«Je me sens 10 ans plus jeune que quand je jouais dans la Ligue nationale!», lance Marc-André Bergeron au bout du fil.

Le printemps 2010 est marqué dans la mémoire collective des amateurs du Canadien de Montréal. C'était le printemps des Capitals de Washington et des Penguins de Pittsburgh éliminés en sept parties. C'était celui des négligés qui surprennent les favoris. Et c'était celui de Jaroslav Halak.

Mais c'était aussi le printemps d'un petit défenseur offensif de Trois-Rivières. C'était le premier printemps de Marc-André Bergeron dans l'uniforme du Canadien et, on le saura plus tard, ce serait son dernier.

Bergeron a subi cette année-là une blessure à un genou. Il avait récolté en 60 matchs un total de 13 buts et 21 aides. Mais à l'automne, pendant qu'il guérissait, le Canadien ne l'a pas rappelé.

Le défenseur de 5'9 s'est trouvé une niche chez le Lightning de Tampa Bay. Il a joué trois saisons de plus dans la Ligue nationale et, à l'été 2013, il a choisi de dire adieu à Gary Bettman et à l'Amérique du Nord et de partir jouer en Suisse.

«J'étais rendu à un tournant dans ma carrière dans la Ligue nationale. Ma dernière saison ne s'était pas déroulée comme je l'espérais, explique Bergeron, joint en Suisse. Je voulais garder ma destinée entre mes mains. Je sentais que la fin s'en venait. C'était de plus en plus difficile.»

Le choix de Bergeron n'a rien de singulier. Plusieurs joueurs de petit gabarit font le pari de la Suisse pour donner un second souffle à leur carrière. Pierre-Marc Bouchard (5'10) et Francis Bouillon (5'8) jouent présentement dan la première division suisse.

«J'ai joué 10 ans dans la Ligue nationale, et l'an passé, à ma première saison en Suisse, je sentais encore les répercussions. Je sentais le poids de toutes ces années à jouer contre des joueurs plus gros, plus grands, plus lourds. Cette année, je me sens vraiment bien. Je touche du bois!»

«J'avais mal partout»

L'année dernière, à sa première saison avec les Lions de Zurich, Bergeron s'est établi comme un régulier de l'équipe. Il a gagné le premier championnat de sa carrière. Le défenseur de 34 ans a aussi pu soigner un corps usé par 10 saisons et 490 matchs dans la LNH. «Je pense que si j'étais resté dans la Ligue nationale, je n'aurais pas pu jouer plus vieux que 35 ans. J'avais mal dans les genoux, j'avais mal dans le dos, j'avais mal aux coudes, j'avais mal partout. Là, tout ça est parti. Je me sens mieux.

«Ça laisse des marques. C'est extrêmement demandant. Dans une saison, il doit y avoir la moitié des joueurs qui subissent au moins une opération. En étant plus petit, je suis désavantagé au plan physique. J'ai eu une opération à un genou, deux opérations dans le dos. Ça a des répercussions dans nos carrières, mais aussi dans notre vie, à long terme. Il faut en être conscient.»

En Suisse, Bergeron pense avoir trouvé l'équilibre entre «un excellent niveau de hockey» et sa santé. «Les joueurs sont davantage de mon gabarit. Le rythme de la saison est beaucoup moins soutenu, dit-il. Tout ça mis ensemble, je vais peut-être être capable de jouer ici jusqu'à 38 ans. Je n'ai quand même pas l'intention de faire un Chris Chelios de moi-même!»

Canadien: une fin amère

Bergeron n'a toujours pas digéré la façon dont s'est passée sa séparation d'avec le Canadien. Il estime qu'il avait connu une bonne saison. «En raison d'une blessure subie en allant à la guerre pour l'équipe, ils ne m'ont pas pris. J'ai trouvé ça un peu... amer. Ça a laissé un goût amer.»

Mais Bergeron dit garder de beaux souvenirs de ce printemps 2010. «Je me considère très chanceux d'avoir pu jouer pour le Canadien. En tant que Québécois, j'ai regardé le Canadien jouer tout au long de ma vie et je le regarde encore. Aller au Centre Bell et faire partie des anciens, ça me fait drôle. C'est une belle famille.»

Jouer dans la Ligue nationale, jouer pour le Canadien, c'étaient des rêves pour lui. Aujourd'hui, Marc-André Bergeron profite de sa deuxième vie, à l'ombre des Alpes. À l'entendre parler, lui, sa femme et ses deux enfants ne regrettent pas leur choix une seule seconde.

«J'ai voyagé en deux ans comme je n'avais jamais voyagé dans ma vie, dit-il. On a fait le tour de l'Europe en famille. J'ai découvert plein d'endroits que je n'aurais jamais pensé découvrir. On skie dans les Alpes. C'est complètement malade. On est très chanceux.»