Plusieurs de mes meilleurs souvenirs de baseball se rapportent à des vols de but.

Je pense à Rex Hudler, qui fonçait vers le marbre comme un taureau fou. À Pascual Pérez, la tête entre ses jambes pour surveiller un coureur. À Otis Nixon, 6 pi 2 po et 180 lb, que le vent soufflait vers le deuxième but. Chaque fois qu’un lanceur des Pirates de Pittsburgh tentait de le retenir sur les sentiers, 25 000 spectateurs caquetaient. Cot. Cot. Cot. Puis une poule mouillée apparaissait sur l’écran géant du Stade olympique.

Hé hé hé.

De l’humour de baseball.

J’adore.

Malheureusement, de nos jours, les vols de but sont plus rares. Entre 1987 et 2019, leur nombre a chuté de 36 %, et ce, bien qu’il y ait plus de clubs et de parties. L’été dernier, les Twins du Minnesota n’ont tenté que 21 courses en 60 matchs. C’est à se demander qui, des lanceurs ou des coureurs, sont maintenant les poules mouillées.

PHOTO ROBERT MAILLOUX, ARCHIVES LA PRESSE

Tim Raines, des Expos, vole un but contre les Mets de New York, en 1985.

Mais au fait, pourquoi cette baisse ?

Les receveurs sont-ils meilleurs ?

Les coureurs sont-ils plus lourds ?

Le vent de face souffle-t-il plus fort qu’avant ?

Non. C’est plutôt la faute à la science. Précisément, aux sabermétriciens*.

Ces statisticiens – amateurs et professionnels – s’amusent à calculer les chances de réussite des différentes stratégies. C’est grâce à leurs travaux que les gérants déploient maintenant des stratégies défensives adaptées à chaque frappeur. Par exemple, quatre voltigeurs. Ou trois joueurs d’avant-champ entre deux buts.

L’influence des sabermétriciens est réelle. L’été dernier, les Dodgers de Los Angeles ont employé des formations spéciales contre trois frappeurs gauchers sur quatre.

CAPTURE D’ÉCRAN DE MLB.COM, TIRÉE DU SITE BASEBALL PROSPECTUS

Défense spéciale des Dodgers de Los Angeles contre un frappeur des Padres de San Diego : quatre joueurs du même côté de l’avant-champ.

Et ces sabermétriciens, que pensent-ils des vols de but ?

Du mal. Beaucoup, beaucoup de mal.

Prenons un cas classique. Il y a un retrait et Géranium Plante est au premier coussin. Ses chances d’atteindre le marbre ? Environ 26 %. S’il réussit à voler le deuxième but, les chances de marquer de son équipe passent à 40 %. Intéressant. Par contre, si Géranium se plante, son club se retrouve avec deux retraits et personne sur les buts. Les chances d’inscrire un point tombent à un maigre 6 %.

> Consultez l’étude de Bat Flips & Nerds (en anglais)

Traduction : le vol de but est une stratégie risquée. C’est plus simple – et efficace – de miser sur le frappeur pour faire avancer le coureur que de demander à Géranium de voler un but. Une conclusion franchement plate. Car la conséquence directe, c’est une baisse du nombre de tentatives de vol et un spectacle moins divertissant.

Pensez-y. Le vol de but est une des rares actions où un spectateur peut réellement se mettre dans la tête d’un lanceur. Ou d’un coureur. Ou d’un gérant. J’y vais ? Je reste ? Partira ? Partira pas ? Un lancer au frappeur ou à l’extérieur ? Ce sont des moments arrêtés, de stratégie et de tension, qui distinguent le baseball des autres sports d’équipe.

Heureusement, les dirigeants des ligues majeures veulent renverser la tendance. Ils se serviront des ligues mineures, l’été prochain, pour tester trois nouvelles règles favorisant les vols de but.

• Les buts seront un peu plus larges ;

• Les lanceurs – même les gauchers – devront quitter la plaque pour retenir un coureur ;

• Les lanceurs seront limités à deux relais sur les sentiers par apparition au bâton.

D’excellentes initiatives. « Le baseball majeur doit réfléchir et chercher à progresser vers la meilleure version possible du baseball. Une version qui soit fidèle au jeu et qui présente suffisamment d’action pour divertir les partisans de tous les âges », a récemment indiqué le conseiller spécial du commissaire, Theo Epstein, lui-même fortement inspiré par les sabermétriciens lorsqu’il était à la tête des Red Sox de Boston et des Cubs de Chicago.

En parallèle, de plus en plus de joueurs courent maintenant avec de gros gants. On dirait des mitaines de four. Ces gants, munis de tiges rigides, protègent les doigts contre les foulures et les coups de crampons en métal. Ils ont aussi l’avantage d’être un peu plus longs que la main nue d’un coureur.

Les joueurs prétendent que ça ne leur confère aucun avantage. OK, laissons-leur le bénéfice du doute. Il reste qu’il y a des coureurs qui semblent ambitionner un peu. Parfois, ça ressemble plus à un doigt géant en styromousse ou à une palme de plongeur qu’à un gant de coureur.

PHOTO NICK WASS, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Bryce Harper, des Phillies de Philadelphie, et son gant de coureur, qui ressemble à une mitaine de four.

Vivement le retour en force des vols de but. Pour que le baseball redevienne aussi excitant qu’avant. Mais d’ici là, je ne bouderai tout de même pas mon plaisir de regarder un match.

Ou deux.

Ou trois.

Par jour.

Play ball !

Mes prédictions

PHOTO JOHN BAZEMORE, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Ronald Acuña fils, des Braves d’Atlanta

Ligue nationale – Est
1. Braves d’Atlanta
2. Nationals de Washington
3. Mets de New York
4. Phillies de Philadelphie
5. Marlins de Miami

Ligue nationale – Centrale
1. Brewers de Milwaukee
2. Cardinals de St. Louis
3. Reds de Cincinnati
4. Cubs de Chicago
5. Pirates de Pittsburgh

Ligue nationale – Ouest
1. Dodgers de Los Angeles
2. Padres de San Diego
3. Giants de San Francisco
4. Diamondbacks de l’Arizona
5. Rockies du Colorado

Ligue américaine – Est
1. Yankees de New York
2. Blue Jays de Toronto
3. Rays de Tampa Bay
4. Red Sox de Boston
5. Orioles de Baltimore (ce sera pénible…)

Ligue américaine – Centrale
1. White Sox de Chicago
2. Twins du Minnesota
3. Indians de Cleveland
4. Royals de Kansas City
5. Tigers de Detroit

Ligue américaine – Ouest
1. Astros de Houston
2. Angels de Los Angeles
3. Athletics d’Oakland
4. Rangers du Texas
5. Mariners de Seattle

* Le mot est dérivé de SABR, sigle désignant la Society for American Baseball Research, au sein de laquelle sont regroupés des adeptes de statistiques avancées.