(Montréal) Les gens qui ont survécu à une crise cardiaque courent un risque accru de nouvel incident s’ils présentent un surplus de poids au niveau de l’abdomen, prévient une étude publiée par le European Journal of Preventive Cardiology.

Des études précédentes avaient démontré que l’obésité abdominale était un facteur de risque important pour un premier infarctus, mais aucune association n’avait jusqu’à présent été documentée entre cette obésité et le risque subséquent de crise cardiaque.

« En fait c’est un peu évident, a commenté le cardiologue Martin Juneau, de l’Institut de cardiologie de Montréal. Quand les auteurs disent que ça n’avait jamais été étudié, c’est comme dire qu’on n’a jamais étudié l’effet du tabac après un infarctus. C’est évident que si ça a un effet pour causer un infarctus, alors ça va avoir un effet pour en causer d’autres. Alors pour moi ça a toujours été une évidence que l’obésité abdominale est une situation qui est très risquée, qui encore aujourd’hui est un petit peu sous-estimée ou méconnue. »

Les chercheurs du prestigieux Karolinska Institute, en Suède, ont suivi plus de 22 000 patients après leur premier infarctus, afin d’étudier l’association entre l’obésité abdominale et des événements cardiovasculaires secondaires. Ils se sont spécifiquement intéressés aux événements causés par des artères obstruées, comme des crises cardiaques (mortelles ou non) et des accidents vasculaires cérébraux (AVC).

La plupart des sujets — 78 % des hommes et 90 % des femmes — souffraient d’obésité abdominale (un tour de taille de 94 centimètres et plus pour les hommes, et de 80 centimètres et plus pour les femmes).

L’obésité abdominale a été associée aux crises cardiaques et aux AVC, indépendamment de facteurs comme le tabagisme, le diabète, l’hypertension et l’indice de masse corporelle. Le tour de taille était un marqueur plus important d’événements secondaires que l’obésité générale.

L’auteure de l’étude, la docteure Hanieh Mohammadi, prévient dans un communiqué que le risque d’événement secondaire était plus élevé chez les patients souffrant d’obésité abdominale, même si ceux-ci prenaient de la médication pour traiter les problèmes de santé qui y sont associés.

« Une des auteures dit qu’une fois qu’ils ont fait leur infarctus, nous on traite toutes les conséquences de l’obésité abdominale, on traite la glycémie qui est élevée avec l’insulinorésistance, on traite l’hypertension, on traite le cholestérol élevé… mais moi ça ne m’étonne pas du tout parce qu’on n’a pas traité la cause, on traite ça avec des pilules !, s’est exclamé le docteur Juneau.

« Pour vous donner une idée, chez une jeune femme, disons 30 à 55 ans (l’obésité abdominale) multiplie le risque (d’infarctus) par trois. »

Plaques déstabilisées

Le type de cellules graisseuses qu’on retrouve au niveau des viscères sécrète des facteurs inflammatoires qui vont entrer dans le système sanguin et déstabiliser les plaques d’athérosclérose au niveau des artères coronaires, a expliqué le docteur Juneau, en plus de déranger la circulation cérébrale et de causer plus de démence précoce.

« Ça affecte tout le système, cette graisse-là, a-t-il dit. L’inflammation va contribuer à fragiliser les plaques d’athérosclérose sur les coronaires qui vont causer des caillots. Ce que vous ne voulez pas, ce sont des lésions sur vos coronaires inflammées et friables. Vous voulez qu’elles soient stabilisées. Et pour les stabiliser, ça prend une alimentation anti-inflammatoire, comme méditérranéenne ou végétarienne, et tous les ingrédients d’une (alimentation) méditérranéenne — les fruits, les légumes, les grains entiers, les oméga 3 — ça vient stabiliser les plaques parce que c’est très anti-inflammatoire. »

Perdre du poids n’est pas facile, reconnaît le docteur Juneau, et ce n’est pas en multipliant les redressements assis qu’on se débarrassera de notre graisse abdominale. La seule façon de régler le problème est de modifier nos habitudes de vie, en commençant par l’alimentation et l’activité physique.

« Si vous ne changez pas votre (alimentation), si vous faites juste prendre des pilules, l’inflammation est là et le risque est là, a-t-il dit. Ça renforce le message pour les cliniciens […] que même si on a traité avec des pilules pour la pression, le cholestérol et le diabète, si on n’a pas réglé l’obésité abdominale, on n’a pas réglé grand-chose. Ça, c’est fondamental. »