Vous savez, la fameuse phrase « Riez-vous de moi ou avec moi ? ». Jeudi soir, on a entendu les deux possibilités, mais à la fin de la soirée, c’est avec Marc-André Fleury que les spectateurs du Centre Bell riaient.

Parce que c’est bien ce que ça vaut, une 500e victoire dans la Ligue nationale. Fleury est devenu le troisième gardien de l’histoire, après Patrick Roy et Martin Brodeur, à atteindre le chiffre magique. Les Blackhawks de Chicago l’ont emporté 2-0 sur le Canadien.

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Quelques hurluberlus ont bien tenté de déconcentrer le gardien de Sorel avec des « Fleeeuuuury » en début de match, rien n’y a fait. À la fin de la soirée, c’était plutôt des « Fleu-ry ! Fleu-ry ! » que l’on entendait au Centre Bell.

« C’est spécial. Je pensais vraiment que le monde me haïssait à Montréal !, a lancé un Fleury encore ému, après le match. Toutes les années, je me faisais crier après ou huer. Je ne joue jamais mes meilleurs matchs ici.

« D’avoir gagné cette 500e avec ma famille, mes amis dans l’aréna et l’accueil des fans, c’est chaleureux. Ça fait du bien. »

« Ça fait du bien », d’une part parce qu’il pouvait ainsi chasser le mauvais souvenir de ses dernières visites par ici. Souvenez-vous le fameux cadeau à Josh Anderson, pour permettre au Canadien de créer l’égalité à la toute fin du troisième match de la demi-finale le printemps dernier.

« Ça fait du bien » d’autre part parce que ça a permis à Fleury de cocher un item de sa liste des tâches.

« Je suis excité, a-t-il reconnu, en riant. Ça fait quand même un bout que j’y pense, peut-être une couple d’années. On dirait que c’est un chiffre que je me mettais en tête, que je voulais atteindre avant d’accrocher mes jambières.

« Je suis fier de moi, j’ai eu tellement de soutien de mes coéquipiers, des organisations, des entraîneurs des gardiens à travers les années, des fans, de ma famille, des amis… Tout le monde a toujours été là pour moi. Je suis content d’avoir réussi ça à Montréal. »

Sourire contagieux

Dans une saison où le Centre Bell a plus souvent eu l’air d’un salon funéraire que d’une institution du sport-spectacle, ça prenait bien le joueur le plus souriant de la LNH pour mettre un peu de plaisir dans la place.

Toute la soirée, Fleury souriait. Tantôt en jasant à Seth Jones après un arrêt de jeu, tantôt quand l’arbitre est venu chercher la rondelle après un arrêt de la mitaine contre Nick Suzuki. Sinon, c’était une tape derrière les fesses de son défenseur Calvin de Haan, qui venait de réussir un dégagement important pendant une infériorité numérique en début de match.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Son sourire est tel qu’il réussit même à corrompre Jonathan Toews, lui dont le surnom est « Captain Serious ». Remarquez que Toews venait aussi nous parler parce qu’il avait finalement marqué son premier but de la saison, à son 26e match. Ça n’a pas dû nuire !

« Je me souviens de quand il jouait à Vegas et à Pittsburgh… Moi, je suis toujours sérieux et je me force sur la patinoire. Lui, tu l’entends rire parce qu’il est relax et qu’il s’amuse.

« Ce n’est pas nécessairement le fun quand tu joues contre lui, a poursuivi le capitaine des Blackhawks. Mais notre équipe commence à trouver une chimie, et c’est rare que le gardien fait partie de cette camaraderie dans un vestiaire. À l’entraînement, il jase tout le temps et ça ajoute de l’énergie à l’équipe. »

Comme les joueurs, l’entraîneur-chef Derek King apprend lui aussi à connaître Fleury, à constater l’effet de ses larges sourires.

« Ça calme tout le monde. Il est dans la Ligue depuis longtemps, il bat des records et c’est un athlète de calibre mondial. Il est tellement calme. S’il ne se fait pas de soucis, alors pourquoi devrions-nous nous inquiéter ? »

Les nombreux partisans qui sont restés jusqu’à la fin sont repartis avec le sourire, même si l’équipe locale subissait une cinquième défaite de suite.

Il serait intéressant de savoir avec quoi Jeff Gorton est ressorti, lui. Au moment où le vice-président hockey du CH est en pleine réflexion au sujet de l’avenir de l’équipe, il y a sans doute des constats à tirer de ce qu’on a observé dans le camp adverse. Chicago a tenté une réinitialisation ces dernières années, et les acquisitions de Fleury et de Jones au cours de l’été devaient théoriquement accélérer le processus. Les résultats tardent à se faire sentir, mais les Blackhawks n’ont peut-être pas dit leur dernier mot.

S’ils reviennent dans la course, il faudra se rappeler de moments comme ceux de jeudi, ces moments où les joueurs se sont rassemblés autour d’un leader émotif. Gorton aura lui aussi des décisions à prendre à propos de ses leaders émotifs, et des épisodes comme ceux de jeudi nous rappellent que la valeur de ces joueurs ne se mesure pas toujours par de froids calculs de plafond salarial.

