(Washington) Longtemps, il a même refusé de prononcer son nom en public. Mais Joe Biden lâche désormais ses coups contre son prédécesseur Donald Trump, sa rhétorique jugée autoritaire et son recours à un vocabulaire de « l’Allemagne des années 30 ».

L’ancien président républicain « a assurément soutenu une insurrection, il n’y a aucun doute là-dessus, aucun. Zéro », a dit mercredi le démocrate de 81 ans, lui-même candidat à un second mandat, en référence à l’attitude de son prédécesseur lors de l’assaut du Capitole par ses partisans déchaînés, le 6 janvier 2021.

Longtemps, le président américain a traité Donald Trump comme Voldemort, le sorcier maléfique qu’il est interdit de nommer dans le monde de « Harry Potter ».  

Devant les caméras, il préfère maintenant évoquer « l’autre gars » ou « le gars d’avant ».

Mais mardi soir, lors d’une rencontre avec des donateurs démocrates, Joe Biden a prononcé le nom de son rival une bonne douzaine de fois, comme il le fait désormais systématiquement lors de ce genre de réunions, destinées à lever des fonds pour sa campagne.

Menace

Ces réceptions ne sont ni filmées ni enregistrées, mais une poignée de journalistes prend des notes pendant le discours du président et la Maison-Blanche en diffuse une retranscription.

« Donald Trump menace bien des choses dans notre pays : le droit à l’avortement, le droit de vote, les droits civiques, la réputation de l’Amérique dans le monde […]. Mais ce que Trump menace le plus, c’est notre démocratie » : voilà le message de campagne central de Joe Biden, qu’il a encore répété mardi soir devant une centaine de partisans réunis dans un quartier chic de la banlieue de Washington.

« Chaque chef d’État que je rencontre me dit “Il faut que vous gagniez. Il faut que vous gagniez.” Malheureusement, ils ne disent pas cela pour moi, mais à cause de l’autre gars », a-t-il dit sur le ton de la blague.

Joe Biden sait qu’il ne suscite pas l’enthousiasme.  

Les mauvais sondages – à prendre avec bien des précautions si longtemps avant l’élection – se succèdent, son âge est un sujet d’inquiétude omniprésent, sa politique économique et sociale ne convainc pas, ses positions face au conflit dans la bande de Gaza et en matière d’immigration rebutent une partie de l’électorat progressiste.

Le président américain fait toutefois le pari qu’en novembre 2024, confrontés à la perspective concrète d’un nouveau mandat Trump, les électeurs oublieront leurs réserves à son endroit.

Il concentre donc ses attaques contre l’ancien président, en ignorant totalement les autres prétendants à l’investiture républicaine.

« Si Trump n’était pas candidat, je ne suis pas sûr que je me présenterais », avait d’ailleurs reconnu récemment le démocrate.

Joe Biden relève systématiquement les déclarations les plus violentes de son prédécesseur, comme s’il craignait que l’opinion publique, lasse des outrances de Donald Trump, n’y prête plus attention.

Mercredi, il a par exemple glissé une référence à son rival quitte à y faire référence dans des discours consacrés à tout autre chose.

« Perroquet »

Lors d’un déplacement visant à célébrer l’entrepreneuriat afro-américain, Joe Biden a assuré que sa politique économique était « une rupture avec la “théorie du ruissellement” appliquée à fond par (son) prédécesseur, le type qui pense que nous polluons le sang de l’Amérique. »

Le républicain avait déclaré samedi dernier lors d’un rassemblement de campagne, à propos des migrants : « Ils empoisonnent le sang de notre pays. »

« Donald Trump nous a montré qui étaient ses modèles en se faisant le perroquet d’Adolf Hitler », avait réagi l’équipe de campagne de Joe Biden.  

L’ancien président utilise un « vocabulaire qui nous rappelle l’Allemagne des années 30 », a déclaré mardi soir Joe Biden, en rappelant aussi le mot de « vermine » utilisé par son prédécesseur pour décrire ses adversaires politiques.

Joe Biden pointe par ailleurs régulièrement les références que fait son rival à des dirigeants autoritaires dans le monde, dont le président russe Vladimir Poutine.

« Ce n’est pas surprenant. Après tout, Moscou et Mar-a-Lago (NDLR : la résidence de Donald Trump en Floride) sont d’accord sur beaucoup de choses », a-t-il lancé mercredi.