Décidément, la semaine de relâche du Canadien promet d’être intéressante. On aura en effet une bonne idée de la direction que voudra prendre Marc Bergevin avec son équipe.

Les hommes de Claude Julien avaient une dernière chance, cette semaine, de s’accrocher en attendant le retour des blessés. L’occasion était belle, après les deux victoires de samedi et de lundi : mercredi contre les Blackhawks et leur défense décimée, jeudi contre des Flyers qui connaissent des hauts et des bas, et samedi contre des Golden Knights en pleine tourmente.

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La marge de manœuvre était toutefois inexistante, et avec cette défaite pas très chic de 4-1 aux mains des Blackhawks, on voit mal comment un DG responsable pourrait faire la sourde oreille à des équipes à la recherche de renfort.

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Corey Crawford et Nick Suzuki

Les options, elles sont connues. Nate Thompson, Ilya Kovalchuk et Marco Scandella comme joueurs de location, puisque leurs contrats expirent dans six mois. Sinon, pour un retour nettement plus substantiel, Jeff Petry et Tomas Tatar sont deux joueurs beaucoup plus productifs, qui ont chacun une année supplémentaire de contrat.

Que ça arrive à la relâche ou dans un mois, il y aura du mouvement. C’est ce qui arrive à des équipes condamnées en avance à rater les séries, et ça l’est encore plus quand ladite équipe en sera exclue pour une troisième année de suite, avec un noyau qui se ressemble.

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Charlie Lindgren

Quand de tels changements surviennent, c’est l’occasion pour d’autres de prendre plus de place, de devenir des meneurs de l’équipe. Nick Suzuki, Jesperi Kotkaniemi et Ryan Poehling ont de bonnes chances de faire partie de ces meneurs un bon jour. Mais ils sont encore à un âge où le commun des mortels vit en colocation et se nourrit de pizzas-pochettes. Ils ont besoin de temps, autant sur la patinoire qu’à l’extérieur.

Le cas Domi

Max Domi en est un qui aura donc une belle occasion de prendre du galon. Pour y parvenir, il devra toutefois prendre des décisions plus éclairées que celle qu’il a prise mercredi en deuxième période.

Avec son équipe en retard 2-1, il s’est mis à se chamailler avec un joueur marginal du camp adverse, Matthew Highmore, derrière le jeu. Les arbitres l’ont puni et 35 secondes plus tard, les Blackhawks marquaient.

Julien n’a pas apprécié et lui a envoyé deux messages plutôt qu’un. Le premier en le clouant au banc, même pendant un avantage numérique. C’est donc dire que sur l’unité au sein de laquelle il joue habituellement, on retrouvait Shea Weber, Ilya Kovalchuk, Nick Cousins, Jordan Weal et Artturi Lehkonen. Tout ça avec la chance de resserrer l’écart à un but, avec 25 minutes à écouler au match.

« Claude ne m’a rien dit, mais quand t’écopes d’une pénalité et que ça nous coûte un but… Je ne peux pas faire ça. C’est la décision de l’entraîneur, je la respecte, c’est le patron », a dit Domi.

Si ce premier message n’était pas assez clair, Julien en a rajouté une couche en point de presse.

« J’ai fait ce que j’avais à faire, je n’ai pas d’explication additionnelle à donner, a dit Julien, avant de justement donner une explication additionnelle.Ce n’est pas la première fois qu’il écope d’une mauvaise punition, il y a des conséquences. Parfois, le message date de plus longtemps que ce cas en particulier. Ça importe peu qui on envoie à la place de Max, ce n’est pas comme si c’est lui qui marque chaque fois [en avantage numérique], c’est une unité de cinq joueurs. C’est aussi simple que ça. »

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Drake Caggiula et Jesperi Kotkaniemi

Ironiquement, cette situation est survenue à l’occasion de la visite des Blackhawks, qui aurait dû marquer le retour à Montréal d’Andrew Shaw. Une commotion tient toutefois l’ancien du CH à l’écart du jeu.

Au fil des ans, avec une fougue qui s’apparente à celle de Domi, Shaw est devenu un pilier de ses équipes, à Chicago comme à Montréal. Domi a l’énergie pour devenir le meneur émotif qu’était Shaw et en plus, la vie l’a doté d’habiletés supérieures. Il pourrait donc accomplir ce boulot tout en amassant une soixantaine de points par année. Son contrat sera à renégocier cet été, et dans l’univers du plafond salarial, le contrat fait partie de ces éléments qui établissent le statut d’un joueur.

L’occasion est belle pour le numéro 13 du CH, pour peu que des situations comme celle de mercredi ne se reproduisent pas. La décision de Julien de le clouer au banc était peut-être discutable, mais la faute de Domi qui a mené au troisième but des Blackhawks ne laissait aucun doute.

Sa capacité à prendre ses responsabilités au cours des prochains mois pourrait dicter en grande partie son statut au sein de l’équipe.

Armia dans l’avion, Peca à Laval

Joel Armia devait finalement accompagner ses coéquipiers dans l’avion vers Philadelphie, tard mercredi. Le CH y affrontera les Flyers jeudi, et un retour d’Armia n’est donc pas à exclure. L’équipe a aussi annoncé le renvoi de Matthew Peca à Laval. Peca était le seul réserviste en santé à l’attaque chez le Tricolore. Un indice de plus qu’Armia est prêt.