En hausse : Laurent Dauphin

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Laurent Dauphin et Dominik Kubalik

Il a préparé une des meilleures chances du Canadien en faisant une passe à Michael Pezzetta en milieu de match. Avec sa vitesse, il a aussi provoqué une punition et quelques pertes de rondelle des Blackhawks.

En baisse : Kale Clague

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Kale Clague

Si Dauphin saisit sa chance, on ne peut pas en dire autant de Clague. Sa pénalité a mené au premier but de Chicago et il a tendance à redonner la rondelle à l’adversaire.

Le chiffre du match : 22 : 51

C’est le temps d’utilisation de Nick Suzuki. C’est la deuxième fois en trois matchs qu’il excède les 22 minutes, un chiffre très élevé pour un attaquant.

Dans le détail

644 jours sans but pour Toews

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Jonathan Toews tente de sauter sur un retour d’arrêt de la part de Jake Allen.

Comme bien des gens chez les Hawks de Chicago en raison de l’affaire Kyle Beach, Jonathan Toews n’a pas très bien paru au cours des dernières semaines, aussi sur la glace, on va se le dire. Mais il a profité de ce jeudi soir magique au Centre Bell pour faire quelque chose qu’il n’avait pas fait depuis un bon bout de temps : marquer. En effet, son but, le premier des Hawks lors de ce match à la fois historique et mémorable, a été le premier de la saison pour lui, à son 26e match de 2021-2022, mais surtout son premier depuis le… 5 mars 2020, soit un peu avant que tous les arénas de la ligue ne soient fermés en raison de la pandémie. Il a bien sûr remarqué que tous les joueurs de son équipe avaient pensé à sauter sur la glace lorsqu’il a enfin pu mettre cette rondelle au fond du filet. « J’ai vu ça et je me suis dit que ce n’était sans doute pas un bon signe », a-t-il expliqué.

Une deuxième fois pour Ylonen

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Jesse Ylonen

On a vu passer bien brièvement Jesse Ylonen la saison dernière, le temps d’un seul match. La rencontre de jeudi soir au Centre Bell fut donc seulement la deuxième de sa carrière dans la LNH, et bien sûr avec le CH. Le jeune attaquant n’a presque pas joué (un peu plus de 7 minutes de jeu, seulement) et il n’a pas été en mesure d’écrire son nom sur la feuille de pointage. « Mais je me suis mieux senti cette fois que lors de mon match précédent avec le Canadien, a-t-il admis après la rencontre. J’ai joué en compagnie des gars du quatrième trio (avec Paquette et Pezzetta), mais ça ne me dérange pas. Je dois être en mesure de donner le meilleur de moi-même. Les Hawks jouent bien, ils jouent bien avec la rondelle aussi. C’est leur plus grande qualité et ce n’est pas facile de les affronter. »

Savard occupé

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David Savard

Quand un club en arrache comme vous savez qui, il n’est pas rare que certains joueurs se retrouvent dans la proverbiale « vitrine », expression scientifique et compliquée qui équivaut à parler du marché des échanges. Ainsi, notre œil de lynx a bondi de stupéfaction lors des trois derniers matchs, quand David Savard a été employé pendant au moins 23 minutes de jeu chaque fois (23 min 5 s jeudi soir, pour être bien exact). Évidemment, Dominique Ducharme ne peut faire autrement que de distribuer les minutes comme les tiges de tire Sainte-Catherine à l’Halloween, en premier en raison des nombreuses blessures, mais tout de même, tout cela est diablement intéressant. Ben Chiarot est le joueur qui a été le plus souvent employé jeudi, avec 23 min 13 s de temps de jeu, et lui aussi fait partie de ceux qui pourraient changer d’adresse lorsque la direction du Canadien avouera publiquement que l’exploit des Blues de 2019 n’arrivera pas chaque année.

Ils ont dit

Je sais que quand tu perds, ce n’est pas facile. Des fois, tu as juste le goût d’aller te changer, mais c’est vraiment gentil de leur part d’être resté.

Fleury, au sujet de David Savard, Mathieu Perreault et Chris Wideman, qui sont restés sur la patinoire pour féliciter Fleury

J’essayais simplement d’avoir le feeling, de visualiser d’avoir la rondelle autour du filet, d’être patient. Tu dois te visualiser en train de marquer de différentes façons. Je vais prendre le but, peu importe la façon.

Jonathan Toews, auteur de son premier but de la saison

On a joué un bon match, on s’est donné une chance, mais on n’a pas été travailler dans les endroits dangereux pour déranger Marc André (Fleury). Au moins il y a du positif. On a bien joué contre Tampa Bay, et cette fois, ça aurait pu aller d’un bord comme de l’autre. C’est dur de voir du positif, mais il y en a eu dans les deux derniers matchs.

Jonathan Drouin

Il y a des aspects positifs à notre jeu lors des derniers matchs… Il faut gagner nos bagarres individuelles et faire de bons jeux avec la rondelle. Il faut exécuter nos jeux.

Brett Kulak

Ils ont marqué en avantage numérique et leur deuxième but est survenu sur une erreur… À part de ça, à 5 contre 5, ça s’est assez bien défendu de chaque côté. J’ai aimé notre départ, on a eu un petit passage en première où on manquait d’exécution, on jouait est-ouest au lieu de jouer plus par en avant. On a eu quelques occasions, mais on aurait aimé en générer plus.

Dominique Ducharme