Julianne Séguin et Charlie Bilodeau forment l'un des couples les plus prometteurs du patinage artistique canadien. Vice-champion mondial junior en 2015, le duo vise une première participation aux Jeux olympiques de PyeongChang, l'hiver prochain. Il deviendrait ainsi le premier couple entièrement québécois à s'y qualifier depuis Anabelle Langlois et Patrice Archetto, en 2002.

Pour le moment, les projecteurs ne sont pas tournés vers eux. Les trentenaires Meagan Duhamel et Eric Radford, champions mondiaux en 2015 et 2016, représentent un véritable espoir de médaille. Le couple, qui s'entraîne à Saint-Léonard avec Bruno Marcotte dispute vraisemblablement sa dernière saison.

Ce sera le moment pour Séguin, 20 ans, et Bilodeau, 24 ans, de prendre le relais, eux qui ont déjà terminé huitièmes aux Mondiaux séniors de 2015 après leur médaille d'argent chez les juniors.

Un événement majeur pourrait leur servir de tremplin vers la consécration : les Championnats du monde de 2020, qui auront lieu à Montréal du 16 au 22 mars, a confirmé Patinage Canada hier matin lors d'une conférence de presse au Centre Bell.

«Dans le patin, on est des jeunots», a souligné Bilodeau, originaire de Trois-Pistoles.

«Beaucoup de gens prendront leur retraite après 2018. Il va y avoir un grand espace à combler. Avoir les Mondiaux ici à Montréal, pour deux Québécois, on ne peut pas demander mieux», poursuit Charlie Bilodeau.

Sa partenaire Julianne Séguin, de Longueuil, frissonnait déjà à l'idée de s'exécuter sur la même patinoire que les joueurs du Canadien: «Je n'ai pas les mots pour le dire. Le fait qu'on soit à Montréal, que la famille aura la chance de venir assister à des Mondiaux comme ça, ça va être incroyable.»

Leur entraîneuse Josée Picard a un peu le sentiment de revivre les Jeux olympiques de Calgary, en 1988, où elle avait guidé Isabelle Brasseur et Lloyd Eisler. «C'était nos premiers Olympiques, c'était vraiment impressionnant d'être chez nous, a-t-elle relaté. Mais là, dans notre propre Québec, ce le sera encore plus.»

Si le Canada a accueilli les Championnats du monde de l'Union internationale de patinage (ISU) à 10 reprises, la dernière fois à London en 2013, ils ne se sont déroulés qu'une seule fois au Québec, à Montréal, en 1932. La grande Norvégienne Sonja Henie, triple championne olympique, y avait décroché le sixième de dix titres.

«Le grand coup»

Patinage Québec est à l'origine de la candidature entérinée par le conseil de l'ISU en juillet. «Il y a deux ans, le conseil d'administration s'est donné comme objectif de se positionner au niveau international, a expliqué le président Jocelyn Proulx. Ça a coïncidé avec une demande de la Ville de Montréal pour qu'on organise des événements internationaux. On a décidé d'y aller pour le grand coup.»

Au printemps 2016, une délégation de la fédération québécoise s'est rendue à Boston, où avaient lieu les Mondiaux. Après des rencontres avec des représentants du comité organisateur et de la fédération américaine, Patinage Québec a décidé de soumettre une candidature à Patinage Canada.

La ville de Québec a été considérée, mais l'attrait et le marché de la métropole et l'implication du producteur evenko ont fait pencher la balance, a indiqué Benoit Girardin, membre du comité organisateur.

À l'origine, l'ISU souhaitait que les Championnats se déroulent la dernière semaine de mars, en même temps que la fin du calendrier régulier du Canadien. Dans le même contexte en 2016, les Bruins de Boston avaient raté les séries.

«C'était une crainte pour l'équipe de Geoff Molson [président du Canadien] et de Jacques Aubé [directeur général d'evenko] d'amener l'événement si tard, a souligné M. Girardin. On a donc négocié avec l'ISU pour le faire une semaine avant, du 16 au 22 mars, pour ne pas [envoyer] l'équipe sur la route trop près des séries.»

Les Championnats du monde de l'ISU recevront 200 patineurs en provenance de 50 pays qui se disputeront les médailles dans quatre disciplines: femmes, hommes, couple et danse. Une audience internationale de 150 millions de téléspectateurs est annoncée.

Le comité organisateur prévoit que son budget d'exploitation «frôlera» les 20 millions de dollars, soit un peu moins que celui des Championnats du monde de gymnastique, qui se dérouleront au Stade olympique du 2 au 8 octobre, a précisé M. Girardin.

Ce dernier s'attend à ce que le Centre Bell fasse salle comble, comme à Helsinki en 2017, ce qui équivaudrait à des revenus de billetterie d'environ 8 millions. Les trois ordres de gouvernement devraient contribuer au financement.

Patinage Québec prévoit que la tenue des Championnats du monde à Montréal favorise la pratique de ce sport dans la province. «Les jeunes sont stimulés par ça, a dit le président Jocelyn Proulx. C'est stimulant pour les clubs, mais aussi pour les athlètes qui cognent à la porte, comme Charlie Bilodeau et Julianne Séguin, qui l'ont déjà fait.»