Andrei Markov a passé plus d'une décennie à être une vedette discrète à Montréal. À briller sans jamais que ses feux n'attirent trop l'attention.

C'est ingrat, d'une certaine façon, que ses blessures aient été plus médiatisées au fil des ans que la qualité de son jeu. Le rendement du Russe de 36 ans mérite que cela change.

Markov joue davantage depuis la saison dernière qu'il ne l'a jamais fait auparavant, le duo qu'il forme avec P.K. Subban étant sur la glace pour presque la moitié d'un match.

Ce sont eux qui tracent la ligne bleue chez le Canadien.

«Ça fait très longtemps qu'il fait partie de la crème des défenseurs de la ligue, estime Subban. Et quand il va terminer sa carrière, il aura été l'un des meilleurs à avoir joué pour cette organisation. Je suis chanceux de jouer avec lui.»

Lorsqu'on regarde la liste des joueurs les plus utilisés dans la LNH, on voit Markov pointer au 12e avec un temps d'utilisation moyen de 25:03. Subban au sixième à 25:58.

Puis, un détail attire le regard.

Parmi les 20 joueurs les plus utilisés en moyenne, aucun n'est séparé de Markov par cinq ans ou moins. Ça fait de lui une sorte d'anomalie dans le hockey d'aujourd'hui.

Mais non seulement le meilleur pointeur du Canadien en avantage numérique joue beaucoup, il semble aussi s'être éloigné de l'époque où l'on craignait que la fatigue le rattrape en cours de saison.

«Même s'il n'a pas patiné aujourd'hui - il faut quand même ménager ses énergies - il est venu à l'aréna pour faire du vélo stationnaire pendant une demi-heure, a rappelé Michel Therrien. Il est dans une forme resplendissante. Il travaille très fort pour se maintenir dans une condition exceptionnelle et c'est ce qui lui permet de jouer du hockey de très haut niveau à son âge.»                             

Concentré et professionnel                             

Perpétuant des habitudes de travail développées très jeune en Russie, Markov mise avant tout sur le volume d'entraînement. Il n'est pas nécessairement celui qui va lever les poids les plus lourds en gymnase. Mais si un jeune tentait de suivre sa cadence de travail et toutes les heures consacrées à sa routine bien établie, il aurait du mal à y arriver.

«Il est toujours là, dit Tomas Plekanec, son coéquipier depuis 2005. Il sait ce qu'il doit faire pour garder la forme et le fait qu'un gars de son âge s'entraîne de la sorte, ça incite les plus jeunes à le suivre.

«Il est constamment sur le dos de Chuckie!»

Le commentaire est lancé sur un ton badin, mais Alex Galchenyuk, lui, prend très au sérieux l'influence de Markov.

«C'est l'un des joueurs les plus respectés, non seulement au sein de notre équipe, mais dans la ligue, dit-il. Il est toujours tellement concentré et professionnel dans son travail. C'est spécial à voir.»

Markov n'a peut-être la personnalité la plus rassembleuse. Mais en plus de son talent et de ses années de service, l'imputabilité et le professionnalisme qu'il réclame de ses coéquipiers justifient le A cousu sur son chandail.

«Il n'a pas besoin de parler beaucoup, son jeu le fait à sa place, soutient Subban. C'est un leader, un gars respecté, et un modèle facile à suivre pour les plus jeunes joueurs.»

Comme Lidstrom

Sur la glace aussi Markov perpétue une tradition russe: celle des échecs.

Tout bon joueur d'échecs est en mesure de penser à ses coups plusieurs tours en avance. Pour des raisons évidentes, c'est impossible de faire la même chose au hockey. Mais ça n'empêche pas Markov d'être toujours un pas en avant des autres, selon Tomas Plekanec.

«Il sait toujours ce qu'il va faire avec la rondelle avant même que le jeu ne se présente à lui, explique le centre tchèque. Quand on le connaît, on sait où il s'en va. Mais pour ceux qui le connaissent moins - entre autres les plus jeunes joueurs - c'est plus difficile de suivre son rythme.»

Nathan Beaulieu n'est jamais sur la glace en même temps que Markov. Mais il est aux premières loges pour voir ce dont son vétéran coéquipier est capable.

«Sa vision du jeu est particulièrement impressionnante, note l'arrière de 22 ans. En zone offensive, il arrive à rejoindre un coéquipier d'une bande à l'autre alors que d'autres ne verraient même pas un coéquipier libre à cet endroit-là.

«Et l'une des raisons pour lesquelles il arrive à jouer si longtemps, c'est que c'est un patineur tellement intelligent qu'il ne se fait jamais frapper.»

Tiens donc. Il y a un autre défenseur - un membre du Temple de la Renommée - qui avait justement la réputation d'esquiver constamment ses opposants.

«Il me fait penser à Nicklas Lidstrom», lâche Mike Weaver.

Ah, voilà.

«Comme lui, c'est un gars on ne peu plus constant qui fait rarement d'erreurs et qui pose des gestes très créatifs sur la glace. Même à l'entraînement, lorsque les joueurs ont tendance à suivre ce que font les autres dans un exercice, Markie a tendance à ajouter un peu d'ad lib. C'est super agréable à regarder.»

Oui, Andrei Markov mérite qu'on le regarde de plus près.