«La F1 n'a jamais été aussi intéressante», a lancé hier le directeur de l'écurie Toro Rosso, Franz Tost. Le constat n'a rien d'original. Il s'agit plutôt d'une idée largement répandue dans le peloton, voulant qu'enfin, la discipline reine du sport automobile soit de nouveau digne d'intérêt.

Le classement serré en ce début de saison y est bien sûr pour quelque chose. Mais les courses elles-mêmes sont plus captivantes. Cette nouvelle réalité est surtout due à des changements réglementaires qui ne s'apprécient nulle part aussi bien que sur le circuit de Catalogne.

Le Grand Prix d'Espagne a longtemps été considéré comme une non-course. Au cours des 10 dernières années à Barcelone, le pilote parti en position de tête a remporté l'épreuve9 fois! Entre 2008 et 2010, il y avait en moyenne deux dépassements par course. Deux. En l'espace de 66 tours.

Cette recette, parfaite pour faire bâiller les amateurs, a finalement volé en éclats l'année dernière. Pour la première fois en 10 ans, le vainqueur a dû réussir un dépassement pour l'emporter. Un petit dépassement, soit, mais Sebastian Vettel, parti deuxième, a tout de même réussi à battre Mark Webber et à déjouer cette statistique.

Plus surprenant encore, la course remportée par le champion en titre a été l'occasion de 51 dépassements, soit 25 fois le total de l'année précédente.

«Je me rappelle d'une course ici où pendant 60 des 66 tours, j'ai suivi la voiture de Felipe (Massa) et je ne pouvais pas la dépasser. Maintenant, on a la chance de le faire. Les positions changent», a raconté hier Vettel, lors d'un point de presse à Barcelone, rappelant que les spectateurs n'étaient pas les seuls à trouver le temps long.

À la même conférence de presse, le Finlandais Kimi Raikkonen a résumé la situation dans le style succinct qui est le sien: «Les règlements ont changé. On n'a plus besoin d'être en pole pour gagner.»

Soit. Mais quels règlements ont changé? La principale nouveauté réside dans l'autorisation, dès la saison dernière, de systèmes mobiles sur l'aileron arrière des monoplaces. Communément appelée DRS (pour Drag Reduction System), cette nouveauté augmente l'adhérence dans les virages et réduit la traînée en ligne droite.

Le DRS serait responsable de 363 des 804 dépassements comptabilisés au cours de la saison dernière. Sans compter que ce nouveau système augmente la dégradation des pneus, une autre dimension qui ajoute de la profondeur - et un élément de surprise - aux courses.

Une autre saison de dépassements

«La course de cette année devrait être similaire à celle de l'année dernière, à cause de la dégradation et à cause des DRS, a prédit Fernando Alonso. On va voir beaucoup de dépassements et ça change un peu la philosophie de ce circuit. Avant, la position de tête représentait la victoire. Maintenant, la pole est évidemment la meilleure position à avoir, mais elle n'est plus aussi cruciale. C'est moins important.»

Si cette nouvelle donne vaut pour Barcelone, elle vaut aussi pour les autres épreuves. Les données des premiers Grands Prix laissent entrevoir une saison 2012 aussi riche en dépassements que la précédente. Les quatre courses inaugurales avaient été le théâtre de

220 dépassements en 2011 et elles en ont vu 211 cette année.

Si tous saluent l'augmentation du nombre de dépassements, la dégradation des pneumatiques Pirelli, elle, ne fait pas l'unanimité. Michael Schumacher (Mercedes) l'a critiquée cette semaine. «Je pense juste qu'ils jouent un effet beaucoup trop important et se dégradent trop vite, on ne peut pas pousser la voiture à la limite», a déploré l'Allemand sept fois champion du monde.

Que la fronde émane de Schumacher, un pilote qui a longtemps incarné une F1 sans surprises, ne surprendra personne. Le neveu d'Ayrton Senna et pilote de Williams, Bruno, lui a répondu, hier à Barcelone.

«Du point de vue du pilote, c'est certain qu'on aimerait des pneus qui durent le plus longtemps possible et qu'on peut pousser le plus fort possible», a d'abord admis Bruno Senna, avant de se lancer dans un rappel historique.

«Dans les huit dernières années, on pouvait pousser au plus fort et les pneus tenaient le coup, la voiture aussi. Avant cette période, si tu poussais à fond, la voiture lâchait, a rappelé celui qui occupe le 11e rang du classement des pilotes. Et si l'on recule plus loin dans le temps, les pneus et la voiture lâchaient. Maintenant [avec la dégradation], ça redevient comme c'était avant, c'est-à-dire de vraies courses. Et je pense que c'est ce que les gens veulent voir.»

Chelsea va tourner en rond à Barcelone

Les Barcelonais ont pu admirer les joueurs du club anglais de Chelsea éliminer leur Barça en Ligue des champions le mois dernier. Ils pourront apercevoir une fois de plus les couleurs de l'équipe londonienne dès aujourd'hui, lors des essais libres au Grand Prix d'Espagne.

L'écurie Sauber a confirmé hier qu'elle s'était entendue avec l'équipe de soccer pour conclure «un partenariat nouveau et innovant». Les voitures des pilotes de l'écurie - Kamui Kobayashi et Sergio Perez - vont désormais arborer le logo de Chelsea. Cette publicité pour le club vise notamment à accroître la portée de la «marque Chelsea» dans les marchés asiatiques, où des concurrents comme Manchester United font de bonnes affaires. On estime que les deux tiers des fans de l'équipe mancunienne proviennent maintenant d'Asie.

«L'équipe de soccer va profiter de la diffusion des courses de F1 qui, comparée à celle de la Premier League, est plus large et internationale, a expliqué la PDG de Sauber, Monisha Kaltenborn. Particulièrement en Asie, la F1 jouit d'une excellente présence télévisuelle.» Mais le logo de Chelsea sera difficilement gagnant cette fois-ci en Espagne. En 225 courses, Sauber, anciennement BMW, n'en a remporté aucune.