Jusqu’à quel point les matchs présaison doivent-ils être strictement considérés comme des joutes qui ne « comptent » pas ?

Par exemple, lorsque deux équipes déploient des formations au moins 90 % fidèles à celles qui amorceront la saison la semaine prochaine, doit-on considérer que l’étape des expériences se poursuit ou bien que le portrait se précise ?

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La question se pose réellement, car le Tricolore, dans une défaite de 5-4 en tirs de barrage, a éprouvé des difficultés inquiétantes sur le plan défensif face à une équipe qui ne sera certainement pas une puissance de la LNH au cours des prochains mois.

Alexander Romanov a rapidement fait oublier son début de match inspiré. Avec ses batailles perdues et ses couvertures vaseuses, il a sans doute poussé son partenaire Jeff Petry à allumer des lampions pour un retour à la santé rapide de Joel Edmundson.

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Nick Suzuki

Vétéran embauché pour son jeu défensif simple, mais efficace, David Savard cherche encore ses repères. Après avoir joué les mentors pour le jeune Kaiden Guhle depuis deux semaines, il évoluait cette fois à la droite de Ben Chiarot. Et ça n’a pas été un grand succès. Passes imprécises, rondelles perdues, positionnement pénible : les correctifs à apporter sont nombreux pour celui qui devait assurer de la stabilité au sein de cette escouade. La statistique très subjective des revirements doit toujours être prise avec un grain de sel : or, quand un joueur en cumule huit pendant un même match, il y a là une tendance.

On pourrait aussi parler de Chris Wideman, certes dynamique en avantage numérique, mais assurément vulnérable à cinq contre cinq. Le constat est encore plus brutal quand on sait qu’il n’a à peu près pas affronté les meilleurs joueurs des Sénateurs.

Lorsqu’on a demandé à l’entraîneur-chef Dominique Ducharme de fournir l’appréciation du travail de sa défense jeudi soir, la réponse n’a pas tardé à venir. Des éléments à resserrer, « il en reste en masse », s’est-il exclamé.

« Il y a du travail à faire, c’est officiel, a-t-il poursuivi. J’en ai parlé avec les joueurs. On met des choses en place, mais à un moment donné, il faut [les mettre à exécution]. À un contre un, on doit être beaucoup plus agressifs, plus dynamiques, tuer des jeux, gagner les batailles… »

Et de répéter : « On a du travail. »

Le constat est sévère, mais réaliste. Car avec le meilleur joueur défensif du club qui est au rencart pour au moins un mois – au cas où, précisons qu’on parle ici de Carey Price –, le choc pourrait être brutal lorsque les Maple Leafs de Toronto libéreront leur attirail offensif, le 13 octobre.

Jeff Petry a parlé d’une nécessaire « courbe d’apprentissage » pour une escouade dont quatre des six membres en uniforme jeudi ont peu (Romanov, Brett Kulak) ou pas (Savard, Wideman) joué avec le CH pendant les dernières séries éliminatoires.

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Josh Anderson et Jeff Petry

« Je sais que Luke [Richardson, entraîneur des défenseurs] va s’assurer que nous sommes tous sur la même longueur d’onde », a ajouté le numéro 26.

La bonne nouvelle, c’est qu’il reste cinq journées avant ce fameux match à Toronto. Ainsi que trois entraînements complets pour peaufiner des détails. C’est toujours ça de gagné.

Poehling « correct »

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Ryan Poehling

Dans un autre ordre d’idées, souhaitons à Ryan Poehling de ne pas compter sur les commentaires publics de son entraîneur pour flatter son ego, car le chaleureux « correct » que Ducharme a utilisé pour qualifier sa performance de jeudi n’a pas été suivi d’un long développement.

Disputant un cinquième match hors concours, l’Américain de 22 ans a mieux fait que lors des rencontres précédentes. Il est passé bien près d’inscrire son premier but des matchs présaison en forçant le gardien Anton Forsberg à effectuer un bel arrêt après avoir foncé vers lui tel un train au sortir du banc des punitions.

N’empêche, dans ce match ponctué de nombreuses pénalités, Poehling a passé trois de ses dix minutes et demie de temps de glace en infériorité numérique, phase de jeu où il a plutôt bien fait, d’ailleurs. Il n’était sur la glace que pour le deuxième but de Josh Norris dans ces circonstances, et pour être honnête, la faute revient davantage à Alex Belzile qui a envoyé une passe à l’aveuglette en plein centre de sa zone.

Ducharme a parlé d’un match « bizarre » pour évaluer des joueurs qui tentent de se tailler un poste avec l’équipe. En outre, le personnel d’entraîneurs voulait gérer son banc « comme dans un match de saison pour que nos gars puissent trouver leurs repères ». Il a néanmoins précisé que Poehling avait « quand même bien fait » en désavantage numérique.

