec le principal trio ottavien et contribuant fort efficacement à l’attaque.

Comble de malheur, Armia n’a pu terminer la rencontre, après avoir été atteint à la main par un coup de bâton accidentel de Josh Norris. Emil Heineman s’est lui aussi blessé, et il n’est pas clair si les deux pourront s’envoler avec l’équipe mercredi.

La complicité entre Evans et Pitlick, toutefois, se passe de présentation. Les deux s’étaient déjà éclatés samedi dernier, contre ces mêmes Sénateurs. Et ils ont remis ça mardi.

« Je trouve qu’ils se complètent bien, a constaté Martin St-Louis. Jake et Rem ont toujours bien joué ensemble. Armia a un bon lancer, il est responsable et il apporte du poids. »

« Je pense que c’est quelque chose qui pourrait rester », a-t-il ajouté, sans égard à la blessure du Finlandais.

« On va aimer jouer ensemble »

Pitlick, lui aussi, se verrait bien faire un bout de chemin avec ces deux-là. Il connaît Evans depuis les rangs collégiaux et, déjà à l’époque, il reconnaissait ses talents de passeur, une qualité de « grande valeur » à ses yeux chez un compagnon de trio. Et Armia possède ce que les deux autres n’ont pas, soit un lancer lourd et de la robustesse. « On va aimer jouer ensemble », a prédit Pitlick.

Ce dernier, d’ailleurs, se révèle comme un des premiers gagnants de ce camp. Rien ne lui est encore acquis, mais il partait résolument de loin. Il y a une dizaine de jours, on le voyait lutter pour le poste de 14attaquant, une place peu enviable quand on sait que seulement 12 d’entre eux sont en uniforme pour un match.

« Les choses peuvent changer de tellement de manières ! », a-t-il lui-même abondé. La saison dernière, il semblait être tombé dans l’œil de Martin St-Louis. S’il parvient à se tailler un poste sur le quatrième trio, il pourra dire mission accomplie.

La chose n’est toutefois pas entendue. Car, on l’a déjà dit, il y a beaucoup, beaucoup d’attaquants encore avec le grand club. En comptant les blessés Armia et Heineman, ils sont encore 20. Un joueur de centre sera muté à l’aile. St-Louis n’a pas voulu le confirmer, mais Sean Monahan semble le candidat le plus probable.

Au moment de déterminer sa formation définitive, St-Louis aura donc un sérieux casse-tête à résoudre parmi ses ailiers. Pitlick pourrait être le choix facile pour une coupe. Sauf s’il réussit à faire ce qu’il n’avait pas encore fait jusque-là dans sa carrière : se rendre indispensable.

« Révision »

En défense, les expériences se poursuivront un peu plus longtemps. Une combinaison, peut-être la seule, qui semble toutefois la plus solide, c’est celle de David Savard et Kaiden Guhle.

Ce dernier a encore disputé un match convaincant, mardi. Une malchance survenue en fin de soirée – il n’a pas été en mesure de maîtriser une rondelle bondissante – a mené au cinquième but des Sénateurs. Mais il en faudra plus pour l’ébranler, a assuré son partenaire. Savard est allé le voir pour s’assurer que le jeune homme ne s’en faisait pas trop. Il a été rassuré.

« Il n’y a pas grand-chose à faire ou à dire, car il sait exactement ce qui s’est passé, a expliqué Savard. Un mauvais bond, ça arrive à tout le monde. Ça m’est arrivé et ça va m’arriver encore… »

« C’est juste plate quand ça arrive devant 20 000 personnes en fin de match ! », a ajouté le vétéran en souriant.

Les prochains matchs, Savard les voit comme la « révision » avant l’examen final. « On a encore une bonne semaine avant le match numéro 1 [de la saison], a-t-il souligné. On a appris quelque chose de nouveau chaque jour, ça en fait beaucoup en peu de temps pour les joueurs. Là, c’est la révision, il faut tout mettre ensemble. »

En hausse

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Joel Armia

Joel Armia

Son but, inscrit grâce à un tir d’une rare violence, est la raison pour laquelle les partisans enragent les soirs où le Finlandais est invisible. Un bon complément à Jake Evans et Rem Pitlick sur un trio défensif capable de générer un peu d’attaques.

En baisse

Juraj Slafkovsky

La marche était-elle trop haute ? Sa promotion sur le premier trio, dans un deuxième match en deux soirs, n’a pas marché comme souhaité. Quelques chutes et passes maladroites l’ont fait mal paraître.

Le chiffre du match

22 min 15 s

À son premier match hors concours, Nick Suzuki n’a pas chômé. En passant plus de 22 minutes sur la patinoire, il a été le joueur le plus utilisé du Tricolore, tout juste derrière… Juraj Slafkovsky !

