Reviendra ? Reviendra pas ? À domicile ? À l’étranger ? Tout de suite ? La semaine prochaine ? Quand ? QUAND ? Le psychodrame national entourant le retour au jeu de Carey Price pourrait bien tirer à sa fin.

Le gardien a voyagé avec l’équipe au cours de la dernière semaine, une première pour lui cette saison. Et si l’on se fie à son allure à l’entraînement, il a drôlement l’air d’un cerbère prêt à se mesurer à des tirs ennemis.

On suppose que c’est cette semaine que Price disputera enfin son premier match de 2021-2022, dix mois après son dernier, en finale de la Coupe Stanley, et neuf mois après avoir été opéré à un genou. On connaît désormais son histoire par cœur : sa rééducation postopératoire a été bien plus longue que prévu, d’abord en raison d’un passage au sein du programme d’aide aux joueurs de la LNH pour un abus de substances, puis à la suite de deux régressions dans ses tentatives de retrouver la forme.

À moins d’un revirement de dernière minute, cette fois-ci semble la bonne. Il a traversé toutes les étapes et touche plus que jamais au but. Le choix de sa date de retour est entre ses mains, a confirmé l’entraîneur-chef Martin St-Louis au cours du week-end.

La situation s’est légèrement embrumée, dimanche matin, lorsque le Canadien a rappelé Cayden Primeau du Rocket de Laval. Jake Allen s’est blessé au « bas du corps » en première période du match contre les Maple Leafs de Toronto, samedi, ce qui ouvrait parfaitement la voie à un duo Carey Price/Samuel Montembeault pour l’affrontement de lundi soir contre les Jets de Winnipeg au Centre Bell. A-t-on rapatrié Primeau parce que Price n’est pas tout à fait prêt ou en fait-on une simple police d’assurance ? On en saura davantage lundi matin.

PHOTO FRANK GUNN, LA PRESSE CANADIENNE

Jake Allen a été blessé en première période, samedi soir.

Ce qui est certain, que c’est que les signes encourageants ne manquent pas. Dans le plus récent épisode de la balado Sortie de zone, fruit d’une collaboration entre La Presse et le 98,5 FM, Stéphane Waite, entraîneur spécialisé de Price de 2013 à 2021 chez le Tricolore, a estimé que son ex-protégé était dans sa « dernière phase de préparation », alors qu’on lui confiait récemment le filet pendant « 75 à 80 % de l’entraînement ».

Réflexes

Va donc pour la fin des conjectures… pour l’instant. Si l’on semble en voie d’être fixés sur la date de son retour, toutes les hypothèses sont permises quant à sa performance en situation de match.

S’entraîner et retrouver la forme, c’est une chose. Mais retrouver tous ses repères dans le feu de l’action, c’en est une autre.

Aux yeux d’Amey Doyle, entraîneure des gardiennes de but chez les Martlets de l’Université McGill, le principal défi que doit relever un gardien après une longue absence est de suivre la rondelle des yeux – le puck tracking, en anglais. La circulation devant le filet, les défenseurs qui deviennent des écrans, les batailles pour la rondelle et l’intensité d’un match sont des éléments difficiles à recréer fidèlement à l’entraînement.

« Ce n’est pas la même chose de contrôler les retours quand il y a deux ou trois joueurs qui se jettent furieusement sur toi, illustre-t-elle. On dit toujours à nos gardiens qu’ils doivent voir la rondelle très grosse. Quand ça ne va pas bien pour eux ou que ça fait longtemps qu’ils n’ont pas joué, elle semble très petite et elle est plus dure à suivre. » Conséquemment, il est plus ardu d’attaquer l’avant du demi-cercle bleu avec agressivité.

D’une manière générale, le stress de bien faire les choses et le conditionnement physique peuvent aussi entrer en ligne de compte ; dans le cas spécifique de Carey Price, « il est tellement fort mentalement, je ne crois pas que ce sera un facteur », ajoute l’entraîneure spécialisée.

Stéphane Waite était aux premières loges lorsque Price a rebondi de sa saison 2015-2016, au cours de laquelle il avait été limité à 12 matchs par une blessure à un genou. Pendant l’été, ils ont travaillé ensemble à la préparation non seulement de la saison du CH, mais également de la Coupe du monde. Les deux hommes étaient alors membres de l’équipe canadienne, sacrée championne.

À l’époque, une fois sa blessure guérie, « on est revenus à la base, à tous les points de vue, sur le plan technique », explique le Québécois au téléphone.

Les deux ont également fait beaucoup de travail sur vidéo afin de renforcer « les raisons pour lesquelles il avait connu du succès ». Un gardien qui retrouve l’action, « c’est comme une page blanche, il n’a pas de mauvaises habitudes », estime Waite.

Pour lui, la technique et les automatismes sont les clés du succès. En plus, comme le souligne sa collègue, du timing à retrouver en match.

Précédents

Rares sont les cas de figure récents où des gardiens de ce calibre se sont absentés pendant une aussi longue période. Jonathan Quick a raté la majorité de la saison 2016-2017 en raison d’une blessure au « bas du corps ». La même année, Semyon Varlamov a été limité à 24 rencontres, et Jimmy Howard, à 26, en raison, respectivement, d’une opération à la hanche et d’une blessure au ligament collatéral médial.

En 2015-2016, blessé à l’abdomen, Mike Smith n’a disputé que 32 matchs et, en 2013-2014, Pekka Rinne n’a vu de l’action que 24 fois après avoir combattu une infection subséquente à une opération à la hanche.

En réalité, si l’on exclut les gardiens qui ont dû faire l’impasse sur une saison entière, comme Ben Bishop (genou) et Henrik Lundvist (cœur), le gardien numéro 1 ayant disputé le moins de matchs au cours d’une seule saison pour des raisons médicales est… Carey Price en 2015-2016.

Tous les gardiens énumérés ci-dessus, y compris celui du CH, sont revenus en force après une campagne tronquée par une longue convalescence. Rinne, notamment, avait terminé parmi les finalistes pour l’obtention du trophée Vézina. Tous, par ailleurs, étaient des vétérans établis. Du groupe, Price et Varlamov étaient les plus jeunes à 29 ans, derrière Quick et Rinne (31), Howard (33) et Smith (34).

Carey Price saura-t-il rebondir une seconde fois ? Ça reste à voir, mais les signes sont encourageants. Comme le Canadien est l’une des équipes de la LNH qui accordent le plus de tirs, les vrais tests devraient arriver bien assez vite.

Il semble que le suspense achève. Enfin.