Le 29 avril dernier, le patineur artistique Guillaume Cizeron, établi à Montréal depuis 2014, a lancé en France Ma plus belle victoire, récit intime dévoilant les souffrances liées à son homosexualité et à son identité de genre. Son livre, qui atterrit ce vendredi sur les rayons au Québec, a relancé une importante conversation sur la diversité sexuelle dans l’Hexagone.

À sept mois des Jeux d’hiver de Pékin, où il tentera de gagner une première médaille d’or olympique avec sa partenaire Gabriella Papadakis, le Montréalais d’adoption est soulagé d’avoir publié son livre au printemps.

« Quand les journalistes sportifs demandent pourquoi les athlètes font leur coming out après leur carrière, c’est peut-être parce que ça prend vraiment beaucoup de temps et d’énergie, dit-il. C’est correct dans une période creuse, mais durant les compétitions, qui vont reprendre en septembre et continuer non-stop jusqu’aux Jeux, ça aurait été l’horreur ! »

En multipliant les entrevues dans les médias français, il sent que le livre a relancé une conversation « qui était un peu morte ». D’autant qu’il a devancé de seulement deux semaines la publication d’un livre sur le même sujet écrit par le footballeur Ouissem Belgacem.

« Nous sommes des athlètes qui ont vécu des souffrances à la fois différentes et similaires. Je trouve ça cool d’entendre les voix d’autres sportifs et de faire partie de cette discussion. C’est devenu un sujet d’actualité grâce à moi, Ouissem et d’autres personnalités sportives. »

Vague d’amour

Suivi par plus de 110 000 personnes sur Instagram, Cizeron a reçu une déferlante de messages depuis la sortie de son récit biographique. « Ce qui me touche le plus, ce sont les gens qui me racontent comment le livre a eu un impact sur leur vie. Un lecteur m’a dit qu’il avait réussi à se mettre dans la peau de son père, en lisant ce que j’avais vécu avec le mien. Du coup, il a décidé d’en parler avec son père, et ça s’est très bien passé. »

En effet, le patineur raconte dans son livre combien certaines paroles homophobes lancées à la dérobée par son père avaient été blessantes. Il précise ensuite que ce dernier s’en est profondément voulu, mais certains médias ont mis l’accent là-dessus. « Même si j’écris dans le livre tout le respect et l’amour que j’ai pour mes parents, quelques journalistes ont grossi le trait pour attirer l’attention, ce qui a blessé mon père. C’est délicat pour mes parents. Ils n’ont pas l’habitude d’être dans l’œil médiatique. »

Cela dit, la majorité des lecteurs ont d’abord lu une histoire de résilience et d’acceptation.

Bien peu de gens ont dit :
“Mon Dieu, quels parents horribles !” Ils apparaissent plutôt comme des parents aimants. C’est un livre qui appelle à la compassion.

Guillaume Cizeron

Un ouvrage qui expose aussi dans le menu détail les violences physiques, verbales et psychologiques qu’a vécues le patineur artistique, en raison de son sport, de son côté féminin et de son orientation sexuelle. Une réalité qui appartient au passé. Ou presque. « Des journalistes russes ont déjà dit que dans notre couple, ils ne savaient pas qui était l’homme et qui était la femme, ce que j’ai pris comme un compliment. »

Si son quotidien est désormais dénué d’homophobie, il est conscient que ce n’est pas la réalité de tous. « Quand je vois des proches qui se font tabasser au Québec, ça me met en colère ! C’est fou qu’il y ait encore ce genre de choses. J’espère ne plus jamais vivre ça. »

En 2021, Guillaume Cizeron se dit à 99 % en paix avec son orientation sexuelle et son identité de genre. « Ça n’affecte pas ma vie privée ni publique, pas plus que ma sexualité ni mon estime de moi. Je pense qu’écrire ce livre a été un pas en plus dans cette direction.

« C’était intimidant de partager mon histoire ainsi, mais ça m’a permis d’être plus assumé dans mon personnage public. »

Relisez notre entrevue avec Guillaume Cizeron publiée le 1er mai 2021