Dans le détail

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La belle histoire d’Owen Beck à ce camp 2022 est terminée.

Beck et Gignac retranchés

La belle histoire d’Owen Beck à ce camp 2022 est terminée, mais il ne repartira pas les mains vides. Après le match, le Canadien a annoncé l’avoir retranché. Plus tôt dans la journée, l’équipe avait toutefois confirmé que Beck avait signé son contrat d’entrée dans la LNH. Le centre de 18 ans se rapportera maintenant à son club junior de Mississauga, dans la Ligue de l’Ontario (OHL). Choix de deuxième tour, Beck s’est démarqué au tournoi des recrues à Buffalo, et a continué à livrer de bonnes performances au camp. Il a toutefois été plus discret dans la défaite de mardi. Auteur d’une belle séquence avec Emil Heineman en début de match, on l’a ensuite moins vu, bien que ses salutations à l’intimidant Brady Tkachuk, en fin de deuxième période, soient dignes de mention. Un autre attaquant, Brandon Gignac, a également été retranché. Lui se rapportera au Rocket de Laval, avec qui il détient un contrat.

Le désavantage numérique, la priorité

Scène inusitée à l’entraînement mardi matin : Martin St-Louis a rassemblé ses hommes pendant une bonne demi-douzaine de minutes, afin de leur livrer une longue explication. L’entraîneur-chef avait tracé des traits sur la patinoire afin de diviser le territoire défensif, et y a ajouté des cercles afin d’enseigner une notion de positionnement. L’idée était de corriger des irritants en désavantage numérique, là où son équipe affichait un atroce taux de succès de 60 % en matchs préparatoires. Sauf qu’une fois le soir venu, le CH a eu à se défendre à court d’un homme une seule fois, en tout début de match. Trente secondes plus tard, l’infériorité numérique était déjà terminée, parce qu’Alex DeBrincat avait battu Samuel Montembeault avec un tir sur réception, résultat d’une passe transversale de Claude Giroux.

Une combinaison à surveiller ?

Parlant de ce duo… Pendant les 12 saisons complètes de Giroux à Philadelphie, aucun joueur n’a atteint les 40 buts. Voilà qu’à Ottawa, il est jumelé jusqu’ici à DeBrincat, qui a déjà atteint ce chiffre deux fois, et qui a seulement 24 ans. Or, le courant semble déjà passer entre les deux attaquants de petite taille. Après le but gagnant de DeBrincat en prolongation samedi, sur une passe de Giroux, le duo en a remis mardi, chacun marquant un but sur une passe de l’autre. L’unité Tkachuk-Norris-Batherson était déjà dangereuse l’an passé, mais l’arrivée de DeBrincat et de Giroux fait en sorte que les Sénateurs auront une deuxième unité tout aussi menaçante. Une bonne nouvelle pour les Ottaviens, car avec une brigade défensive suspecte et le gardien Cam Talbot blessé, les victoires de 2-1 pourraient être rares en début de saison…

Guillaume Lefrançois, La Presse

Ils ont dit

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Cole Caufield et Brady Tkachuk

Ça a bien été. Les premiers matchs dans la LNH ne sont jamais faciles. Je suis fier de lui. Il ne lâche pas, il tente des jeux simples. Il est costaud. Il va trouver des solutions.

Cole Caufield, au sujet de son association avec Juraj Slafkovsky

Avec un gars comme lui, il faut être prêt, la rondelle peut arriver à tout moment. C’est pourquoi c’est la Ligue nationale, c’était une passe… nationale ! Il n’a rien perdu. Il réussit des jeux comme ça à chaque présence.

Caufield, à propos de la passe de Nick Suzuki sur son but

On a bien joué en troisième période, on a fait une poussée. Même si on ne gagne pas, on s’améliore collectivement.

Kaiden Guhle

S’il m’avait demandé de me battre, au lieu de me sauter dessus, j’aurais pensé que c’était simplement un combat. Mais quand il m’a sauté dessus, j’en ai compris que c’était en lien avec [le tournoi des recrues à Buffalo].

Arber Xhekaj, au sujet de son combat avec Mark Kastelic

On voit à toutes les présences ce qu’il peut faire. Il a été dominant, il nous donne du momentum. Il est créatif avec la rondelle, il est responsable, c’est rare qu’il fait des erreurs qui vont coûter cher.

David Savard, au sujet de Nick Suzuki

C’est un compétiteur, il livre de bonnes batailles, il a beaucoup de courage. Tu sais ce que tu vas avoir à tous les matchs avec lui. Il est le fun à voir jouer.

Martin St-Louis, à propos de Rafaël Harvey-Pinard

Propos recueillis par Guillaume Lefrançois et Simon-Olivier Lorange, La Presse