Dans le détail

Une menace nommée Zack Smith

Le matin des matchs, Claude Julien a l’habitude d’identifier les joueurs adverses susceptibles de « causer du dommage » à son équipe. Avant la rencontre contre les Blackhawks, les noms de Patrick Kane et de Jonathan Toews ont donc été évoqués. Mais comment oublier Zack Smith ? Le match n’était même pas vieux de 9 minutes que l’attaquant de soutien des Blackhawks avait marqué deux buts, doublant du coup sa production jusqu’ici cette saison. Son premier but a été rendu possible après une confusion flagrante entre le gardien Charlie Lindgren et son coéquipier Tomas Tatar. Ce dernier, en avantage numérique, semblait sur le point de cueillir la rondelle derrière son filet, mais Lindgren a semblé surpris de son passage… et du fait que la rondelle demeure à ses pieds. Drake Caggiula en a profité pour la récupérer et la remettre à Smith, qui a marqué dans un filet abandonné. « Je vais devoir revoir la séquence, mais c’est le genre de but qu’on peut éviter, a dit Lindgren. Il y a eu un manque de communication. J’en prends la pleine responsabilité. »

« Un match bizarre »

Le même Lindgren a trouvé les mots justes en affirmant à quel point c’est un « match bizarre » qui a été disputé au Centre Bell. On a pu le constater une fois de plus sur le troisième but des Hawks. Au cours d’un désavantage numérique, le gardien a perdu son bloqueur pendant une mêlée près de son filet. Le jeu s’est néanmoins poursuivi – les arbitres sont tenus de siffler seulement si le gardien perd son masque – et le pauvre Lindgren a tenté de protéger sa main nue comme il le pouvait, mais Alex DeBrincat a marqué. Lindgren a semblé perplexe, mais n’a pas tenté de remettre en doute le jugement des arbitres. « Selon ce que j’ai compris, ils auraient sifflé si on avait eu la pleine possession de la rondelle ou si on était sortis de notre zone, a-t-il dit. Évidemment, c’est étrange de jouer sans une pièce d’équipement, mais c’est comme ça. » Claude Julien a tenu essentiellement le même discours, ajoutant toutefois « qu’il faudra regarder [le règlement] de plus près à un moment donné ». « Pour tous les gardiens, le masque est important, les gants aussi », a-t-il précisé.

Avantage numérique en panne

Il y a bien des choses qui ne fonctionnent pas bien chez le Canadien en ce moment. La pire d’entre elle est probablement l’avantage numérique. Avant le 31 décembre, le Tricolore faisait très bonne figure à ce chapitre, avec une efficacité de 24,3 % en 39 matchs, une performance qui le plaçait au sixième rang de la ligue. Depuis le match en Caroline, le 31 décembre, c’est une véritable catastrophe : seulement 2 buts en 29 occasions réparties sur 9 rencontres, soit un rendement de 6,9 %, au 31e et dernier rang du circuit. Ça s’est encore très mal passé mercredi, au point où l’unité de désavantage numérique des Blackhawks n’a enregistré qu’un tir de moins (4) que l’attaque à cinq du Canadien (5). L’ajout d’Ilya Kovalchuk, pourtant réputé être un spécialiste en telle occasion, n’a résolument pas eu l’effet escompté. « C’est juste une question de cohésion, a analysé Phillip Danault. L’exécution, les passes sur le ruban, c’est ce qu’on ne fait pas en ce moment. »

Ils ont dit

Notre gardien a bien joué, on aurait aimé être meilleurs pour lui. Tout le monde veut gagner. Ce n’est pas facile.

Max Domi

Ce n’est pas plaisant de perdre. Je suis frustré, comme tout le monde dans ce vestiaire. J’ai perdu trois matchs de suite, j’espère que le vent va tourner à la prochaine occasion.

Charlie Lindgren

Le hockey de rattrape, à un moment donné, ça nous rattrape nous-mêmes. C’est quelque chose qu’il faut éviter. Il faut apprendre à jouer le match en entier.

Phillip Danault

On n’était pas là du tout. On a perdu des bagarres, des rondelles libres, on a pris des mauvaises décisions. On ne méritait pas ce match-là du tout.

Claude Julien

C’est probablement le pire match depuis les 10 derniers. Ça arrive de temps en temps, ça ne veut pas dire que c’est acceptable et que je l’accepte. Je suis extrêmement déçu de notre performance ce soir.

Claude Julien

Les pièces d’équipement [d’un gardien de but] sont importantes, surtout quand un gars attend pour tirer sur réception de l’enclave.

Claude Julien sur le troisième but des Blackhawks

— Propos recueillis par Simon-Olivier Lorange et Guillaume Lefrançois

En hausse: Jeff Petry

Depuis qu’il est jumelé à Marco Scandella, son jeu s’est stabilisé. C’était encore le cas mercredi.

En baisse: Jordan Weal

Après avoir disputé le match d’une vie lundi, il est retombé sur terre. Quelques bons moments en début de période, mais sa bourde en troisième période a scié les jambes de ses coéquipiers.

Le chiffre du match: 6-0-2

C’est la fiche de Corey Crawford au Centre Bell depuis le début de sa carrière.