(Trois-Rivières) Si vous songez à démarrer une franchise de sport professionnel au Québec, vous n’êtes pas obligé d’embaucher Mark Weightman. Mais ça ne nuirait probablement pas.

Celui qui est président et chef de la direction des Lions de Trois-Rivières a dressé, mardi, le bilan de la première année d’existence de la filiale du Canadien dans l’ECHL (voir autre texte).

En dépit des restrictions liées à la COVID-19, l’équipe a atteint sa cible en matière de ventes de billets et serait l’une des plus suivies de la ligue sur les réseaux sociaux. Weightman s’est aussi fait le porte-parole du propriétaire du club, le Terre-Neuvien Dean MacDonald, en se disant « très fier » des résultats obtenus en cette saison inaugurale, malgré la défaite crève-cœur subie au premier tour des séries éliminatoires.

Weightman est lui-même très impressionné par tout ce que l’organisation a accompli en 11 mois. Car le 10 juin 2021, a-t-il rappelé, étaient dévoilés le nom et le logo des Lions. C’est à peu près tout ce que possédait à ce moment le petit groupe de personnes qui travaillaient à la création de la nouvelle équipe, bien avant que les joueurs et les entraîneurs se joignent à l’aventure. Le grand patron de la franchise a le sentiment « d’avoir vécu trois années en même temps ».

C’est évidemment une bonne nouvelle pour les Lions. Mais quand on regarde le parcours de Weightman, ce n’est pas une surprise. Quand il a quitté le Groupe CH, en 2020, celui qui était président du Rocket de Laval et responsable des opérations de la Place Bell a laissé derrière lui une organisation en santé. Le club-école du Canadien a développé une marque distincte, adoptée par les amateurs de hockey de Montréal et de sa couronne nord.

Le voilà aujourd’hui associé, en plus de son rôle chez les Lions, à l’Alliance de Montréal, nouvelle franchise de la Ligue élite canadienne de basketball (LECB), qui disputera le premier match de son histoire au cours des prochaines semaines. Il y agit plutôt à titre de gouverneur, mais il n’en demeure pas moins que c’est une autre nouvelle équipe qui s’apprête à grandir sous ses yeux. « Un beau défi », résume le principal concerné en entrevue.

« C’est le fun de pouvoir modeler une équipe à ma manière, dit-il. Ça fait 27 ans que je suis dans le sport professionnel, j’ai vu des choses qui étaient bien faites, d’autres moins. J’ai aujourd’hui la chance de faire les choses autrement, de la façon que je crois être la meilleure. »

« En espérant que j’aie raison ! », ajoute-t-il en riant.

Moderniser, bâtir

Avec les années, Weightman s’est fait une spécialité des transformations organisationnelles. Il l’a fait à la fin de son règne chez les Alouettes de Montréal, équipe avec laquelle il a travaillé pendant deux décennies, montant les échelons jusqu’au poste de président, qu’il a occupé de 2013 à 2016.

Il a rempli le même genre de mandat avec le Linköping HC, en première division du championnat de hockey de Suède, « organisation un peu vieux jeu » dont il avait « modernisé l’approche business ».

Avec les Lions et l’Alliance, évidemment, Weightman n’est pas dans le siège de celui qui doit moderniser, mais plutôt bâtir.

À Trois-Rivières, il a priorisé une « vision régionale » : on se félicite du rayonnement dont a profité le club un peu partout au Québec, mais on a prioritairement développé le marché de la Mauricie.

Avec l’Alliance, le défi est tout autre. Souvent mal ficelées, les tentatives d’installer du basketball de haut niveau à Montréal n’ont encore jamais connu de véritable succès. Et on s’attaque surtout à un marché sportif monopolisé par le mammouth qu’est le Canadien. Comme la LECB est une ligue d’été, on déduit que la compétition viendra plutôt du CF Montréal et des Alouettes. Cela va toutefois beaucoup plus loin, nuance Weightman. La compétition, en réalité, vient de toute l’offre du divertissement. « Je pourrais faire la liste des festivals, mais je ne finirais jamais », illustre-t-il.

De quelle manière, dans ce contexte, peut-on convaincre les gens de dépenser les dollars qu’ils avaient prévus pour cette sphère de leur vie ?

Malgré l’immensité du marché, Weightman rappelle que l’industrie est au cœur d’un changement, depuis quelques années déjà, qui mise non plus sur les sollicitations de masse, mais plutôt sur des approches « chirurgicales ». Les bases de données en ligne, véritables mines d’or pour les promoteurs, permettent de cibler les partisans potentiels.

Il fut un temps où la seule façon de pousser une vente de billets, c’était de faire du bruit et d’essayer de se faire remarquer dans la foule. On n’en est plus là. Maintenant, on cherche à attirer l’attention des gens sans être sur la première page du journal.

Mark Weightman

Avec l’Alliance, on cherche d’une part à attirer les inconditionnels du basket qui n’ont jamais eu la chance de vivre leur passion à Montréal, et d’autre part à convaincre les curieux, partisans de sport ou non, qui voudront aller goûter à l’ambiance qu’on créera à l’Auditorium de Verdun, où le club jouera ses matchs locaux.

Peu importe la stratégie adoptée, l’objectif reste le même : « Lever la main plus haut que les autres pour se faire remarquer. »

L’histoire ne dit pas à quel type de succès goûtera l’Alliance de Montréal. Mais à la lumière de l’expérience du Rocket et des Lions, la recette Weightman semble fonctionner.