Le hasard a voulu que le favori de la foule, Pierre Lavoie, franchisse la ligne d'arrivée quelques instants avant la championne féminine, dimanche après-midi à la première présentation du Ironman à Mont-Tremblant.

L'Américaine Jessie Donovan, gagnante de l'épreuve précédente à Lake Placid, a été accueillie chaleureusement au pied de la montagne par une foule très enthousiaste, mais son moment de gloire a été de courte durée.

Lavoie, avantageusement connu au Québec pour promouvoir chez les jeunes les vertus de l'exercice physique et d'un mode de vie sain, entre autres avec son «Grand défi Pierre-Lavoie», venait de signer l'exploit du jour avec une neuvième place, en 9h30 minutes... à 48 ans!

«Si l'on tient compte du niveau de difficulté du parcours, il s'agit sans doute de ma meilleure performance en carrière. C'était bien de me retrouver dans le peloton avec les pros», a mentionné après la course celui qui a pourtant une trentaine d'épreuves du genre derrière la cravate.

«Quand l'Olympien Simon Whitfield a déclaré qu'il avait sacrifié ses quatre dernières années, c'est venu me chercher, a-t-il poursuivi. J'ai sacrifié mon été et ma famille a fait des sacrifices. Ma fille a besoin de moi et j'aurais pu être davantage avec elle.»

Qu'est-ce qui pousse alors un homme de 48 ans à s'imposer de tels sacrifices, à repousser ses limites et nager pendant 3,8 kilomètres, courir 180 kilomètres à vélo et 42,2 kilomètres à pied après des milliers d'heures d'entraînements?

«Je sais que je suis devenu un modèle pour les jeunes, répond-il. Je veux montrer l'exemple et leur prouver que je ne fais pas que parler.»

Première victoire pour Romain Guillaume

En l'absence des 25 meilleurs athlètes au monde, le Français Romain Guillaume en a profité pour dominer l'épreuve du début à la fin et remporter son premier Ironman en 8h40, presque sept minutes devant son plus sérieux rival, l'Espagnol Alejandro Santamaria, 37e au monde.

Le 27e mondial s'était façonné une avance de presque 20 minutes après la nage et le vélo et a su résister à ses poursuivants lors de l'épreuve de la course à pied.

«Alejandro et Matthew (Russell) m'ont pris dix minutes dans la première boucle, alors j'ai eu mes doutes, surtout que je savais qu'ils couraient ensemble, mais j'ai fait une course parfaite, l'avance m'a suffi, le vélo a vraiment fait la différence.»

Même si la température était idéale pour une telle épreuve, la plupart des athlètes disent avoir souffert.

«Le parcours n'était pas facile, a mentionné Guillaume. À Lake Placid (où il a terminé 3e), il y avait des vallons, mais aussi de longues distances où c'était plat. Ici, ça monte et ça descend continuellement. Le marathon a été vraiment dur.»

Martin Lamontagne-Lacasse, un militaire qui a pris une pause d'un an en 2011 parce qu'il était en mission à Kandahar, a signé la meilleure performance canadienne avec une surprenante 4e place.

«J'ai battu mon record personnel par 20 minutes, a-t-il lancé alors qu'il tentait de reprendre ses forces. J'ai repensé à tous les gens que j'ai cotôyé à Kandahar en franchissant la ligne d'arrivée. C'est drôle que la rue sur laquelle prend fin l'épreuve s'appelle l'avenue Kandahar!

«La course a été dure, j'avais mal aux cuisses et les crampes me prenaient, mais j'ai pu gérer mes efforts et les gens m'ont donné un deuxième souffle ici dans le village, c'était fou l'ambiance, a poursuivi Lamontagne-Lacasse. Ils m'ont permis d'oublier la douleur. Il y avait tellement d'ambiance ici, c'est comparable au Ironman à Hawaii quand on s'approche de l'arrivée!»

Pierre-Yves Gigou a terminé sixième et Charles Perreault 20e.

Un succès auprès du public et des athlètes

S'il n'a pas attiré la crème de l'élite mondiale, le premier Ironman 70,3 à être présenté en sol québécois a été un succès de participation et d'engouement à Mont-Tremblant.

Et parole de Pierre Lavoie, l'épreuve fera des petits.

«Cette compétition deviendra un moteur pour les clubs d'Ironman au Québec. Vous verrez de futurs champions québécois pousser. Des Peter Reid, qui ont gagné (le Championnat mondial) à Hawaii, vous en verrez d'autres d'ici cinq ans. J'avais plein d'amis qui me courraient après aujourd'hui. Multipliez ce nombre par 10 dans les prochaines années!»

Pierre Lavoie estime que l'événement dont il est le porte-parole grossira rapidement.

«Dans les trois prochaines années, Tremblant aura le meilleur Ironman du monde. Impossible de ne pas déjà sentir un grand sentiment d'appartenance avec l'enthousiasme des spectateurs. L'épreuve reviendra pour au moins les 20 prochaines années!»

Conquis par les Québécois

Romain Guillaume, comme la plupart des athlètes français, a été conquis par le Québec et son public.

«J'ai vécu un rêve aujourd'hui de remporter mon premier Ironman et je l'ai vécu en français. La foule était vraiment chaleureuse.»

La championne Jessie Donovan a elle aussi apprécié les charmes de Mont-Tremblant. «Sauf pour la conversion métrique de milles en kilomètres que je devais faire pendant la course et qui m'a donné un peu de fil à retordre...», a-t-elle mentionné en souriant.

Malgré quelques désistements de dernière minute, près de 2500 participants, dont le doyen était âgé de 76 ans, un Australien, et 3000 bénévoles participaient à l'événement.