À l’occasion de son premier discours officiel prononcé à Montréal, le nouveau chef de la direction du Comité olympique canadien, David Shoemaker, a charmé son auditoire et soufflé sur les braises d’une nouvelle candidature pour des Jeux au Canada. À Montréal ? « Pourquoi pas ? »

Le rejet d’une candidature de Calgary pour les Jeux olympiques de 2026 n’a pas refroidi David Shoemaker. Le nouveau chef de la direction du Comité olympique canadien (COC) ne rêve pas d’une autre tentative. Il en fait une « priorité ».

Été ou hiver, 2030, 2032, 2034 ou 2036. Peu importe. Shoemaker souhaite de nouveaux Jeux au Canada et s’engage à sonder l’intérêt « partout à travers le pays ». Montréal ? « Pourquoi pas ? », répond le dirigeant de 48 ans, entré en fonction au début de l’année. « Si la Ville de Montréal veut explorer [cette possibilité], nous allons avoir cette conversation. »

Autant son prédécesseur Chris Overholt s’était fait discret au Québec durant son mandat de sept ans, marqué par l’affaire Marcel Aubut, autant Shoemaker a frappé dans le mille à titre d’invité d’honneur d’un déjeuner-causerie du Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM), mardi midi, dans un hôtel du Vieux-Montréal.

Les Jeux de 1976 ont été parmi les meilleurs de l’histoire olympique. Je pense que l’esprit sportif et tout ce qui va si bien ici dans la province de Québec en sport viennent des Jeux de 1976.

David Shoemaker

Saluant la présence de Richard Pound, membre du Comité international olympique, et de Walter Sieber, directeur général des sports pour le comité organisateur en 1976, Shoemaker a rappelé que Tokyo recevra les Jeux pour la deuxième fois l’été prochain, après une première expérience en 1964.

« C’est entièrement possible que les Jeux puissent revenir à Montréal. Je pense que Montréal peut accueillir le monde de façon spectaculaire. »

Le natif d’Ottawa a prononcé une allocution d’une vingtaine de minutes durant laquelle il a exposé ses priorités et les ambitions de son organisation pour les prochains Jeux. Il s’est exprimé en français du début à la fin, s’en tenant à un texte qu’il semblait bien comprendre.

La surprise est venue durant un échange avec l’ex-plongeuse olympique Roseline Filion, à qui il a répondu en français alors qu’elle lui a fait la fleur de lui poser une question en anglais, sa langue maternelle. Même ceux qui le connaissaient ont été surpris de sa maîtrise de la langue de Molière.

« J’ai marié mon épouse, j’ai convaincu l’ancien commissaire David Stern de m’accueillir dans la NBA, j’ai tenu des réunions avec de grandes stars comme Shaquille O’Neal, Kobe Bryant, Stephen Curry ou les sœurs Williams, mais je n’ai jamais été aussi nerveux qu’aujourd’hui », a néanmoins assuré Shoemaker au début de l’entretien.

Parcours étoffé

En quelques mots, le secrétaire général du COC a résumé son parcours professionnel très étoffé. Diplômé en science politique et en droit, il a d’abord été auxiliaire juridique de l’ex-juge en chef de la Cour suprême Antonio Lamer. Il a ensuite pratiqué le droit pendant sept ans pour deux firmes à New York, où ses clients comprenaient la Ligue nationale de hockey, l’Association du tennis professionnel, la Major League Soccer et les Eagles de Philadelphie.

Shoemaker a déménagé à Pékin, où il a dirigé le volet asiatique de l’Association professionnelle du tennis féminin (WTA), avant d’être promu à la présidence en 2009. Avec la WTA, il a contribué à la signature d’ententes de commandites de plusieurs dizaines de millions et s’est assuré de la parité des bourses avec les hommes aux tournois de Roland-Garros et de Wimbledon. Cette réalisation a été chaudement applaudie mardi à Montréal.

Le Canadien a ensuite occupé pendant sept ans le poste de chef de la direction de NBA Chine, l’un des marchés de basketball les plus importants à l’extérieur des États-Unis.

Après son retour au pays l’an dernier, Shoemaker a été recruté par le COC. Il convient que cette organisation est plus modeste, mais il voit sa nouvelle fonction comme « un service public ». « C’est un grand rêve pour moi de me retrouver dans ce rôle, a-t-il dit en entrevue. […] J’aime le sport. J’aime aussi le business. C’est une combinaison merveilleuse. »

L’augmentation des revenus et « l’élargissement des partenaires » du COC sont l’une des trois priorités du chef de la direction. L’amélioration du système sportif, en collaboration avec les fédérations provinciales et les associations territoriales, en est une autre. « Nous aidons les fédérations [nationales] qui, dans certains cas, ont atteint leur limite financière. »

Shoemaker juge aussi « très important que le Canada ne perde pas le goût d’accueillir le monde à des Jeux olympiques ici ».

Des leçons à tirer

Le référendum perdu de Calgary, il y a un an, et le retrait d’autres villes potentiellement candidates un peu partout en Europe témoignent de la « responsabilité » du COC de mieux communiquer son message, plaide-t-il.

« Il y a beaucoup de leçons [à tirer] de Calgary et leurs efforts pour 2026. […] Selon mon expérience, les Olympiques peuvent transformer une ville avec les institutions et les infrastructures sportives partout. Et aussi avec les choses qui sont très importantes pour les citoyens comme le logement abordable, les systèmes de transport public et les autres [éléments] qui sont connectés avec les Olympiques dans une ville. »

En présence de 19 athlètes olympiques, Shoemaker a évoqué les champions québécois d’hier et d’aujourd’hui, de Gaétan Boucher à Mikaël Kingsbury, de Christine Girard à Charles Hamelin. Il a fait part de ses ambitions pour les prochains Jeux d’été de Tokyo, qui s’ouvriront « dans 248 dodos »…

« On a grand espoir avec des athlètes très bien connus du grand public, comme Andre De Grasse, Rosie MacLennan ou Penny Oleksiak, Kylie Masse et Maggie MacNeil, des femmes très puissantes en piscine. On a aussi Mohammed Ahmed, qui a gagné une médaille aux Championnats du monde [d’athlétisme] à Doha. »

Shoemaker a même parlé du Canadien et de sa fiche de « 11-5 ». « Ça sent la Coupe ici, à Montréal ! » Tout pour se faire aimer…