Ryan Poehling a donné une entrevue fort éclairante à Grant McCagg, du site recrutes.ca, il y a quelques jours.

Le premier choix du Canadien en 2017 semble avoir compris qu’il doit travailler plus fort pour s’établir dans la Ligue nationale de hockey et que son avenir à Montréal ne se trouve pas nécessairement à la position de centre.

McCagg a été recruteur pour le Canadien de 2009 à 2011. Il offre aussi du contenu journalistique depuis quelques décennies. Il s’est lancé récemment dans une série d’entrevues avec les espoirs du Tricolore et leur soutire d’étonnantes confidences.

Une carrière tient souvent à un fil, surtout à cet âge. Certains vont blâmer l’entraîneur et l’organisation, d’autres font un examen de conscience. On vous laisse deviner lesquels percent.

Si Poehling s’entraîne aussi fort qu’il le dit et se sert de son exclusion en séries éliminatoires comme d’un facteur de motivation pour la suite, le Canadien retrouvera le jeune joueur dont il rêvait.

« Je ne sais pas si je méritais [au moins] un match ou pas, mais j’étais frustré, a-t-il confié à Grant McCagg. Cet épisode m’aidera à grandir. Je prends la saison morte plus au sérieux que par le passé, c’est une bonne chose. Je veux être prêt pour le camp et leur faire savoir qu’ils peuvent compter sur moi à l’avenir. Je veux qu’ils reprennent confiance en moi. »

Tout s’est écroulé pour Poehling le 18 septembre 2019. La veille, il avait été l’un des meilleurs joueurs de son équipe, entre Nick Cousins et Alex Belzile, lors du match préparatoire contre les Panthers de la Floride.

En troisième période, il a intercepté une passe en zone défensive lors d’une infériorité numérique. Il s’est moqué du défenseur Aaron Ekblad avant d’effectuer une passe parfaite à Belzile, seul à l’embouchure du but. Le Canadien prenait l’avance et n’allait pas la perdre.

Revoyez le jeu de Poehling en match préparatoire.

Il confirmait encore davantage son talent et sa place avec l’équipe. Rappelons-nous. Il avait été choisi joueur par excellence au Championnat du monde junior, grâce à huit points, dont cinq buts, en sept matchs, et a marqué trois buts à sa seule partie avec le Canadien, contre Toronto, en fin de saison. Sa performance lui avait même valu une invitation au tournoi de golf du Caandien avec les vétérans.

À cette étape du camp d’entraînement, Nick Suzuki constituait encore un projet intéressant destiné à entamer la saison avec le Rocket de Laval. Jesperi Kotkaniemi semblait chercher ses repères malgré un gros été d’entraînement.

Mais Poehling avait aussi subi une violente mise en échec au cours de ce match et on allait nous annoncer sa mise à l’écart pour une période indéterminée.

« Jouer à l’aile ne me fera pas mal »

Quand il a recouvré la santé, les jeux étaient faits. Kotkaniemi avait retrouvé un certain aplomb, et Suzuki s’était révélé. Poehling a été renvoyé dans la Ligue américaine à l’aube de la saison. Il n’a pas caché sa déception, et a avoué aussi que la commotion cérébrale, sa première, lui avait fait très peur. « Les trois ou quatre premiers jours, je ne me sentais pas moi-même », a-t-il confié aux médias montréalais.

Certains jeunes peuvent s’ajuster aux imprévus. Poehling ne l’a pas fait. Pendant que Suzuki montait en grade à Montréal, l’Américain s’enlisait.

Quand la pandémie a frappé, en mars, Poehling se trouvait mis de côté en raison d’une blessure, à Laval. Il avait amassé seulement 13 points, dont 5 buts, en 36 matchs dans la Ligue américaine, et 2 maigres points en 27 rencontres avec le Canadien.

Sa prise de conscience n’avait pas encore commencé. Il a pris les choses à la légère pendant la pause et l’a avoué subtilement à McCagg.

« Au début de la pandémie, je ne savais pas trop ce qui allait se passer. Nous étions en confinement, alors j’ai choisi de m’installer en Floride pendant deux mois. La température était agréable alors qu’il faisait encore froid au Minnesota. Quand, finalement, j’ai réalisé que le hockey allait reprendre, je suis rentré au Minnesota et je me suis entraîné six semaines avant de rejoindre l’équipe. »

Poehling a été le seul attaquant du Canadien invité à Toronto à ne pas jouer un seul match en séries éliminatoires. On lui a préféré Dale Weise, Jordan Weal, Alex Belzile, Jake Evans et Charles Hudon.

J’ai patiné beaucoup plus durant la saison morte afin d’améliorer mon explosivité. De plus, je pèse désormais 210 livres [10 de plus que lors du camp d’entraînement en 2019], ça devrait m’aider dans les coins de patinoire.

Ryan Poehling

Cette dernière déclaration est révélatrice. Explosivité et travail dans les coins. Des qualités importantes pour un… ailier. Poehling a sans doute compris à quelle position il aurait les meilleures chances de succès à Montréal.

Suzuki et Kotkaniemi ont consolidé leur place au sein de trios offensifs. Phillip Danault a encore un contrat pour un an, et la direction de l’équipe fera tout pour le garder. Le centre pourrait donc être bloqué pour au moins six ans. Et Poehling n’a sans doute pas envie de devenir un autre Kyle Chipchura au sein d’un quatrième trio.

« Ça serait incroyable [de jouer sur un trio avec Suzuki ou Kotkaniemi], a-t-il admis. Tous deux sont d’extraordinaires joueurs et de chics types. Je ne peux pas prédire l’avenir, mais si on me demande de jouer à l’aile, je le ferai. Jouer à cette position ne me fera pas mal. »

Le centre est bouché. L’aile droite aussi, avec Brendan Gallagher, Tyler Toffoli et Josh Anderson sous contrat pour encore plusieurs saisons, et l’arrivée possible de Cole Caufield.

L’aile gauche ? Il y a Jonathan Drouin. Tomas Tatar pour un an, probablement pas plus. Paul Byron, un joueur à caractère plus défensif. S’il y a une place à saisir, c’est celle-là. Marc Bergevin et Claude Julien ne cracheraient pas sur un attaquant de puissance de 6 pieds 2 pouces et 210 livres, si Poehling retrouve sa superbe.

Poehling ne manque pas d’exemples positifs. À commencer par son pote Kotkaniemi, dont la transformation soudaine a renversé bien des observateurs en séries éliminatoires.

Les réponses ne sauraient tarder, si le camp d’entraînement commence dans quelques semaines, comme on l’espère tous…

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