Des étudiants universitaires qui ont limité leur utilisation des réseaux sociaux à une trentaine de minutes par jour ont ensuite obtenu de meilleurs résultats lors de tests mesurant leur anxiété, leur dépression, leur solitude et leur crainte de rater quelque chose, rapportent des chercheurs américains.

D’autres tests ont montré qu’ils abordaient apparemment la vie de manière plus optimiste, selon l’étude publiée par le journal Technology Mind and Behavior.

Des bienfaits pour la santé mentale ont été constatés même chez les participants qui ont parfois excédé la limite de 30 minutes par jour.

Cette étude permet vraiment de démontrer que la réduction du temps consacré aux réseaux sociaux est responsable de l’amélioration du bien-être psychologique des jeunes, a commenté la professeure Caroline Fitzpatrick, une experte de l’Université de Sherbrooke qui est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’utilisation des médias numériques par les enfants.

« On va manipuler un peu les habitudes médiatiques des jeunes, on va demander aux jeunes d’autoréguler leurs habitudes, a-t-elle dit. Puis on n’intervient pas, on les laisse agir comme ils ont l’habitude de le faire. (De cette manière), on peut vraiment venir appuyer des relations de cause à effet. Je pense que c’est pour ça que cette étude a une grande valeur. »

Avant le début de l’étude, les sujets consacraient en moyenne près de trois heures et trente minutes aux réseaux sociaux chaque jour, principalement Instagram, Snapchat, TikTok, YouTube, et Facebook. TikTok était l’application la plus populaire, avec une utilisation moyenne de 95 minutes par jour.

Environ la moitié des participants présentaient des symptômes modérés ou élevés d’anxiété ; 59 % des symptômes modérés ou élevés de dépression ; et 44 % rapportaient un sentiment élevé de solitude.

L’expérience a été réalisée auprès de 230 étudiants de l’université Iowa State. Une centaine d’entre eux ont reçu pendant deux semaines un rappel quotidien de ne pas consacrer plus de 30 minutes par jour aux réseaux sociaux.

Plusieurs des sujets ont rapporté que le « sevrage » a été difficile au début, mais qu’ils se sont ensuite sentis plus productifs et plus en contact avec leur propre vie. Ils ont aussi commencé à passer plus de temps en personne avec leur entourage.

D’autres études lors desquelles on a voulu limiter l’utilisation des réseaux sociaux par les jeunes ont utilisé des stratégies plus « envahissantes » pour le participant, soulignent les auteurs de la nouvelle étude, comme l’installation d’applications pour surveiller le temps d’écran ou carrément d’effacer les applications de réseaux sociaux.

Dans ce cas-ci, poursuivent-ils, ils ont voulu vérifier si une approche qui responsabilisait le jeune pourrait se révéler efficace pour améliorer sa santé mentale.

« Ces résultats indiquent que l’autocontrôle d’une utilisation limitée des réseaux sociaux peut être une intervention pratique pour améliorer le bien-être psychologique, écrivent-ils. Il est encore notable que, sans exiger une abstinence totale des réseaux sociaux, le fait d’encourager une utilisation limitée par le biais d’un courriel de rappel quotidien peut effectivement réduire l’impact négatif sur le bien-être psychologique. »

Il est en effet « très intéressant d’utiliser une pratique plus autonomisante » au lieu d’une régulation externe ou d’imposer des limites, a dit Mme Fitzpatrick.

Des recherches ont précédemment démontré que les jeunes savent très bien qu’ils passent trop de temps en ligne, et cela les inquiète, a-t-elle ajouté.

« Donc on n’a pas besoin d’utiliser une approche moralisatrice, on n’a pas besoin d’utiliser nécessairement de la restriction, a dit la chercheuse. On peut faire confiance aux jeunes. Ils ne sont pas dociles dans tout ça, ils prennent des décisions, ils réfléchissent à leur santé mentale et ils réfléchissent à leurs habitudes numériques. Donc ça vaut vraiment la peine d’utiliser ce genre de stratégie où les jeunes sont activement impliqués dans l’établissement de leur propre équilibre numérique. »

L’aspect crucial de cette expérience, soulignent les chercheurs américains, n’est pas que le jeune ait réussi ou non à limiter son utilisation des réseaux sociaux à trente minutes par jour : l’aspect crucial est que les participants essayaient de limiter leur utilisation. L’intervention s’est ainsi révélée efficace même chez ceux qui ont excédé la limite permise.

Les chercheurs concluent en disant que de prochaines études devraient s’intéresser à la manière dont les jeunes utilisent le temps qu’ils ne consacrent plus aux réseaux sociaux, pour approfondir le lien entre ces activités et leur santé mentale.