(Québec) Même si ses espoirs étaient mesurés, Hugo Houle ne pensait pas devoir rejoindre sa famille trois tours avant la fin du Grand Prix cycliste de Québec, vendredi après-midi.

Quelques minutes après son abandon avec 36 km à faire, le vainqueur d’étape au Tour de France a enjambé une clôture délimitant la zone VIP près de la ligne d’arrivée sur la Grande Allée. Il a ensuite partagé sa déception avec sa mère Diane et son père Yvon, de même qu’avec les parents d’Antoine Duchesne.

Diagnostic pour celui qui se fait généralement un point d’honneur de finir ses courses ? Le réservoir était vide, tout simplement.

PHOTO JULIEN PAYETTE-TESSIER, FOURNIE PAR GRAND PRIX CYCLISTE DE QUÉBEC

Hugo Houle contraint à l'abandon

Je n’avais pas les jambes du tout. Les sensations étaient vraiment catastrophiques. Après 2 heures 30, je sentais déjà que les jambes devenaient très, très lourdes et que ce serait très, très compliqué.

Hugo Houle

Un tour avant de mettre le clignotant, le représentant d’Israel-Premier Tech s’était fait lâcher dans la côte de la Montagne, principale difficulté du circuit dans le Vieux-Québec. Il est revenu dans le peloton, sans jamais revoir la tête de course.

Son forfait a été confirmé peu après celui de Peter Sagan, triple champion mondial et vainqueur en 2016 et 2017.

« Je me suis retrouvé à l’arrière et j’avais de la difficulté à remonter, a expliqué Houle. C’était clair dans mon esprit que je n’allais pas finir l’épreuve. Je suis donc certainement déçu. »

Le cycliste de 31 ans aurait souhaité « en donner plus pour les gens » qui l’ont accueilli comme un héros à la présentation des coureurs et tout au long du GP disputé pour la première fois depuis 2019. Terrassé par une gastroentérite, il redoutait depuis deux semaines de ne pas retrouver sa vélocité.

« J’étais complètement vidé, je n’avais aucune énergie aujourd’hui. […] J’ai dépensé mes dernières forces en Norvège (2e). Je dois maintenant récupérer parce que je suis encore très fatigué et je n’arrive pas à remettre en route. Donc, tout ce qui monte très haut redescend… »

PHOTO JULIEN PAYETTE-TESSIER, FOURNIE PAR GRAND PRIX CYCLISTE DE QUÉBEC

Guillaume Boivin

À l’inverse, son coéquipier Guillaume Boivin avait enfin retrouvé de l’élan après une saison compliquée par la maladie. Or un changement de vélo forcé par un ennui mécanique l’a complètement sorti de l’équation avec un tour à faire.

Meilleur Canadien comme en 2016, 2017 et 2018, il a croisé le fil au 45rang, à 1 min 16 s du vainqueur-surprise Benoît Cosnefroy (AG2R-Citroën).

« J’étais vraiment, vraiment bien aujourd’hui, je faisais une course parfaite », a soupiré Boivin, dégoûté par le revirement de situation. « J’imagine que vous ne m’avez pas vu de la course, ce qui est bon signe ici en vue du dernier tour. Mais avec le changement de vélo, c’était fini. »

Sa tige de selle est descendue de « trois, quatre centimètres ». « Les routes sont tellement mauvaises avec les trous que c’est un peu dur pour la mécanique », a-t-il pesté.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Benoît Cosnefroy a tiré son épingle du jeu avec plusieurs centaines de mètres à négocier au dernier tour.

À sa neuvième participation au GP, sa classique favorite, Boivin espérait se racheter après un deuxième Tour de France très difficile.

« C’est une grosse déception. Mais bon, ce n’est pas la première ni la dernière. Ça fait chier, en bon québécois. »

Le futur retraité Antoine Duchesne s’est davantage amusé, même si le moteur s’est étouffé devant le Château Frontenac, à 1 km de l’arrivée. Le Québécois de la Groupama-FDJ, bien active en fin d’épreuve avec David Gaudu et Michael Storer, a roulé avec une orthèse à la main gauche en raison d’une fracture à un doigt subie deux semaines plus tôt.

« Je suis tout de même satisfait, a déclaré Duchesne, 67e à 3 min 12 s. Si ne pas avoir couru pendant six semaines, avoir des douleurs au cul, une tendinite au genou et une main brisée, ça faisait gagner des courses, ça se saurait… Compte tenu de mon dernier mois, je suis quand même très content de ne pas avoir eu l’air trop fou. »

Le cycliste de 30 ans s’est pointé le nez aux avant-postes avec deux tours à faire, mais c’est le mieux qu’il a pu faire.

« J’aurais aimé tenter quelque chose, mais c’est une grosse course et les meilleurs au monde sont là. Bref, j’ai cru au conte de fées, mais ça ne s’est pas passé ! »

Le champion canadien Pier-André Côté, fatigué, n’a pas connu un meilleur sort en ralliant l’arrivée à la 111place, à plus de 10 minutes du gagnant.

« J’ai souffert un peu plus tôt que je voulais, a constaté l’étudiant en actuariat à l’Université Laval. Quand tu commences à souffrir à 10 tours de la fin, ça fait longtemps à s’arracher et à serrer les dents. »

Les quatre Québécois tournent maintenant les yeux vers le GP de Montréal. Si Boivin était encouragé par sa vélocité avant son incident mécanique, Houle ne se contait pas d’histoires.

« Ça va prendre un petit miracle, a-t-il admis. Après presque un mois sans courir, ça va peut-être me donner un petit électrochoc. On verra si je peux faire mieux, mais je n’ai pas de grands espoirs. »

Le fil de la course

  • 34km : cinq coureurs, dont le Canadien Carson Miles, s’échappent et se donnent une priorité de quatre minutes sur le peloton.
  • 57km : les cinq coureurs du groupe de tête continuent à s’échanger les devants et maintiennent leur avance d’un peu plus de quatre minutes.
  • 100km : à mi-chemin de la course, le contingent qui s’est échappé maintient son avance. Le peloton n’a pas largué de coureurs.
  • 135km : Miles ne maintient plus le rythme et le groupe de meneurs se réduit à quatre. Le peloton se rapproche à près de trois minutes des leaders.
  • 160km : Un groupe de cinq poursuivants mené par l’Américain Quinn Simmons se détache du peloton et talonne les meneurs par moins d’une minute.
  • 172km : les poursuivants ont comblé le retard sur les meneurs et le peloton s’approche à une poignée de secondes de la tête.
  • 180km : au début de l’ultime tour, les têtes d’affiche, dont Tadej Pogačar et Wout van Aert, se positionnent en tête du peloton.
  • 200km : avec 1200 mètres à faire, Benoît Cosnefroy se donne une priorité de plusieurs secondes. Il tient tête à la poussée des rivaux et triomphe.

La Presse Canadienne