Les directeurs généraux aiment donner quelques jours de familiarisation à leurs nouveaux entraîneurs. Ils préfèrent aussi les embaucher à la veille d’un match plus facile, de façon à maximiser les chances de commencer du bon pied.

Chuck Fletcher a choisi de congédier Alain Vigneault le jour d’un match, lundi. Et l’adversaire n’avait rien de reposant : l’Avalanche du Colorado.

Mike Yeo a donc subi une défaite de 7-5 aux mains de l’Avalanche à son premier match derrière le banc des Flyers, dont c’était la neuvième défaite consécutive.

Les entraîneurs ont toujours une part importante d’imputabilité dans les insuccès d’un club, mais pour comprendre les problèmes des Flyers, retraçons le parcours de Fletcher.

Le fils du réputé Cliff Fletcher, un gestionnaire sur plusieurs décennies dans la LNH, était au goût du jour lors de son embauche avec le Wild du Minnesota, en 2009, à 42 ans. Il constituait une vedette montante dans le domaine de la gestion du hockey, après de nombreuses années à titre d’adjoint en Floride, à Anaheim et à Pittsburgh.

De mauvaises décisions

Fletcher s’est promis de reconstruire le Wild, exclu des séries lors de trois des cinq printemps précédents. Sa première décision d’importance, en février 2010, fut d’échanger un défenseur fraîchement repêché par l’équipe en première ronde, Nick Leddy, pour un défenseur un peu expérimenté, mais encore jeune, Cam Barker. Une catastrophe.

Barker a joué à peine un an et demi au Minnesota, avec des résultats désastreux, et il s’exilait en KHL en 2012. Il jouait à Rouen, en France, l’an dernier. Leddy a déjà 800 matchs au compteur.

En juin 2011, Fletcher décide de changer la dynamique du club. Il se départit de son meilleur défenseur, Brent Burns, alors âgé de 26 ans, pour obtenir trois pièces pour bâtir l’avenir du club : Charlie Coyle, Devin Setoguchi et un choix de première ronde, devenu Zack Phillips.

Setoguchi a duré moins de deux ans avec le Wild, Coyle est devenu un bon centre de troisième trio et Phillips n’a jamais atteint la LNH. Burns a connu cinq saisons de plus de 60 points à San Jose et il a remporté le Norris en 2017.

L’arrivée de Ryan Suter et Zach Parise en 2012, acquis au prix de 98 millions chacun pour 13 ans, a donné un élan au Wild et a permis à Fletcher de masquer ses mauvaises décisions.

L’acquisition du gardien Devan Dubnyk, un bon coup, il faut le souligner, a aussi aidé le Wild à connaître de bonnes saisons régulières entre 2014 et 2017, sans jamais toutefois franchir la deuxième ronde des séries.

L’acquisition des joueurs de location Martin Hanzal et Ryan White contre des choix de première ronde en 2017 et de deuxième ronde en 2018, a constitué un autre formidable coup d’épée dans l’eau.

Fletcher a été congédié en avril 2018 après une autre défaite en première ronde. Le noyau vieillissait et le Wild était déjà sur la pente descendante.

Une deuxième chance à Philadelphie

On ne reste néanmoins jamais trop longtemps sans emploi quand on jouit d’une bonne réputation, justifiée ou pas. Fletcher a été embauché à Philadelphie huit mois plus tard pour remplacer Ron Hextall, qui avait reconstruit cette formation à partir de zéro ou presque.

Fletcher héritait d’un noyau constitué de Claude Giroux, Sean Couturier, Jakub Voracek, Travis Konecny, Travis Sanheim et Ivan Provorov, avec, en coulisses, les jeunes Carter Hart, Morgan Frost et Joel Farabee à l’aube d’une carrière professionnelle.

Le travail de reconstruction n’était pas terminé, mais Fletcher, sans doute encouragé par un propriétaire pressé, a sorti le chéquier à nouveau.

En embauchant Alain Vigneault en avril 2019, il s’est chargé de lui donner un peu de renfort et d’expérience. Mais au prix, entre autres, d’un contrat indécent de presque 50 millions pour sept ans au centre Kevin Hayes, qui avait pourtant dépassé la marque des 50 points une seule fois en carrière. Dans la foulée, il a cédé des choix de deuxième et troisième ronde pour le défenseur de soutien Justin Braun.

Les Flyers ont raté les séries lors de deux des trois premières années du règne de Fletcher. Ils ont terminé au 19e rang du classement général l’an dernier, en raison, entre autres, des contre-performances du gardien Carter Hart, envoyé trop jeune dans la gueule du loup.

Des solutions à court terme

Afin de redresser la barre, Fletcher a opté pour des diachylons. Il a sacrifié des choix de première ronde en 2021 (13e au total) et deuxième ronde en 2023 pour le défenseur Rasmus Ristolainen. Il a donné deux jeunes joueurs, Nolan Patrick et Philippe Myers pour le défenseur offensif Ryan Ellis, 30 ans, et son contrat annuel de 6,2 millions pour les six prochaines années.

Patrick et Myers ne font rien qui vaille, mais Ellis, encore blessé, hypothéquera longtemps la masse salariale des Flyers. Ristolainen vient au quatrième rang en terme d’utilisation moyenne à 21:02. Il a cinq points en 21 matchs.

Et en dépit de toutes ces acquisitions, les Flyers se classent au septième et avant-dernier rang dans la section Métropolitaine (fiche de 8-11-4), à neuf points d’une place en séries et au 24e rang du classement général.

Embauché par ce même Fletcher, rappelons-le, Alain Vigneault est payé 5 millions cette année. Les Flyers lui devront 10 millions pour 2022-2023 et 2023-2024, à moins qu’il ne se trouve un job ailleurs dans la LNH d’ici là. L’argent ne change pas le monde, sauf que…

Un stage bénéfique pour Norlinder

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Mattias Norlinder

Mattias Norlinder se retrouvait donc à Laval mardi matin, à la pointe sur la première vague en supériorité numérique à l’entraînement. Ce choix de troisième ronde en 2019 devait en principe rentrer en Suède s’il ne parvenait pas à percer la formation à Montréal en vertu d’une entente entre la LNH et les équipes suédoises, mais comme la date butoir du 1er décembre est passée, le jeune homme de 21 ans pourra poursuivre son apprentissage dans la Ligue américaine pour le reste de la saison. C’est une formidable nouvelle pour son développement. Norlinder possède un beau potentiel offensif, mais il avait encore beaucoup de difficulté à s’adapter aux rigueurs du jeu nord-américain. Sa carrière aurait sans doute régressé en retournant en Suède, du moins se serait-il éloigné encore davantage de la LNH.

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