Pour les amateurs de golf, la Coupe Ryder est un peu l'équivalent d'une finale de la Coupe Stanley. L'un des sports les plus individualistes devient alors une affaire d'équipes, et la compétition est acharnée entre les Américains et les Européens.

Il a pourtant fallu patienter longtemps avant que la supériorité des Américains soit contestée. Pendant 50 ans, entre 1935 et 1985, leurs adversaires n'ont obtenu qu'une victoire (en 1957) et un match nul (en 1969). L'inclusion des joueurs d'Europe continentale, en 1979, a toutefois équilibré la compétition, et les Américains n'ont remporté que 7 des 17 dernières éditions.

Et c'est encore pire depuis 1995, les Européens ayant raflé la Coupe 7 fois en 9 occasions, dont les deux dernières. Il y a 21 ans que les Américains n'ont pas gagné en Europe; c'est Tom Watson, le capitaine de l'équipe actuelle, qui l'était aussi en 1993 quand les visiteurs se sont imposés au club The Belfry en Angleterre.

Cette fois, la 40e compétition est présentée au club Gleneagles, en Écosse, là où avait été présenté l'événement qui préfigurait la Coupe Ryder, en 1921. Aujourd'hui site d'un hôtel de luxe, avec plusieurs parcours réputés, Gleneagles semblait fait pour accueillir le tournoi.

Curieusement, c'est l'Américain Jack Nicklaus qui a conçu le parcours PGA Centenary où seront jouées les parties. «C'est peut-être le plus "américain" de tous les parcours du Royaume-Uni, a estimé Watson. Avec des allées étroites, de l'herbe longue très dense et des verts très roulants. Nos joueurs ne sont pas dépaysés et ils ont eu amplement de temps pour s'entraîner et bien reconnaître chacun des trous.»

L'appui de la foule

Les Européens ne tireront donc pas avantage du parcours, mais ils auront l'appui de la foule, un atout souvent déterminant. Et le capitaine Paul McGinley peut miser - en plus du no 1 mondial Rory McIlroy - sur le meilleur joueur de l'histoire récente de la Coupe Ryder: l'Anglais Ian Poulter. Ce dernier présente une fiche de 12 victoires et 3 défaites, pour une moyenne de 80%. Il y a deux ans, à Medinah, son intensité avait intimidé plusieurs joueurs américains.

En face, Tom Watson sait qu'il peut compter sur un groupe plus homogène, mais il aura lui aussi besoin d'une étincelle pour galvaniser son équipe. Elle pourrait venir du duo formé par Keegan Bradley et Phil Mickelson. Ces deux joueurs avaient remporté leurs 3 matchs à Medinah et se sont imposés comme les meneurs des Américains cette semaine.

Le vétéran Mickelson y est même allé d'une déclaration controversée, faisant référence aux démêlés judiciaires qui ont impliqué McIlroy et son compatriote nord-irlandais Graeme McDowell il y a quelques mois dans une cause impliquant aussi leur ancien agent.

Quand on lui a demandé si les Américains pouvaient vraiment former une «équipe», il a répondu: «Non seulement sommes-nous capables de jouer ensemble, mais encore nous ne nous poursuivons pas l'un l'autre... C'est vraiment un point positif pour nous.»

Accueillie avec humour par les Européens, la blague a surtout détourné l'attention des jeunes joueurs américains qui ont ainsi pu préparer la compétition dans le calme.

Mickelson disputera sa 10e Coupe Ryder, un record pour les Américains. Seul l'Anglais Nick Faldo a joué plus souvent (11 participations) et c'est d'ailleurs lui qui détient les records pour le plus grand nombre de matchs (46), de points (25) et de victoires (23).

On parlait de Jack Nicklaus plus haut et le grand champion américain est tout aussi populaire en Grande-Bretagne qu'aux États-Unis. L'une des grandes raisons de cette admiration vient d'un geste «chevaleresque» que Nicklaus a accompli à la Coupe Ryder de 1969.

L'Américain, qui faisait ses débuts dans cette compétition, était opposé à l'Anglais Tony Jacklin - le meilleur joueur britannique - dans le dernier match de la compétition. Contre toute attente, il lui concéda un long coup roulé au 18e trou, permettant aux hôtes d'arracher le premier match nul de l'histoire.

Les Américains et leurs partisans n'ont pas toujours été aussi élégants, les Européens aussi d'ailleurs, mais l'esprit de la Coupe Ryder est tout entier dans la «concession» de Nicklaus.

La Coupe Ryder en bref

La Coupe Ryder est une compétition disputée tous les deux ans entre des équipes américaines et européennes, alternativement aux États-Unis et en Europe. Cette année, la 40e présentation a lieu au club Gleneagles, en Écosse.

La compétition est disputée sur trois jours entre deux équipes de 12 joueurs. Il y a un total de 28 matchs, chacun valant un point. Tous les matchs sont disputés en match-play, c'est-à-dire que le pointage s'établit trou par trou. La partie prend fin quand un joueur ou un duo a une avance insurmontable ou qu'il remporte le dernier trou. Il n'y a pas de prolongation, chaque joueur ou duo obtenant un demi-point en cas d'égalité après le 18e trou.

Les deux premières journées (aujourd'hui et demain) sont réservées aux matchs en duos avec 4 matchs le matin et 4 l'après-midi. Les capitaines désignent leurs duos et ne sont pas obligés de faire jouer tous leurs joueurs. Chaque jour, 4 matchs sont disputés selon la formule du jeu alternatif (foursomes), les joueurs frappant la même balle à tour de rôle et alternant pour le coup de départ. Quatre matchs sont aussi disputés avec la formule 4 balles, meilleure balle (fourball), où chaque joueur joue sa propre balle et le meilleur pointage remporte le point pour son équipe.

La dernière journée (dimanche) est réservée aux simples, qui opposent un joueur de chaque équipe. Tous les joueurs sont alors en action, même s'ils n'ont joué aucun match jusque-là.

Une équipe doit obtenir 14 points pour remporter la Coupe. En cas d'égalité 14-14, c'est le tenant du titre, l'Europe cette année, qui conserve le précieux trophée!