Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Mathias Brunet

Les Golden Knights de Vegas doivent encore en faire des cauchemars. Ils ont été éliminés des séries éliminatoires en raison de ce règlement ridicule. Dans une course pour la rondelle dans le coin de la patinoire, en prolongation, dans le cinquième match de la finale de l’Association de l’Ouest, le défenseur Zach Whitecloud a donné un coup de golf sur le disque pour empêcher Andrew Cogliano de le saisir avant lui. Non seulement Whitecloud était hors d’équilibre, mais le bâton de Cogliano le gênait sur la séquence. Il n’avait AUCUNE intention de dégager la rondelle dans les gradins. Celle-ci se trouvait dans le coin et personne ne menaçait le filet de Robin Lehner. Les Stars de Dallas ont marqué en supériorité numérique et les Golden Knights se sont retrouvés en vacances. En saison régulière, ce type de punition a été imposé dans une proportion de 3 %. En séries, le taux est passé à 21 %. Parce qu’en éliminatoires, on le sait, les arbitres préfèrent généralement « laisser jouer ». Mais quand la rondelle est envoyée dans les gradins sans que personne y touche, un peu gênant de ne pas donner de punition… Ce règlement devrait être révisé. La décision devrait revenir au bon jugement de l’arbitre. Le joueur en question voulait-il vraiment trouver le moyen d’arrêter le jeu parce que débordé ou épuisé ? Ça serait plus logique, non ?

Miguel Bujold

Normalement, lorsqu’un match de hockey est à égalité au milieu de la troisième période, les 10 dernières minutes de jeu devraient être les plus enlevantes. C’est rarement le cas. Plusieurs équipes choisissent plutôt de fermer le jeu pour s’assurer d’aller chercher un point au classement, une stratégie qui peut ultimement permettre à une équipe d’accéder aux séries éliminatoires si elle fonctionne assez souvent. Il est également illogique que tous les matchs de la saison n’aient pas la même valeur alors que certains valent trois points au classement tandis que d’autres en valent deux. La meilleure façon de corriger cette incongruité serait tout simplement d’accorder trois points à une équipe qui l’emporte en temps réglementaire. Par le fait même, le spectacle serait assurément plus relevé en troisième période.

Simon Drouin

On s’entend, la façon d’appliquer les règlements dans la Ligue nationale de hockey est souvent stupide en elle-même. Elle varie selon le pointage, le moment du match, le score, le partage des punitions entre les deux équipes, la réaction de la foule, les jérémiades des entraîneurs, etc. Digne de la WWE. Parlant de lutte, le comble de la stupidité appartient au règlement 60.3, selon lequel un coup de bâton au-dessus des épaules qui « provoquera un saignement ou autre » est passible d’une double mineure. Le résultat est donc plus important que le geste lui-même. Depuis l’instauration de ce règlement, on assiste au spectacle disgracieux de joueurs se retournant la lèvre sous les yeux d’arbitres inquisiteurs vérifiant la possibilité d’un quelconque épanchement sanguin. S’il vous plaît. Quand je vois ça, je songe à cette célèbre photo de Maurice Richard serrant la main du gardien Sugar Jim Henry après la demi-finale de 1952, une coulisse de sang glissant de son œil gauche. Je me demande ce que le Rocket penserait du règlement 60.3.

Frédérick Duchesneau

Les règlements absurdes ne manquent pas dans le sport. Mais celui-ci n’est pas seulement incompréhensible, il est également le plus injuste de tous. Qu’un tirage à pile ou face détermine la première possession du ballon en prolongation dans la NFL, pourquoi pas ? Ça pourrait aussi bien être un roche-papier-ciseau ou un duel de main chaude. Par contre, que l’équipe en défense, si elle est victime d’un touché sur cette première possession en temps supplémentaire, n’ait même pas l’occasion de répliquer, c’est tout simplement idiot. Le collègue Bujold me rappelle que ça a déjà été pire. Il n’y a pas si longtemps, même un placement sur la première possession en prolongation mettait fin au match. Aujourd’hui, l’équipe qui a perdu le tirage au sort a la chance d’envoyer son attaque sur le terrain, à moins que l’adversaire ait marqué un touché. Un pas dans la bonne direction. Mais pourquoi ne pas tout simplement donner à chaque équipe le même nombre de possessions avant de trancher le débat ? Pourtant, le pire des scénarios s’est produit en 2016, lorsque les Patriots de la Nouvelle-Angleterre ont gagné le Super Bowl de cette façon contre les Falcons d’Atlanta. Une victoire bien méritée après une remontée extraordinaire au quatrième quart. Mais ça ne change rien au ridicule de cette règle.