Pas de quoi réchauffer le cœur de qui que ce soit. Mais si le résultat final est que Poehling a gagné sa place avec le Canadien, il ne se plaindra certainement pas de l’absence de superlatifs.

Les décisions de Ducharme et de ses adjoints quant à la composition finale de la formation du début de saison devraient être dévoilées assez rapidement, alors que l’équipe tient une journée d’activités de groupe ce vendredi.

Dans le détail

Drouin malade

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Jonathan Drouin, le 27 septembre dernier

Jonathan Drouin n’a pas participé au match en raison d’un virus. L’attaquant était attendu à la gauche de Christian Dvorak et Josh Anderson, mais il a commencé à se sentir mal après la rencontre d’équipe d’avant-match. « Aujourd’hui, avec ce qui se passe : un petit rhume, et on ne court pas de risque. Et si une gastro commence à se promener, ce n’est pas le fun non plus, à quelques jours du début de la saison », a rappelé Dominique Ducharme. Son absence a donc valu un match inespéré à Artturi Lehkonen, et dès la 10e seconde, sa petite redirection en zone neutre a servi à préparer le but de Josh Anderson. Une curiosité : Lehkonen a été appelé à prendre cinq mises en jeu, dont deux à quatre contre quatre, puisqu’il formait un duo avec Anderson. Au cours de toute la saison dernière, il n’en avait pris que 13.

Kulak et les unités spéciales

PHOTO PAUL CHIASSON, LA PRESSE CANADIENNE

Brett Kulak face à Tim Stützle

Brett Kulak rend de fiers services au Canadien comme défenseur de profondeur depuis quelques années, mais le fait qu’il joue exclusivement à cinq contre cinq n’aide en rien sa cause. Jeudi, il a eu droit à quelques présences en désavantage numérique par la force des choses, essentiellement parce que David Savard avait écopé de deux pénalités. Kulak a donc eu droit à 1 min 53 s de jeu à quatre contre cinq. Et les Sénateurs ont marqué deux fois pendant ces 113 secondes ! Le numéro 77 n’est pas directement responsable, cependant. Dans les deux cas, les tirs venaient de loin, de zones normalement défendues par des attaquants. Mais sur le premier (de Josh Norris), c’était le chaos en zone du CH dans les secondes qui ont précédé le but, et on devine que Jake Allen devait commencer à pomper l’huile. Dans tous les cas, ces deux buts nous ont aussi rappelé que Savard devra faire preuve de discipline cette saison, sans quoi le CH sera démuni à court d’un homme.

Pinto en voiture

PHOTO JEAN-YVES AHERN, USA TODAY SPORTS

Shane Pinto (12)

Shane Pinto ne semble toujours pas rattrapé par la réalité de la LNH. Productif à sa sortie du collège la saison dernière (7 points en 12 matchs en fin de saison à Ottawa), Pinto s’est démarqué au camp des recrues et continue à le faire contre des joueurs de la LNH. Le voici avec 4 points en 4 matchs préparatoires, grâce à un but marqué après qu’il eut battu de vitesse Alexander Romanov. Ce 32e choix au total en 2019 pourrait finir par hanter les équipes qui l’ont boudé en fin de premier tour cette année-là… « Il a été le meilleur joueur au camp des recrues et il est encore bon, a rappelé l’entraîneur-chef des Sénateurs, D. J. Smith. Il a été bon du début à la fin. […] Son potentiel est illimité. On ne veut pas trop lui en donner, mais il joue très bien, il protège la rondelle, joue de grosses minutes et prend de grosses mises au jeu. Pour un joueur qui n’a joué que 12 matchs dans la LNH, il se débrouille très bien. »

En hausse : Ryan Poehling

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Ryan Poehling, du Canadien, à la mise en jeu

Sans être la grande étoile de ce match, il a affiché une fougue et une efficacité qui avaient fait défaut jusque-là au camp d’entraînement. Sera-ce assez pour lui assurer un poste ?

En baisse : David Savard

PHOTO PAUL CHIASSON, LA PRESSE CANADIENNE

David Savard (58) rate sa mise en échec contre Tim Stützle.

Conclusion d’un calendrier préparatoire très pénible pour le défenseur québécois. Il a déjà avoué avoir besoin de temps pour s’adapter au système de jeu du CH. Il lui en faudra encore un peu. Considéré comme l’auteur de huit (!) revirements.

Le chiffre du match

6 min 37 s

C’est le temps de glace de Jesse Ylönen. Pour un attaquant qui souhaitait se démarquer, à plus forte raison au tout dernier match hors concours, ce n’est pas une très bonne nouvelle.