(Voorhees, New Jersey) La première chose qui frappe quand on voit arriver le nouveau Michel Therrien, celui qui porte dorénavant un survêtement noir orné du logo des Flyers, c’est le sourire. Parce qu’il s’agit du sourire d’un homme détendu, heureux, qui se plaît dans son nouveau rôle, dans sa nouvelle ville, dans sa nouvelle vie.

« Michel, il se sent bien en ce moment », résume son ami Alain Vigneault, qui est l’entraîneur-chef des Flyers, mais qui est avant tout le pote qui lui a passé un coup de fil afin de lui offrir cette place à ses côtés.

En effet, Michel Therrien ressemble à un gars qui se sent bien dans son nouveau rôle d’assistant. À peine quelques minutes en sa compagnie, et on le sent léger, probablement plus léger qu’il ne l’avait été depuis bien longtemps.

« Je suis un gars qui aime avoir beaucoup de plaisir, confie-t-il après l’entraînement des Flyers. J’aime ça, avoir du fun avec le groupe. Je sais très bien que les gens ont une autre image de moi… mais je suis un assistant, maintenant, et je veux que l’équipe ait du succès.

« Ça, que tu sois entraîneur-chef ou assistant, ça ne change pas. J’ai encore le feu sacré. Alors mon rôle n’est pas si différent, mais je n’ai pas à rencontrer les médias après la partie… »

Il s’agit d’une blague, bien sûr, mais derrière la blague, il y a sans doute un fond de vérité. On va se le dire, à Montréal, la relation entre Therrien et les médias n’a pas toujours été digne d’une belle histoire de Disney. Parfois, on avait un peu l’impression que cette pression pesait très lourd sur les épaules du coach.

Trop lourd ?

« Les entraîneurs, on a tous notre durée de vie, répond-il. Mais je dirais que ça dépend des marchés. Mon deuxième séjour à Montréal a été un séjour de cinq ans, et honnêtement, quand j’ai été engagé, je ne pensais pas pouvoir durer cinq ans.

« Je suis un gars de la couronne nord, je viens de Lorraine, et quand j’ai été embauché par le Canadien, ma conjointe a suggéré qu’on pense à déménager sur la Rive-Sud. Et je n’étais pas sûr : je me disais que dans trois ans, il allait falloir revenir dans la couronne nord ! Et ça a duré cinq ans.

« J’en suis très conscient : à Montréal, il faut que tu t’adresses aux partisans. Les fans, quand on perdait un match, ils étaient déçus… mais moi, comme coach, j’étais encore plus déçu ! C’est sûr que des fois, ça devenait irritant de travailler avec certains médias. Ça arrive, il y a des conflits de personnalités qui peuvent survenir au fil des ans, mais j’essayais de passer à autre chose le plus vite possible, sans que ça devienne personnel.

« Le marché montréalais, c’est un marché qui est quand même difficile. On est des Québécois, et c’est important que des Québécois dirigent cette équipe-là, mais en tant que Québécois, on sent très bien le pouls de la ville. On sait comment toute la ville se sent, ce que disent les médias, même sans vouloir y porter attention. Tandis qu’ailleurs… Tu vois, ce qui se dit ici, moi, je n’en ai aucune idée ! »

Il y a aussi que le Michel Therrien du Canadien n’avait pas le droit de se tromper. Pas dans une ville entièrement couverte de bleu, de blanc et de rouge, où la rondelle prend toute la place. À Philadelphie, la marge de manœuvre de l’assistant est plus large, et en plus, il y a trois autres clubs d’importance (les Eagles, les Sixers et les Phillies) pour meubler les discussions et créer un peu de diversion quand ça se met à chauffer.

Le coach du Canadien n’a jamais eu ce luxe.

« Vers la fin, le dernier mois ou les trois dernières semaines, peut-être que les choses allaient moins bien pour notre équipe, et la direction a pris une décision dans mon cas. J’ai trouvé ça très dur ; le Canadien, c’est important pour moi. C’était une fierté de pouvoir diriger ce club-là et d’essayer de l’amener à un autre niveau, ce qu’on a réussi à faire pendant cette période-là. Mais le Canadien a choisi d’aller dans une nouvelle direction. »

Faire le vide

De son propre aveu, Michel Therrien a eu bien du mal à regarder un match de hockey après son congédiement du 14 février 2017. Il a eu besoin d’une pause, de faire le vide et de penser à autre chose. Puis le monde des médias lui a tendu la main, et il s’est mis à regarder des matchs de nouveau.

J’ai pris une pause d’un an sans regarder le hockey. J’ai recommencé l’an passé en travaillant dans les médias, à RDS et à la radio au 91,9 Sports. Ça m’a redonné la piqûre.

Michel Therrien

Alain Vigneault a constaté rapidement que son bon ami avait encore le goût de se rendre à l’aréna. « C’est le genre de gars que ça me prenait ici. Un gars d’expérience, qui sait ce que je peux ressentir dans certaines situations. Pour moi, il n’y a rien de mieux qu’un ancien entraîneur-chef pour aider un coach ! Mike, il apporte sa bonne humeur et son entrain à l’aréna. Ça se passe comme je l’espérais avec lui. »

Et c’est un peu tout ça qui explique le grand sourire, les blagues, la bonne humeur qui est évidente. Parce que ce Michel Therrien en version 2.0 est un homme heureux, qui travaille sans pression.

En tout cas, sans la pression qu’il a déjà connue.

« Ça ne veut pas dire que je vais rentrer à la maison comme si tout va bien quand on perd, insiste-t-il. Je suis un compétiteur et je pense que c’est ce qui m’a permis de durer dans ce milieu. Mais je n’aime pas perdre, et ça, c’est quelque chose qui ne changera pas. »

Carter Hart et l’idole

PHOTO BILL STREICHER, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Carter Hart

Carter Hart a déjà affronté Carey Price à trois reprises dans la LNH, et le jeune gardien des Flyers aimerait avoir l’occasion de l’affronter de nouveau ce soir. Parce que Price a naguère été son gardien favori. « Je n’ai pas si bien joué, la première fois que je l’ai affronté, a-t-il raconté hier. Le voir à l’autre bout, ça m’a un peu déconcentré. Et la fois d’après, quand j’ai affronté le Canadien de nouveau, je me suis dit qu’il était un être humain comme moi, que j’avais un travail à faire, celui d’arrêter des rondelles, et que ça n’avait rien à voir avec lui. C’est cool de le voir lors de l’échauffement, mais une fois la rondelle sur la glace après la première mise en jeu, j’oublie tout ça. »