Richard Labbé

La folklorique Ligue canadienne de football a l’habitude de faire différent. C’est entendu. À votre connaissance, est-ce que plusieurs équipes de football ont tenu des entraînements dans le stationnement d’un hôtel, comme l’a fait jadis le regretté Posse de Las Vegas ? Est-ce que d’autres ligues ont déjà eu droit à un spectacle de la mi-temps offert par une chanteuse qui arrive à bord d’un traîneau tiré par des chiens ? Bien sûr que non. Il ne faut donc guère s’étonner de constater que la LCF, encore à ce jour, décide d’accorder un point quand même lorsqu’un botteur rate son botté de placement. On peut bien chercher tant qu’on veut, on va avoir bien du mal à trouver une autre ligue qui récompense un échec par un point. Par le passé, cela a quelques fois mené à des pièces de jeu hilarantes, par exemple quand un joueur placé dans la zone des buts tente de rebotter le ballon à l’extérieur pour éviter de concéder ce point du perdant, et que l’autre équipe tente de rebotter de nouveau le ballon, et que les deux équipes se renvoient l’objet comme ça pendant de très longues secondes. Mais bon, quand on a bu 12 bières en bedaine, souvent, on finit par trouver que c’est divertissant.

Guillaume Lefrançois

En soi, le règlement stipulant qu’une pénalité prend fin si l’équipe adverse marque un but n’est pas stupide. Il y a en effet une certaine logique : en théorie, un joueur est puni pour un geste qui a nui aux chances de l’adversaire de marquer. Si l’adversaire marque, justice a été rendue. Le problème, ce sont les circonstances dans lesquelles ce règlement a été adopté, en 1956. C’était en réaction, notamment, à la grande domination du Canadien, qui pouvait alors déployer Maurice Richard, Jean Béliveau, Bernard Geoffrion et Doug Harvey en avantage numérique, sans oublier un jeune de 20 ans nommé Henri Richard. Quelques mois plus tôt, Béliveau avait même inscrit trois buts pendant un même avantage numérique. Dans une ligue à six équipes, avec les règlements de l’époque, ce genre de domination était en effet possible. Aujourd’hui ? Pas autant. Le plafond salarial et la loterie du repêchage font en sorte qu’il est dur d’assembler une unité de cinq aussi dévastatrice. Et en décrétant que les deux minutes d’une pénalité doivent être écoulées en entier, on ajoutera un incitatif supplémentaire pour du hockey propre. Un joueur file en échappée ? Aussi bien le laisser aller et risquer d’accorder un but, plutôt que de prendre une pénalité et risquer de s’en faire marquer deux !

Simon-Olivier Lorange

Qu’elles paraissent longues, les minutes passées à agrandir encore et encore une image pixellisée afin de déterminer, au millimètre près, si un patin touche à la ligne bleue ou si une rondelle a franchi la ligne des buts… Mais ça reste de bonne guerre. On s’étonne toutefois que les entraîneurs de la LNH ne puissent pas, comme au football, contester la décision d’un arbitre après qu’une pénalité a été imposée. Les Golden Knights de Vegas en ont peut-être été les victimes les plus évidentes des dernières années : au septième match du premier tour contre les Sharks de San Jose en 2019, Cody Eakin a été expulsé du match pour un soi-disant coup à la tête de Joe Pavelski. Les requins ont répliqué avec quatre (!) buts au cours de l’avantage numérique qui a suivi. Or, le bâton d’Eakin avait touché Pavelski à la poitrine et non à la tête – un geste qui aurait dû lui valoir une simple pénalité mineure. Aucun mécanisme ne permettait aux arbitres de se raviser, mais leur bourde était si flagrante que la LNH s’est excusée aux Knights. Il faudrait que ça change. Parce qu’on est en 2020.

Michel Marois

On parle beaucoup actuellement de la possibilité de cesser de disputer les matchs de simple masculin en Grand Chelem au meilleur de cinq manches. Le numéro un mondial Novak Djokovic a récemment pris position pour un changement et plusieurs sont de son avis. Le Serbe a lui-même disputé plusieurs marathons mémorables de près de cinq heures et c’est vrai qu’il est un peu ridicule d’obliger des athlètes à aller si loin dans leurs réserves physiques et mentales. Cela dit, je suis de ceux qui croient qu’on ne doit pas toucher à cette règle. Les tournois de Grand Chelem ont introduit au cours des dernières années des règles limitant la longueur des dernières manches et donc celle des matchs. Chaque année, les grands tournois sont marqués par ces duels de cinq manches avec leurs retours improbables ou les défaites surprises. Ces matchs ont marqué l’histoire du tennis, comme ils avaient marqué l’histoire de la Coupe Davis, avant qu’on en fasse un « spectacle ». Le vrai ridicule, dans ce cas, serait de ramener les tournois du Grand Chelem au même niveau.

Alexandre Pratt

Un frappeur peut courir vers le premier but si le receveur échappe une troisième prise. Euh… pourquoi ? Peut-être qu’en 1874, c’était la seule façon pour un mauvais frappeur de 9 ans de se rendre sur les sentiers. Mais dans le baseball majeur ? Vraiment ?