Appel du collègue Vincent Brousseau-Pouliot, correspondant de La Presse à Paris jusqu'à la fin de l'été et qui couvrira l'arrivée du Tour de France dimanche sur les Champs-Élysées: «Je me trompe, ou c'est le Tour le moins intéressant depuis des années?»

Vincenzo Nibali était en plein milieu de la montée finale vers Hautacam. Il venait de passer comme une fusée à côté de Mikel Nieve, dernier rescapé de l'échappée. Le valeureux Espagnol n'allait pas sauver le Tour des Sky, pas plus que son coéquipier Vasil Kiryienka, arrivé troisième mardi.

Comme il le fait chaque fois que l'occasion se présente depuis la deuxième étape à Sheffield, Nibali a gonflé un peu plus la marge confortable qui le sépare de ses poursuivants. Jamais de grands coups de massue, mais de petits coups de marteau continus qui permettent d'enfoncer le clou tout aussi bien.

Avec une priorité de plus de sept minutes sur Thibaut Pinot, nouveau deuxième, on peut dire qu'il est bien planté. «Je voulais gagner l'étape pour l'équipe qui a travaillé si fort pour moi, a expliqué le maillot jaune. C'est important de gagner dans les Pyrénées. Je ne pensais pas vraiment au classement général.»

Rien à reprocher à Nibali, un champion digne qui s'est montré magnanime quand les circonstances s'y prêtaient (voir la première victoire de Majka). De quoi raviver la flamme des tifosi en mal de héros depuis la disparition de feu Marco Pantini, dernier vainqueur italien en 1998.

Non, Vincent, ce ne sera pas suffisant pour que le 101e Tour de France passe à l'histoire.

Bien sûr, si Nibali a pu faire cavalier seul, c'est la conséquence directe des abandons de Christopher Froome et d'Alberto Contador. Il reste que le dernier à avoir écrasé l'épreuve de la sorte est Lance Armstrong, de triste mémoire. Loin de nous l'idée de faire des amalgames douteux.

Pour soutenir l'intérêt, il faut se tourner vers la lutte pour les deux autres places sur le podium, impliquant deux Français, Thibaut Pinot et Jean-Christophe Péraud, désormais deuxième et troisième.

À voir la façon dont il a attaqué la descente du Tourmalet, Alejandro Valverde n'a pas trop confiance en son contre-la-montre de demain, dernier moment pour se démarquer. Bien orchestrée par la Movistar, avec Izagirre et Herrada qui ont attendu leur leader, la manoeuvre a cependant fait long feu. Le gagnant de la Vuelta 2009 a concédé 49 secondes à Pinot, reculant de la deuxième à la quatrième place.

S'il a le mérite d'essayer, Valverde, 34 ans, a encore une fois montré ses limites. Difficile de ne pas regretter Nairo Quintana, dauphin de Froome l'an dernier, que Movistar a préféré aligner sur le Giro en 2014. Avec succès, il faut le dire.

Quinze secondes séparent Pinot, Péraud et Valverde. Sur papier, Péraud est le plus fort du trio au contre-la-montre. Mais on dit que Pinot s'est amélioré et Valverde n'est pas un cul-de-jatte non plus. Sur 54 kilomètres, les écarts pourraient être importants.

Aucun coureur français n'est monté sur le podium final du Tour depuis Richard Virenque en 1997. Alors, Vincent, sens-tu la fièvre te gagner dans ton appartement du XIe? Imagine-toi dans nos cabanes au Canada.