Il y a un an, David Savard vantait le calme de Kaiden Guhle en possession de la rondelle, ainsi que son talent et son positionnement.

Vendredi matin, au deuxième jour du camp d’entraînement du Tricolore, les deux étaient de nouveau réunis dans un match intraéquipe. Le verdict du Québécois sur celui dont il est de 11 ans l’aîné ? « Il est encore plus calme avec la rondelle ! »

À la différence de l’an dernier, l’expérience a de bonnes chances de dépasser le camp et de se transposer dans la « vraie » saison, dans trois semaines.

À l’automne 2021, rappelons-le, Guhle avait laissé une forte impression, mais il avait finalement été cédé aux rangs juniors, où il s’est révélé un joueur dominant. Sa carrière junior terminée, la prochaine étape serait logiquement de passer à la Ligue américaine. Mais il pourrait bien ne jamais passer par Laval.

Les ouvertures en défense sont évidentes, encore davantage depuis la blessure au dos qu’a subie Joel Edmundson et dont on ne sait pas si elle sera guérie à temps pour le début de la saison.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

David Savard

Mais Guhle ne fait pas que combler un besoin. Son aisance sur la glace est flagrante – surprenante, même, pour un joueur de 20 ans. L’échantillon est limité, mais le match intraéquipe de vendredi a montré un jeune homme en plein contrôle de la situation, efficace dans sa zone et fluide avec la rondelle. Il a bien failli marquer, ce qui aurait donné le seul but du match, mais son lancer du poignet, décoché après une réception de rondelle en entrée de zone, a terminé sa course sur le poteau.

Repêché en 2020 par l’ancienne administration du Canadien, Guhle a débarqué au camp avec le sentiment de partir « de zéro ». Les actuels membres de la direction l’ont « peu vu jouer », a-t-il rappelé. Il aura fort à faire avant de s’adapter complètement à un rythme plus rapide, mais il se dit prêt à faire face. En dépit de ses 40 points en 42 matchs à son ultime campagne junior, il ne se voit pas comme un défenseur offensif à proprement parler, encore qu’il se dise prêt à se lancer davantage à l’attaque si on le lui demande.

Je peux jouer tous les styles. Je pense que je peux le faire.

Kaiden Guhle

À David Savard, on a demandé s’il s’attendait à voir son partenaire amorcer bientôt sa première saison dans la LNH. « J’aimerais ça ! a-t-il rétorqué. Il paraît bien sur la glace. C’est à lui de tenter sa chance, d’autant plus qu’il y a de la place. Ça va être le fun. »

Sans s’emballer, Martin St-Louis a salué la « maturité » de Guhle sur la glace, évoquant un joueur « intelligent » qui « lit » bien son partenaire. Il a « confiance » que le jeune homme « jouera dans la LNH », mais a précisé qu’il avait encore besoin d’encadrement.

Charge de travail

En plus du duo Savard-Guhle, Michael Matheson et Justin Barron sont eux aussi réunis dans une combinaison vétéran-recrue qui pourrait amorcer la saison ensemble. Les deux principaux duos de vendredi étaient constitués de Chris Wideman et Corey Schueneman et de Jordan Harris et Arber Xhekaj.

On commence déjà à en avoir beaucoup parlé, mais la jeunesse est très, très présente, notamment en raison de l’absence de Joel Edmundson.

Le Manitobain, une des pièces maîtresses de la défense, abattait du boulot considérable à forces égales et en désavantage numérique.

Tant qu’il ne sera pas revenu, David Savard verra inévitablement ses responsabilités augmenter.

En désavantage numérique, on peut même se demander qui sera en mesure de l’aider. Matheson n’a pas joué dans cette phase de jeu depuis deux ans. En 245 matchs dans la LNH, Chris Wideman a disputé un peu moins de 17 minutes à court d’un homme. Tous les autres contributeurs au désavantage numérique de l’an dernier sont partis.

Il n’est pas coutume de donner beaucoup de travail à des défenseurs recrues à court d’un homme – ils sont seulement sept à avoir passé au moins 1 min 30 sur la glace par match la saison dernière.

« Je pense que c’est à tout le monde d’embarquer et de se sacrifier pour l’équipe », a estimé Savard. Matheson a joué en désavantage numérique à ses premières saisons dans la LNH, chez les Panthers de la Floride.

Savard et Matheson sont d’ailleurs les deux joueurs que Martin St-Louis a identifiés comme étant les plus à même d’absorber la charge de travail de Joel Edmundson. « Savvy est arrivé en excellente condition physique au camp, je suis très impressionné, a-t-il dit au sujet du Québécois. Il va être une grosse partie de notre défense. »

À 31 ans, David Savard est le doyen des arrières de l’équipe. Comme l’avait fait Brendan Gallagher la veille, il s’est enthousiasmé d’avoir pu profiter d’un été complet de remise en forme, après une saison marquée notamment par des blessures qui lui ont coûté 20 matchs.

