Faute de récupérer un Grand Prix de France au calendrier de la Formule 1, les acteurs du sport automobile tricolore pourront compter en 2012 sur trois jeunes pilotes plein de talent qui ont su convaincre trois grands groupes de miser sur eux, en pleine crise économique.

Leur nomination est à la hauteur du défi énorme que représente une saison de F1, le pinacle du sport automobile mondial: Romain Grosjean (Lotus), soutenu par Total, Jean-Eric Vergne (Toro Rosso), issu de la filière Red Bull, et Charles Pic (Marussia), bien aidé par le groupe Lagardère, ont a priori 20 Grands Prix pour sauver leur place, en ayant bien préparé leur affaire.

Le mieux placé, sur le papier, c'est Grosjean. Il a déjà disputé sept GP en 2009, chez Renault F1, et c'est justement parce que Lotus utilise des moteurs Renault que Total est partenaire de l'écurie d'Enstone. Le montant est confidentiel mais le pétrolier français avait besoin de redorer son blason et compte sur l'image de Grosjean pour porter sa communication.

Le Franco-Suisse a 25 ans, de l'expérience, a travaillé dans la finance, aime faire la cuisine et boire du bon vin. Son intronisation, la semaine dernière, a permis à Total de renouer avec une certaine idée de la F1 à la française, comme à l'époque glorieuse de la filière Elf, au siècle dernier.

Dans un pays dont le Premier ministre, François Fillon, est un passionné de sport auto, le tandem Lotus-Grosjean pourrait faire des étincelles et renouveler l'intérêt des grands médias pour la F1, après plusieurs années de vaches maigres. Ce sera crucial pour TF1, dont le contrat F1 se termine fin 2012.

Le pari de Lagardère

Depuis le GP du Brésil 1999, il n'y avait plus eu trois Français sur la grille de départ: à l'époque ils s'appelaient Olivier Panis (Prost), Jean Alesi (Sauber) et Stéphane Sarrazin (Minardi). La Fédération française du sport automobile (FFSA) n'est pas étrangère à ce renouveau, elle qui a investi patiemment depuis plus de dix ans dans des équipes de France de karting, de rallye et de circuit.

La nomination de Vergne, pur produit aussi de la filière FFSA, est une belle récompense. Le jeune Francilien a convaincu Red Bull, le géant autrichien de la boisson énergétique et des sports extrêmes, de lui donner sa chance. Il n'aura pas une monoplace pour gagner mais n'a que 21 ans et assez de talent pour rentrer souvent dans les points.

La titularisation de Pic chez Marussia (ex-Virgin) répond à une autre logique, celle du groupe Lagardère: investir dans la F1 pour «vendre des espaces publicitaires» sur sa monoplace, comme l'explique calmement le jeune Charles, 21 ans comme Vergne, qui va tenter de faire oublier son étiquette de «pilote-payant».

Après avoir tâté du tennis et de l'athlétisme, Lagardère a misé sur la F1 et choisi Panis comme mentor de Pic. Reste à rentabiliser cet investissement de plusieurs millions d'euros, dans l'une des deux équipes les plus modestes du plateau. C'est le pari le plus courageux des trois.