Comment réagiraient les partisans du Canadien si le DG Marc Bergevin partait plusieurs semaines en Amérique du Sud pendant la saison de hockey ? Les serveurs de Facebook chaufferaient tellement que la température de la planète augmenterait de 1 °C.

OK. 2 °C.

Pourtant, il existe un précédent. Qui s’est même terminé sans crise. Ça s’est passé chez les Athletics d’Oakland, en 2006. L’homme au cœur du livre Moneyball, le DG Billy Beane, est parti s’installer en Allemagne en plein milieu de l’été. Il y est resté un mois. Une décision audacieuse. Ou dingue. Selon votre tolérance au risque.

Son plan ?

Assister à la Coupe du monde de soccer. Pour s’inspirer des meilleures pratiques. Pour apprendre des meilleurs tacticiens. Pour élargir ses horizons. Il est revenu d’Europe la tête pleine d’idées. Notamment pour améliorer la nutrition de ses joueurs. Pendant la décennie suivante, il a poursuivi ses recherches. Au point de se joindre à un club de soccer des Pays-Bas comme conseiller spécial.

Intense ? Un peu, j’en conviens. Mais la plupart des dirigeants d’équipes sportives partagent avec lui une curiosité excessive. Ils sont constamment en phase d’auto-évaluation. En remise en question. À la recherche des meilleures pratiques d’ailleurs. De Wall Street. De la Silicon Valley. De la NASA. Des départements de psychologie. Des autres franchises.

Des exemples ? L’entraîneur de soccer Pep Guardiola est fasciné par le joueur d’échecs Garry Kasparov. Le DG des Maple Leafs, Kyle Dubas, admire le travail des Cubs de Chicago. Si ça vous intéresse, le site Colligan Hockey recense les lectures les plus inspirantes des dirigeants d’équipes de la LNH.

J’ai profité de notre entrevue mercredi avec le président du Canadien, Geoff Molson, pour connaître ses sources d’inspiration. « J’essaie de lire autant que possible, m’a-t-il répondu. Surtout des articles [qui ouvrent] mes perspectives. » Ses expériences en voyage lui ont aussi donné plusieurs idées.

Voici quatre équipes qui l’inspirent.

LES ALL BLACKS DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE

PHOTO MARK BAKER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

L’équipe nationale de rugby de la Nouvelle-Zélande est surtout connue pour son haka, ce rituel dansé et chanté avant une partie pour impressionner l’adversaire, mais également pour son palmarès sportif des plus impressionnants.

L’équipe nationale de rugby de la Nouvelle-Zélande est surtout connue pour son haka, ce rituel dansé et chanté avant une partie pour impressionner l’adversaire. Mais c’est aussi une formidable équipe sportive, au palmarès enviable. Pour vous donner une idée, les All Blacks ont trôné au sommet du classement mondial sans interruption de 2009 à 2019.

« Quand je regarde la culture des All Blacks de la Nouvelle-Zélande, je vois une culture qui est solide. C’est inspirant de voir leur façon de faire comme équipe. »

LES PREDATORS DE NASHVILLE

PHOTO SANFORD MYERS, ARCHIVES THE TENNESSEAN VIA ASSOCIATED PRESS

Il règne une ambiance fébrile au Bridgestone Arena de Nashville avant les matchs de séries des Predators.

Dans le cadre de ses fonctions, Geoff Molson assiste souvent aux matchs du Canadien à l’étranger. Il s’est notamment rendu à Nashville, une ville qui – à l’image de Montréal – est réputée pour être festive. Il trouve que les Predators font bien les « petites choses ».

« Je [regarde] les présentations. Je donne des idées à mes gens. On n’est pas parfaits. Même si ce qu’on fait est très bon, on veut toujours s’améliorer. À Nashville, il y a des “chants”. Lorsqu’ils annoncent le joueur [adverse], par exemple, le numéro 6, Shea Weber. Les gens crient : sucks [rires]. Après ça, le coach Claude Julien. You suck too. Je ne pense pas qu’on soit comme ça au Québec. Mais c’est le fun. Ça nous donne des idées. »

LES GOLDEN KNIGHTS DE VEGAS

PHOTO L. E. BASKOW, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

À peine arrivés dans les cercles de la LNH, les Golden Knights de Vegas ont réinventé l’offre de divertissement avant les parties locales et pendant les temps morts.

Le petit nouveau dans la LNH bouscule les traditions. Il a réinventé l’offre de divertissement avant la partie et pendant les temps morts. Une nouvelle énergie que Geoff Molson accueille avec enthousiasme. « Vegas a ouvert les yeux à toutes les équipes pour penser différemment. C’est très bien fait. C’est nouveau. C’est le fun. Est-ce qu’on veut faire exactement ce qu’ils font ici ? Non. Le Canadien a 112 ans. On a un héritage. Une histoire. On est un peu moins rock’n roll. C’est quand même important ici [de respecter cela]. »

LE FC BARCELONE

PHOTO NACHO DOCE, ARCHIVES REUTERS

Pour ses partisans, le FC Barcelone, c’est més que un club. C’est plus qu’un club de soccer, pour reprendre le slogan de l’équipe.

Il y a quelques années, Geoff Molson est allé voir jouer le FC Barcelone à domicile, au légendaire Camp Nou. Une expérience marquante. « Les partisans sont incroyables. Les nôtres aussi. Mais ça, c’est à un autre niveau. Les chansons. L’avant-match. Les bars qui sont pleins. Ça m’inspire, pour ensuite inspirer nos gens qui s’occupent [de l’expérience client]. Comment peut-on réussir à avoir ça ici ? »

Il faut préciser que pour les partisans de l’équipe, le FC Barcelone, c’est més que un club. C’est plus qu’un club de soccer, pour reprendre le slogan de l’équipe. C’est un symbole fort du nationalisme catalan. Son ancien entraîneur-chef, Pep Guardiola, est un indépendantiste catalan affiché. Le club a toujours fait une grande place aux joueurs locaux.

Les partisans sont aussi très impliqués dans le fonctionnement de l’équipe. Ce sont littéralement eux qui choisissent les dirigeants de l’équipe, lors d’élections dignes de courses à la chefferie d’un parti politique. Pour paraphraser Jay Du Temple à Occupation double : c’est la fusion de Capitaine Rebondissements et de Lady Pagaille – tous les jours !

À bien y repenser, c’est peut-être un peu rock’n roll pour le Canadien.