Vu l’intention des entraîneurs du CH de réunir une équipe qui sera résolument portée vers l’attaque, Savard a surtout misé sur du travail d’endurance cardiovasculaire plutôt que sur de la prise de force. Des « ajustements » à sa routine ont dû être apportés.

Il se dit prêt à reprendre le collier ; prêt aussi à jouer à temps plein le rôle de grand frère auprès de ses jeunes partenaires de jeu.

Ces derniers devront notamment apprendre « contre qui ils jouent ».

C’est ça, le plus gros ajustement. Tu n’as plus des juniors devant toi ; tout à coup, c’est Patrick Kane.

David Savard

« C’est des choses dont on va discuter en préparation aux matchs. Si je peux leur permettre d’éviter des choses qui m’ont donné l’air fou quand j’ai commencé, je vais le faire ! »

Il est, du reste, encouragé par l’attitude des jeunes loups qui l’entourent.

« Je vois leur volonté, la façon qu’ils ont de se préparer. Ils sont arrivés en forme au camp. Ils sont prêts à écouter. On va les aider, et ils vont s’améliorer vite. »

En bref

Evans déjà de retour

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jake Evans

Jake Evans faisait partie des invités surprises au sein de la liste d’éclopés annoncée jeudi, mais il n’a pas l’air d’un joueur qui s’absentera longtemps. Le centre était en effet à son poste vendredi et a participé à un des deux matchs intraéquipe du jour. Tout porte à croire qu’il n’a pas de contre-indication pour recevoir des mises en échec. Deux autres éclopés ont aussi foulé la patinoire, mais sans disputer les matchs simulés : Sean Monahan et Logan Mailloux. Le premier l’a fait avec un chandail identique à celui de ses coéquipiers, tandis que le second était encore vêtu de bleu poudre, ce qui suggère qu’il ne peut pas encaisser de contacts.

Doigt fracturé pour Roy

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Joshua Roy

De son côté, Joshua Roy était de retour dans l’action, après avoir raté le tournoi des recrues. L’attaquant s’est fracturé le petit doigt de la main gauche dans un match préparatoire avec le Phœnix de Sherbrooke. Il avait bon espoir de participer au tournoi des recrues à Buffalo, et s’était même pointé à Brossard avec sa valise, la semaine dernière. Mais l’équipe a préféré jouer de prudence et lui a demandé de rester au Québec. Roy a donc pris part aux exercices du jour à l’aide d’un gant spécial pour sa main droite, puisque son auriculaire et son annulaire étaient collés ensemble.

Comme le disait Joe Sakic…

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Le directeur général du Canadien, Kent Hughes

« La première moitié de ma carrière, j’ai dû prouver que j’avais ma place dans la LNH. Et la deuxième moitié, j’ai dû prouver que j’y avais toujours ma place. » Ces mots, ce sont ceux de Joe Sakic, légendaire ex-joueur des Nordiques de Québec et de l’Avalanche du Colorado. Dans le cadre d’une rencontre réunissant tous les joueurs invités au camp d’entraînement du CH, mercredi soir, le directeur général Kent Hughes a soumis cette citation aux joueurs en guise de motivation. Afin de rappeler à tous qu’au fond, rien n’est jamais acquis. Le message a été entendu : sans se consulter, trois joueurs ont prononcé ces mots devant les journalistes au cours des deux derniers jours. Au point où les membres des médias ont spontanément pouffé de rire lorsque Rem Pitlick a amorcé la citation. « Ah, vous l’avez entendue avant, hein ? », s’est amusé l’attaquant, lui-même loin d’être assuré d’un poste.

Dach fait bonne impression

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Kirby Dach

En regardant Kirby Dach, David Savard se rappelle Pierre-Luc Dubois, vu son grand gabarit et sa capacité à protéger la rondelle. Rem Pitlick, lui, s’émeut de son tir du revers, qu’il soupçonne d’être inspiré de celui de Patrick Kane. Kirby Dach a laissé ses coéquipiers admiratifs, vendredi, au terme du premier match intraéquipe. Le nouveau venu, acquis pendant l’été, a notamment marqué un but en tirs de barrage. Martin St-Louis, lui aussi, s’est dit « impressionné par la manière dont il se comporte sur la glace et par son niveau d’habileté ». Il a toutefois convenu que sa performance au cercle de mise au jeu devra s’améliorer.

Guillaume Lefrançois et Simon-Olivier Lorange, La Presse